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Politique sur la pêche des espèces fourragères

Cadre pour la pêche durable

Les espèces fourragères jouent un rôle spécial dans les écosystèmes aquatiques, où elles constituent une portion substantielle de l’alimentation annuelle pour de nombreux poissons, mammifères marins, reptiles et oiseaux. Ces relations écologiques placent des contraintes supplémentaires sur la façon dont on peut planifier, effectuer et évaluer l’exploitation durable des espèces fourragères. Certaines espèces fourragères, comme le hareng et le capelan, sont depuis de nombreuses décennies la cible de pêches durables et économiquement viables au Canada, sans toutefois causer de perturbations indues dans les composantes et les processus écosystémiques. Étant donné qu’il est nécessaire de réduire la participation aux pêches traditionnelles et de développer de nouvelles possibilités économiques dans les zones côtières, on s’intéresse de plus en plus à l’exploitation d’espèces supplémentaires, notamment d’autres espèces fourragères. De nouvelles pêches d’espèces fourragères représentent de nouveaux défis sur le plan du développement durable des pêches. Non seulement il faut assurer la conservation des espèces visées, et limiter les prises accessoires, mais ces pêches ne doivent pas menacer la conservation d’autres espèces dont l’alimentation dépend des espèces fourragères. En conséquence, cette politique vise à établir un cadre garantissant que les pêches des espèces fourragères sont menées en conformité avec la conservation de l’ensemble de l’écosystème, et que leur développement durable est évalué dans ce contexte plus vaste.

Qu’est-ce qu’une espèce fourragère?

Une espèce fourragère est une espèce qui se trouve située à un niveau qui n’est pas le plus haut dans une chaîne alimentaire aquatique, qui constitue une importante source de nourriture pour au moins quelques prédateurs, et qui connaît une forte mortalité par prédation. Dans la perspective de la gestion des pêches, l’espèce sera entièrement recrutée à la pêche à des âges qui connaissent encore une forte mortalité en raison de la prédation. Les espèces fourragères connaissent souvent de grandes fluctuations naturelles de l’abondance en réponse à des facteurs environnementaux, à des échelles temporelles comparables à la durée d’une génération, ou plus courte. Les espèces fourragères forment aussi, généralement, des bancs denses pendant une partie au moins du cycle annuel, ont une durée de vie relativement courte et présentent une répartition côtière pendant au moins une partie de l’année.

Les espèces fourragères entretiennent généralement des prédateurs dépendants, qui sont des espèces tirant une partie importante de leur ration alimentaire annuelle des espèces fourragères elles-mêmes. Lorsqu’une espèce fourragère connaît une baisse marquée de l’abondance (due à des causes naturelles ou à la surexploitation), le prédateur dépendant présentera vraisemblablement des réactions biologiques comme : changements importants dans l’alimentation, réduction du taux de croissance et de l’accumulation de graisses, baisse du succès de reproduction ou retard de la maturation et enfin, changements dans les modes normaux de distribution saisonnière.

Buts d’une politique sur la pêche des espèces fourragères

Les objectifs d’une politique sur la pêche des espèces fourragères, axée sur la conservation, comprend :

Il s’agit là d’objectifs et non pas d’options que l’on pourrait laisser de côté dans certains cas. La pêche d’une espèce fourragère doit être conçue de façon à assurer, avec un haut niveau de probabilité, que ces cinq objectifs seront atteints.

Principes d’une politique sur la pêche des espèces fourragères

Un certain nombre de principes d’écologie et de gestion des pêches constituent un cadre sur lequel peut s’appuyer une politique sur la pêche des espèces fourragères. Ces principes, avec leurs incidences, comprennent :

