Document de recherche 2008/008
Chasse commerciale et de subsistance à la baleine boréale (Balaena mysticetus) dans l’est de l’Arctique canadien et l’ouest du Groenland
Par J. Higdon
Résumé
La longue histoire de la chasse commerciale à la baleine boréale (Balaena mysticetus) dans l’est du Canada et l’ouest du Groenland débute vers 1530 avec la venue des baleiniers basques dans le détroit de Belle-Isle. À la fin des années 1600, les baleiniers hollandais, danois et allemands ont effectué leurs premiers voyages dans le détroit de Davis, mais les données ne sont disponibles qu’à partir de 1719. Les colons danois et norvégiens, arrivés dans l’ouest du Groenland en 1721, participaient aussi activement à la chasse à la baleine boréale. Les baleiniers britanniques exploitaient les eaux du détroit de Davis au milieu des années 1700 et sont allés dans la baie de Baffin au début des années 1800, donnant une nouvelle impulsion à cette chasse au large de l’île de Baffin, dans le détroit de Lancaster, l’inlet Prince-Régent et le golfe de Boothia. Les baleiniers américains étaient actifs dans le détroit de Davis dans les années 1700 et 1800, de même que dans la baie d’Hudson après 1860, où les baleiniers écossais se sont joints à eux. Des prises moindres ont été réalisées par d’autres nations, dont la France. La chasse commerciale à la baleine boréale dans l’Arctique canadien a pris fin en 1915, la population ayant atteint des effectifs extrêmement faibles et les voyages n’étant plus profitables. Les prélèvements commerciaux de 1530 à 1915 se sont situés, selon les estimations, entre 57 507 et 68 736 baleines, les prises les plus élevées ayant été réalisées par les Basques et les Britanniques.
Les Inuits du Canada et de l’ouest du Groenland chassent la baleine pour assurer leur subsistance et pour commercer avec les Euro américains depuis des siècles. Peu de baleines ont été prises durant les années 1900, et la chasse est actuellement limitée au Nunavut; il en sera de même au Nunavik et dans l’ouest du Groenland. La première culture à donner naissance à des chasseurs actifs fut la culture de Thulé, qui a remplacée la culture Dorset dans l’est de l’Arctique vers l’an 1000. La dépendance des Inuits à la baleine boréale a varié considérablement tant dans l’espace que dans le temps. Parmi les régions où la chasse ciblant cette espèce était importante, citons la baie de Disko, la baie Cumberland et l’île Somerset. Les prélèvements antérieurs aux débuts de la chasse commerciale à la baleine (de 1000 à 1529) ont été estimés à environ 15 000 baleines, les prises annuelles maximales s’établissant à 36 baleines. Ces chiffres reposent sur l’abondance des ossements de baleines trouvés dans des maisons d’hiver excavées par des archéologues. Après l’an 1500, la chasse à la baleine boréale a décliné, peut-être en raison des conditions climatiques changeantes, d’une raréfaction des baleines attribuable aux prélèvements basques ou d’une combinaison de ces deux facteurs. Les prélèvements totaux entre l’an 1530 et la fin de la chasse commerciale sont estimés à 8460 baleines. La chasse par les Inuits a décliné de nouveau après que des baleiniers commerciaux aient surexploité la population de baleines boréales, et seulement 56 baleines auraient été prélevées (ou abattues et perdues) après 1918. L’estimation des prélèvements inuits repose sur des données éparses et un certain nombre d’hypothèses. Certaines preuves attestent qu’au moins une partie de la série de données sur les prélèvements est sous-estimée. Même si les prélèvements avaient été supérieurs, ils n’auraient vraisemblablement pu être suffisamment élevés pour causer des déclins de la population. Ainsi, la longue tradition de la chasse à la baleine boréale par les Inuits a subi les effets négatifs de la chasse commerciale.
Les prises totales estimées, en combinant les prélèvements commerciaux et inuits après l’an 1530 mais n’incluant pas les animaux abattus et perdus et reconnues comme étant incomplètes pour certaines nations et certaines époques, atteignent plus de 70 000 baleines. La quasi-totalité de ces prises (environ 88 %) est l’œuvre des baleiniers commerciaux euro-américains. Bien qu’encore incomplète, la série sur les prélèvements contient des données plus détaillées que celles disponibles par le passé et devrait nous permettre d’améliorer la modélisation afin d’estimer l’effectif de la population avant la chasse. Cependant, toute modélisation doit évaluer rigoureusement la sensibilité des résultats aux aspects variables de la série sur les prélèvements en raison du nombre d’hypothèses incluses. La qualité des données sur les prélèvements varie considérablement d’une nation et d’une époque à l’autre, c’est pourquoi chaque série a reçu une cote sur une échelle de trois points pour la fiabilité des données. Plus de moitié des prélèvements estimés sont considérée comme moins fiables, y compris les prélèvements des Basques et la plupart des prélèvements des Inuits. Les études de modélisation de la population devront incorporer de façon explicite cette variabilité de la qualité de données.
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