Avis scientifique 2011/050
Mise à jour sur l’état de la population de phoques du Groenland (Pagophilus groenlandicus) de l’Atlantique Nord-Ouest
Sommaire
- Les phoques du Groenland de l’Atlantique Nord-Ouest sont chassés dans les eaux du Canada et du Groenland. Après s’être maintenus en moyenne à environ 52 000 individus par année entre 1983 et 1995, les prélèvements canadiens déclarés ont considérablement augmenté pour osciller entre 226 000 et 366 000 phoques de 1996 à 2006. Ces prélèvements ont ensuite diminué considérablement à partir de 2007, pour atteindre 69 101 individus déclarés en 2010. Les prélèvements groenlandais ont quant à eux augmenté de façon constante depuis le milieu des années 1970, atteignant un sommet d’environ 100 000 individus en 2000. Ils ont par la suite fluctué, s’établissant en moyenne à 85 000 phoques environ. Les prélèvements dans l’Arctique canadien sont quant à eux demeurés faibles (<1 000 individus).
- La présente évaluation est fondée sur les relevés des petits effectués une fois tous les 4 à 5 ans que l’on combine avec des estimations des taux de reproduction et des prélèvements annuels afin de déterminer l’abondance totale à l’aide d’un modèle de la population.
- On a estimé les prélèvements totaux de phoques du Groenland à partir des prélèvements déclarés, des estimations des prises accessoires principalement dans la pêche à la lompe à Terre-Neuve ainsi que des estimations des phoques tués mais qui n’ont pas été retrouvés (« abattus et perdus ») par les chasseurs des différentes régions. De 1996 à 2004, les prélèvements importants enregistrés au Canada et au Groenland ont totalisé en moyenne 465 500 individus par année. Cependant, les prélèvements totaux ont décliné à une moyenne annuelle de 310 300 depuis 2005, principalement en raison de la baisse des prises des chasseurs commerciaux canadiens.
- Les taux de gestation annuels font l’objet d’estimation depuis les années 1950. Les taux de gestation chez les femelles de 4 ans sont faibles et n’affichent aucune tendance, tandis que ceux des femelles de 5 et 6 ans se sont accrus au cours des années 1970 pour atteindre un sommet de 50 et de 90 % respectivement, puis ont décliné de 30 et de 50 % respectivement au milieu des années 1980. Depuis, cette baisse s’est poursuivie. Les taux de gestation des femelles de 7 ans et plus sont demeurés élevés jusqu’au milieu des années 1980, puis ont décliné pour atteindre environ 60 %. Depuis, les taux ont présenté de fortes fluctuations, passant de 40 % en 2004 à 74 % en 2008. Le déclin général et la variabilité marquée observée dans les taux de reproduction laissent sous-entendre que des facteurs dépendants de la densité ont une incidence sur la dynamique de cette population.
- Le 10 mars 2008, on a effectué un relevé aérien visuel au-dessus de la plus importante concentration de mise bas au large de Terre-Neuve, lequel relevé a permis l’établissement d’une estimation de 589 400 petits (ET=49 500); un relevé photographique de la même concentration effectué le 12 mars a quant à lui permis d’établir une estimation de 1 161 600 petits (ET=112 300). Les résultats d’un deuxième relevé photographique de cette concentration effectué le 16 mars (1 026 997; ET=280 445) ont été semblables à ceux obtenus grâce au relevé photographique du 16 mars, ce qui laisse sous-entendre que le relevé visuel du 10 mars constituerait une sous-estimation.
- En combinant les estimations des deux relevés photographiques effectués sur le Front (1 142 985; ET=104 284) aux estimations de la production de petits dans le sud du Golfe (287 033; ET=27 561), le nord du Golfe (172 482; ET=22 287) et d’un autre petit groupe se trouvant sur le Front (23 381; ET=5 492), on obtient une estimation de la production totale de petits pour 2008 de 1 630 300 (ET=110 400; CV=6,8 %).
- En supposant une croissance démographique exponentielle, on a ajusté le modèle de la population aux données des relevés et aux taux de reproduction ajustés, ce qui a donné une estimation de la population totale de 8,0 millions d’individus (IC de 95 % : 6,77 à 9,26 millions) en 2008. Cependant, l’ajustement du modèle aux données des relevés récents sur les petits était très médiocre en raison des grandes fluctuations observées dans les taux de reproduction annuels chez les femelles ayant atteint la maturité, ce qui a vraisemblablement produit des changements marqués dans la production de petits en 2004 et en 2008.
- Un modèle supposant une croissance démographique dépendante de la densité, une capacité biotique de 12 millions d’individus et des données sur le taux de reproduction annuel ont été ajustées aux données de relevé. Il a ainsi été possible d’établir un meilleur ajustement des données des relevés sur les petits, et le résultat a été une estimation de la population totale de 8,11 millions d’individus (IC de 95 % : 7,34 à 8,89 millions) en 2008. Si une capacité biotique supérieure de 16 millions d’individus est présumée, la population estimée en 2008 passerait à 8,73 millions d’individus (IC de 95 % : 7,82 à 9,83 millions).
- Il est difficile d’établir à l’avance les tendances qu’affichera la population en raison de l’incertitude liée aux taux de reproduction et de la formulation du modèle utilisé pour décrire la dynamique de cette population. Selon le type de modélisation et les données sur la reproduction utilisés, la population en 2010 se situerait entre 8,61 et 9,55 millions d’individus (IC de 95 % : 7,80 à 10,80 millions).
- On a demandé au secteur des Sciences d’examiner un éventail de scénarios de prélèvement afin de déterminer quels impacts ceux-ci peuvent avoir sur la population. Les prélèvements annuels totalisant jusqu’à 400 000 individus assureraient le respect du plan de gestion au cours des trois prochaines années, si la mortalité chez les jeunes de l’année provoquée par les conditions de glace se maintient en moyenne à environ 30 % au‑dessus de la normale. Des niveaux supérieurs pourraient être acceptables, mais ils deviennent fragiles vis-à-vis des hypothèses concernant la croissance démographique. On prévoit des conditions de glace très mauvaises pour 2011, ce qui peut entraîner une mortalité plus élevée, mais des prélèvements dans de telles conditions devraient par contre demeurer faibles.
- La population actuelle est à son niveau le plus élevé dans la série chronologique de 60 ans. Cependant, l’incertitude associée aux changements survenant dans la population actuelle et à la variabilité des taux de reproduction ainsi que celle liée aux niveaux de prélèvement des Groenlandais compliquent les tentatives de modélisation des tendances qu’affichera cette ressource. On recommande d’augmenter la fréquence des relevés sur la production de petits.
Le présent avis scientifique fait suite à une réunion de consultation scientifique nationale du Secrétariat canadien de consultation scientifique de Pêches et Océans Canada, qui a eu lieu du 22 au 26 novembre 2010 dans le cadre d’une réunion du Comité national d’examen par les pairs sur les mammifères marins (CNEPMM). D’autres documents découlant de ce processus seront publiés, dès qu’ils seront disponibles, dans le calendrier des avis scientifiques du MPO.
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