Avis scientifique 2017/039
Désignation de l’habitat d’importance particulière pour le rorqual commun (Balaenoptera physalus) dans les eaux canadiennes du Pacifique
Sommaire
- Les populations de rorquals communs du Pacifique Nord ont été fortement épuisées par la chasse commerciale pratiquée au 20e siècle. Les registres de captures (n = 7 605 tonnes) des stations de baleiniers terrestres en Colombie-Britannique (de 1908 à 1967) indiquent que la plupart des rorquals communs ont été tués à l’ouest de la plate-forme continentale. Toutefois, les rorquals communs ont également été chassés dans le détroit d’Hécate, dans le bassin de la Reine-Charlotte, dans l’entrée Caamano et dans l’entrée Dixon.
- Selon les relevés de 2002 à 2015, les rorquals communs ont été observés au large de la plate-forme continentale à l’ouest de Haida Gwaii et de l’île de Vancouver, le long de l’isobathe de 1 000 m, entre le cap St James et le cap Scott, mais aussi sur la plate-forme continentale dans le détroit d’Hécate, dans le bassin de la Reine-Charlotte, dans l’entrée Caamano et dans l’entrée Dixon.
- La variation géographique du chant du rorqual commun ainsi que les études génétiques indiquent qu’une certaine structure de la population peut être présente dans le nord-est du Pacifique. L’existence de deux types de chant (type 1 et 2) indique qu’au moins deux composantes de la population se trouvent dans les eaux de la Colombie-Britannique. La composante qui produit le type 2 semble se trouver plus souvent en eaux intérieures, et l’autre composante semble se trouver au large. Seul le chant de type 2 a été détecté par les enregistreurs acoustiques placés dans les eaux intérieures de la Colombie-Britannique.
- Bien que des relevés aient été effectués dans les eaux de mer ouverte de la Colombie-Britannique, la plupart l’ont été dans les eaux intérieures du détroit d’Hécate, du bassin de la Reine-Charlotte et de l’entrée Caamano. Qui plus est, l’étude de télémesure satellitaire du rorqual commun a été réalisée seulement dans le détroit d’Hécate et dans l’entrée Caamano. Aussi l’évaluation de l’habitat important du rorqual commun en Colombie-Britannique est-elle limitée à la zone en eaux intérieures.
- La modélisation des observations et des relevés par bateau (de 2002 à 2014) dans le détroit d’Hécate et dans le bassin de la Reine-Charlotte révèle un lien entre la présence du rorqual commun et le fossé Moresby, une ravine en eaux profondes qui s’étend du nord-est du bord de la plate-forme continentale au sud de Haida Gwaii en direction de l’île Banks du côté est du détroit d’Hécate. Elle indique également une association avec les têtes de canyons sous-marins, près de la courbe bathymétrique de 1 000 m entre le cap Scott ou le cap St James, et avec des zones le long du littoral, en particulier dans l’entrée Caamano.
- Dans le détroit d’Hécate et le bassin de la Reine-Charlotte, l’importance de l’habitat a été mise en évidence dans de précédents modèles d’aire de répartition du rorqual commun, qui ont établi des zones semblables à partir de données sur la chasse à la baleine (1949-1967) et de relevés par transect (2004-2008).
- Selon une analyse par marquage-recapture de photo-identifications, il a été estimé que 405 rorquals communs (CV = 6 %, IC de 95 % : 363-469) étaient présents dans le détroit d’Hécate et dans le bassin de la Reine-Charlotte au cours de la période de photo-identification de 2009 à 2014. Une estimation de l’abondance pour la même région, fondée sur des données tirées de précédents relevés de transect (2004-2008), a donné une approximation semblable (nombre moyen : 329, IC de 95 % : 274-395).
- Il n’y a pas d’estimation de l’abondance des rorquals communs dans les régions extracôtières de la Colombie-Britannique.