  1. L’exploitation d’un stock doit tenir compte à la fois de la productivité du stock et de son rôle trophique dans l’écosystème. La pêche d’une espèce fourragère n’a ceci de particulier que l’importance qui est accordée au rôle trophique.
  2. L’effectif des classes annuelles d’une espèce fourragère connaît souvent de grandes variations, et la taille des classes annuelles est souvent corrélée sur plusieurs années. Dans un tel cas, un taux fixe d’exploitation ne permet pas de garantir qu’une biomasse adéquate de géniteurs sera toujours protégée. Il sera aussi vraisemblablement nécessaire d’établir comme stratégie de gestion le maintien d’une biomasse minimale de géniteurs.
  3. Les principes de l’approche de précaution doivent être suivis dans la gestion de la pêche des espèces fourragères. Les biomasses des espèces fourragères qui servent de points de référence limites pour la gestion doivent garantir à la fois que le recrutement futur de l’espèce visée n’est pas entravé et que l’approvisionnement en nourriture des prédateurs n’est pas réduit.
  4. Les principes de l’approche de précaution signifient aussi qu’il faut établir au préalable des règles de contrôle de l’exploitation qui permettent de réduire de façon rapide et efficace la pêche (y compris la fermeture) lorsque le risque de voir un stock tomber au-dessous d’un point de référence est trop élevé.
  5. Des points de référence peuvent aussi être fixés pour des propriétés comme le taux de croissance, le coefficient de condition ou le succès reproductif des prédateurs marins écologiquement dépendants, notamment lorsque ces facteurs peuvent être étudiés de façon plus fiable que la biomasse, le taux d’exploitation et d’autres propriétés de l’espèce fourragère elle-même.
  6. La gestion d’une espèce fourragère doit garantir qu’il n’y aura pas d’appauvrissement local de certaines composantes de la population. Un appauvrissement local de l’espèce fourragère pourrait se traduire par une pénurie de nourriture chez les prédateurs dépendants, même si globalement l’exploitation de l’espèce fourragère avait un caractère durable.
  7. La capacité d’exploitation ne doit pas être autorisée à croître d’une façon qui serait difficile à renverser pendant les périodes où une espèce fourragère est particulièrement abondante. Une industrie de la pêche économiquement autonome devrait être capable de réagir aux déclins naturels de l’abondance d’une espèce fourragère en s’imposant de façon immédiate une forte réduction de l’exploitation.
  8. Lorsque des espèces fourragères ont historiquement alimenté des pêches autochtones à des fins alimentaires, sociales ou cérémonielles, on doit pleinement accéder à ces utilisations dans toute analyse de possibilités de pêches commerciales nouvelles ou élargies. Lorsque les prises doivent être réduites afin de s’assurer que le rôle de l’espèce fourragère dans l’écosystème n’est pas mis en danger, la priorité doit être donnée aux pêches autochtones traditionnelles. Ces dernières ne seront retranchées ou arrêtées que lorsqu’elles posent un grave risque pour la conservation et après que, même lorsque toutes les pêches commerciales ciblant le stock en question ont été arrêtées, les pêches autochtones traditionnelles posent encore un risque pour la conservation.
  9. Pour assurer la conservation des prédateurs dépendants et d’autres espèces associées à l’espèce fourragère, il est nécessaire de surveiller leur situation tout comme celle de l’espèce fourragère elle-même. En effet, le taux de capture d’une espèce fourragère présente sous forme d’une agrégation dense est trompeur, étant donné que l’espèce peut alors soutenir un taux d’exploitation élevé, même si son abondance est en train de baisser, et du fait que les populations de prédateurs peuvent changer pour de nombreuses raisons, y compris des modifications de leur approvisionnement en nourriture.
  10. L’industrie de la pêche doit jouer un rôle responsable en partageant les coûts et en participant à la surveillance des propriétés de l’écosystème qui servent à la gestion de la pêche des espèces fourragères.

Politique

La pêche des espèces fourragères sera autorisée seulement lorsque l’on peut, de façon raisonnable, prévoir que les cinq objectifs ci-dessus seront atteints. Lorsqu’il s’agira d’une pêche nouvelle au Canada, elle devra être développée conformément à la Politique sur les nouvelles pêches, tout en respectant les préalables additionnels précisés ci-dessous. Dans le cas des pêches d’espèces fourragères commerciales déjà établies et les récoltes traditionnelles autochtones, elles peuvent se poursuivre dans le cadre des approches de gestion actuelles. Toutefois, les propositions de modification des taux d’exploitation, des engins, des saisons ou d’autres attributs des pêches qui pourraient nuire à la conservation de l’espèce fourragère ou des espèces qui s’en nourrissent doivent être évaluées en fonction des préalables ci-dessous.

Pour démontrer que l’on peut « raisonnablement s’attendre » à atteindre les objectifs de la conservation, de l’aspect social et de l’aspect économique, il faut respecter plusieurs conditions. Certains préalables sont d’ordre biologique, d’autres s’appliquent à un système de gestion. Même si la pêche proposée d’une espèce fourragère a vraisemblablement un caractère durable et compatible avec la conservation de l’écosystème, l’approbation n’est pas garantie. En particulier, si on relève des incertitudes exceptionnelles dans certaines des évaluations, ou si les conséquences du non-respect de l’objectif de conservation de l’espèce fourragère sont graves, la décision correcte peut être de ne pas autoriser des pêches dirigées.

Préalables biologiques pour la pêche commerciale des espèces fourragères

B.1  Il doit être possible de surveiller la situation de l’espèce fourragère de façon régulière et de se servir des résultats de ce suivi pour évaluer si le stock atteint les cibles de la conservation.

B.2  Il doit être possible d’identifier certaines espèces de prédateurs qui permettraient d’évaluer de façon adéquate le caractère durable de la pêche dans le contexte des espèces écologiquement associées. Les espèces de prédateurs sont celles qui présentent des exigences alimentaires relativement élevées, dont l’espèce fourragère compose une bonne partie de l’alimentation, qui ont relativement plus de difficulté à changer de proie ou à trouver une nourriture adéquate quand l’espèce fourragère n’est pas abondante et qui présentent des traits biologiques pertinents, comme l’abondance ou un succès reproductif, qui sont faciles à mesurer avec précision.

