Document de recherche 2009/067
Information scientifique à l’appui de l’évaluation du potentiel de rétablissement du meunier de salish (Catostomus sp.) au Canada
Par B. Harvey
Résumé
La présente évaluation du potentiel de rétablissement fournit un avis technique au ministre des Pêches et des Océans concernant le niveau de dommages admissibles au meunier de Salish (Catostomus sp.), inscrit comme espèce en voie de disparition (annexe 1) en vertu de la Loi sur les espèces en péril (LEP).
Le meunier représente une grande famille de poissons qui comprend le meunier rouge (Catostomus catostomus), une espèce largement répandue. Le meunier de Salish est une forme divergente du meunier rouge, qui se trouve dans l’ouest de l’État de Washington et dans la vallée du bas Fraser, en Colombie‑Britannique. Il se distingue du meunier rouge sur le plan génétique, mais il n’a pas encore été reconnu comme espèce distincte. Le meunier de Salish est disparu d’au moins un bassin hydrographique de la vallée du Fraser (la rivière Little Campbell), et il est présentement limité à dix autres bassins hydrographiques. Dans ces rivières, sa répartition est restreinte à quelques tronçons, et la plupart des domaines vitaux sont petits.
Comme le meunier de Salish est petit, a une maturité précoce et une courte vie, son cycle biologique opportuniste peut favoriser le rétablissement de sa population dans le cas où les perturbations sont à court terme et restreintes à une petite région. Le meunier de Salish est le plus couramment retrouvé dans des marais et des étangs de castor où la profondeur de l’eau est supérieure à 70 cm. L’espèce a besoin de zones d’eau profonde, d’un accès à des rapides pour le frai et à des habitats moins profonds, propices à l’alevinage. L’habitat essentiel potentiel a été défini, pour tous les tronçons dans lesquels vivent actuellement des populations de meuniers de Salish, comme correspondant aux tronçons qui présentent une fosse continue sur plus de 50 m et excèdent 70 cm de profondeur à l’étiage. L’habitat essentiel inclut les bandes de réserve riveraine le long des deux rives. La majeure partie de l’habitat essentiel potentiel a été cartographiée et inclut actuellement 141,5 km de chenal ayant fait l’objet de relevés (environ 50 % de l’aire totale visée par les relevés).
D’après les données limitées qui remontent à 2004, les abondances moyennes estimées étaient bien inférieures aux tailles de population viable généralement acceptées comme règle empirique pour les vertébrés dans le cas où les données sur l’abondance sont faibles. Si tous les habitats essentiels potentiels étaient occupés à une densité de 0,05 poisson/m2, la capacité biotique estimée varierait alors de 800 à 7 000 poissons par cours d’eau, ce qui est également inférieur au minimum accepté pour les vertébrés. Il s’agit là d’un argument solide pour préserver le plus d’habitats essentiels que possible.
La principale cause des dommages anthropiques est l’agriculture et le développement urbain dans la vallée du Fraser. L’hypoxie, qui résulte principalement de la pollution par les engrais et le fumier agricoles, constitue la menace la plus grave. La perte, la fragmentation et la dégradation de l’habitat entraînent la sédimentation et l’isolement des sous‑populations.
Des organismes gouvernementaux et des agriculteurs ont mis au point la Stratégie de planification de la gestion des éléments nutritifs afin de déterminer des stratégies permettant aux exploitations agricoles d’obtenir un équilibre acceptable en matière d’éléments nutritifs et de réduire le risque d’hypoxie dans l’habitat du meunier de Salish. Il est possible de réduire la destruction et la fragmentation de l’habitat par des mécanismes réglementaires en vigueur qui permettent d’élaborer des pratiques de gestion optimales propres à chaque tronçon ainsi que de restaurer les habitats endommagés. Des documents de sensibilisation du public et une approche participative seront essentiels. Des dispositions sur les débits réservés minimaux doivent aussi être élaborées, et l’octroi de permis doit être considéré pour l’extraction d’eau souterraine.
Il est possible d’éliminer les activités nuisibles dans les parties des bassins hydrographiques où l’habitat essentiel est endommagé. Des parties des terres riveraines exploitées activement par l’agriculture pourraient être retirées de la production. L’un des modèles qui exposent cette mesure est le programme d’amélioration des réserves de conservation (CREP – Conservation Reserve Enhancement Program), un programme de retrait des terres administré par le Department of Agriculture des États-Unis. Au Canada, il est possible d’atteindre des objectifs similaires par l’intermédiaire de fiducies de terres, dont certaines fonctionnent d’une manière comparable au CREP. L’initiative des plans environnementaux en agriculture réalisée en Colombie‑Britannique (BC Environmental Farm Plan) offre aussi certaines possibilités immédiates pour protéger l’habitat du poisson.
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