- Les rorquals communs étiquetés dans l’entrée Caamano et dans le détroit d’Hécate demeurent dans la région durant la période de transmission de leurs étiquettes. L’analyse des déplacements qu’ont enregistrés les étiquettes indique des périodes de mouvement limité à cette zone, pouvant correspondre à un comportement de recherche de nourriture, qui ont duré plusieurs jours ou semaines, mais qui ont été entrecoupées de périodes de mouvement dirigé dans le détroit d’Hécate, dans le bassin de la Reine-Charlotte et dans l’entrée Caamano.
- L’analyse des données sur les plongées indique que, dans l’entrée Caamano, les rorquals communs ont soutenu un régime de plongées plus profondes pendant la journée que pendant la nuit. Un tel régime donne à penser que les animaux s’alimentaient de zooplancton en migration verticale qui se trouve en denses agrégations dans les eaux profondes le jour.
- La surveillance acoustique a révélé que l’activité d’appel du rorqual commun dans le détroit d’Hécate et dans le bassin de la Reine-Charlotte était supérieure à l’activité dans les zones extracôtières surveillées (de 2009 à 2015).
- Les temps forts du chant des mâles dans les sites surveillés du détroit d’Hécate (de novembre à janvier) survenaient un peu plus tard dans la saison par rapport à d’autres sites. Cela porte à croire que les rorquals communs se déplacent dans le détroit d’Hécate et dans le bassin de la Reine-Charlotte à la fin de l’automne et durant l’hiver, période qui coïnciderait avec la saison de reproduction de l’espèce dans le Pacifique Nord.
- Les détails sur les captures de rorquals communs dans les données historiques sur la chasse à la baleine en Colombie-Britannique indiquent que 75 % des naissances auraient eu lieu de la mi-novembre à la mi-mars, atteignant un pic en janvier. Combinée à la forte activité d’appel, cette information porte à croire que la parade nuptiale, l’accouplement et le vêlage pourraient se produire dans le détroit d’Hécate et dans le bassin de la Reine-Charlotte.
- Les observations de rorquals communs accompagnés de baleineaux (de 2006 à 2015) indiquent que certains rorquals communs élèvent leurs jeunes dans le détroit d’Hécate, dans le bassin de la Reine-Charlotte et dans l’entrée Caamano.
- À la lumière des éléments susmentionnés et à l’aide de la méthode basée sur la zone de délimitation, une zone englobant l’entrée Caamano et une partie du détroit d’Hécate et du bassin de la Reine-Charlotte a été désignée comme habitat important de quête de nourriture, de reproduction, d’accouplement et d’élevage pour les rorquals communs.
- Parmi les caractéristiques et les paramètres importants de cette zone figurent la présence de proies en quantité et de qualité suffisantes, un espace physique permettant la liberté de mouvement et une eau de qualité suffisante pour qu’il n’y ait pas de perte de fonction de l’habitat ainsi qu’un environnement acoustique qui n’interfère pas avec les communications ou les mouvements ou qui ne gêne pas l’utilisation de l’habitat important par le rorqual commun et ses proies.
- Les activités anthropiques qui pourraient entraîner une perte de fonctions de cet habitat important comprennent celles qui provoqueraient une diminution de la disponibilité ou de l’accessibilité des proies, des perturbations acoustiques, la contamination de l’environnement et des perturbations physiques.
- Le changement climatique peut aussi avoir une incidence sur les fonctions de l’habitat en modifiant la disponibilité des proies et les propriétés physiques de l’océan. Les activités anthropiques et leurs effets sur les fonctions de l’habitat doivent être gérés dans le contexte de cet enjeu permanent.
- La zone désignée dans cette étude ne constitue vraisemblablement qu’une partie de l’habitat important pour les rorquals communs en Colombie-Britannique. Il faut étendre les travaux de recherche aux eaux de mer ouverte afin de déterminer les habitats extracôtiers qu’utilise le rorqual commun et leur importance pour l’espèce.
Le présent avis scientifique découle de la réunion du Comité national d’examen par les pairs sur les mammifères marins (CNEPMM) : partie II, qui s'est tenue du 23 au 26 février 2016. Toute autre publication découlant de cette réunion sera publiée, lorsqu’elle sera disponible, sur le Calendrier des avis scientifiques du MPO.
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