B.3  Il doit être possible d’estimer le risque que le niveau proposé d’exploitation pose pour l’espèce fourragère et les espèces qui en dépendent écologiquement. Dans la situation où le risque présenté par un niveau particulier d’exploitation et les conséquences de la surexploitation sont particulièrement incertains, il est nécessaire de prendre des décisions très axées sur la réduction des risques.

B.4  Il faut posséder des connaissances suffisantes sur l’espèce fourragère et sa relation avec ses principaux prédateurs pour guider adéquatement les opérations de pêche dans l’espace et dans le temps. Il faut pour cela connaître à la fois la distribution et le degré d’agrégation de l’espèce fourragère (et leurs modifications saisonnières, le cas échéant), et les distributions saisonnières et spatiales des prédateurs.

Préalables pour la gestion de la pêche commerciale des espèces fourragères

M.1  Il faut établir clairement des points de référence et des règles connexes d’exploitation, à la fois pour l’espèce fourragère (B.1) et pour certains prédateurs dépendants marins (B.2). Les points de référence doivent garantir que la pêche (la pêche commerciale et la pêche autochtone pour les fins alimentaires, sociales et cérémonielles, combinées) ne réduit pas l’espèce fourragère à un niveau où sa productivité ou la productivité des prédateurs qui en dépendent seraient réduites.

M.2  Pour que les points de référence et les règles de contrôle de l’exploitation puissent assurer la conservation, la surveillance et l’application des règlements exercées dans la pêche doivent être adéquates pour garantir un niveau élevé de respect du plan de gestion.

M.3  Les coûts d’administration et de gestion de ces pêches seront probablement élevés, car ils doivent couvrir la surveillance de la situation de l’espèce fourragère et de certains prédateurs dépendants marins, et garantir un niveau élevé de respect du plan de gestion dans la pêche. L’industrie doit prendre la responsabilité d’assumer une part équitable de ces coûts.

M.4  Les plans de gestion de la pêche commerciale des espèces fourragères doivent comporter des dispositions explicites visant à garantir que les pêches ne concentrent pas l’exploitation de façon indue, et ne causent pas d’affaiblissement localisé de l’espèce fourragère.

M.5  Les plans d’exploitation doivent comporter des mesures visant à détecter et à gérer les prises accessoires d’espèces non ciblées, qu’elles aient ou non une valeur commerciale, et à protéger la végétation du fond marin et les structures physiques lorsque la pêche d’une espèce fourragère s’exerce près du littoral ou près du fond.

M.6  La gestion de la pêche commerciale des espèces fourragères doit comporter des plans à long terme qui fixent la taille prévue de la flottille et le volume des captures sur plusieurs années, qui précisent les objectifs stratégiques à long terme de la pêche ainsi que des objectifs opérationnels annuels (ou à court terme) dans le cadre desquels s’exercera la pêche, de même que les règles de contrôle de l’exploitation qui guideront et restreindront les opérations. Les dispositions des plans à long terme doivent être fondées sur la meilleure information scientifique disponible (y compris la connaissance traditionnelle) et être le fruit d’une vaste consultation de tous les intervenants. Des modifications ne seront apportées aux plans à long terme, en-dehors de leur cycle pluriannuel de planification et d’examen, que lorsqu’apparaîtront de nouvelles connaissances substantielles sur les effets de la pêche.

Politique sur la pêche des espèces fourragères

1. Contexte

Les espèces fourragères jouent un rôle spécial dans les écosystèmes aquatiques, où elles constituent une portion substantielle de l’alimentation annuelle pour de nombreux poissons, mammifères marins, reptiles et oiseaux. Certaines des associations entre les prédateurs et les espèces fourragères sont si fortes que, lorsque la disponibilité des espèces fourragères s’affaiblit, la santé des individus et la productivité de la population parmi les prédateurs peuvent décliner. Ces relations écologiques placent des contraintes supplémentaires sur la façon dont on peut planifier, effectuer et évaluer l’exploitation durable des espèces fourragères.

Certaines espèces fourragères sont depuis de nombreuses décennies la cible de pêches au Canada. Ces pêches durables ont apporté des profits économiques aux pêcheurs, aux transformateurs et aux communautés côtières, sans perturber indûment les composantes et les processus écosystémiques. C’est le cas par exemple du hareng (Clupea harengus) sur les côtes de l’Atlantique et du Pacifique, et du capelan (Mallotus villosus) dans les eaux de Terre-Neuve et dans les eaux du golfe du Saint-Laurent.

À l’heure où il faut réduire la participation aux pêches traditionnelles du poisson de fond et des salmonidés sur les côtes de l’Atlantique et du Pacifique, et où se dessine une volonté générale d’accroître les possibilités d’exploitation des ressources marines, on voit se développer de l’intérêt pour la pêche d’autres espèces, notamment certaines qui sont une source importante de nourriture pour les poissons, les oiseaux et les animaux marins, comme diverses espèces d’euphausiacés, ou krill (Euphausia et Thysanoessa).

Malgré les succès évoqués ci-dessus, les pêches commerciales des espèces fourragères représentent de nouveaux défis sur le plan du développement durable des pêches. Non seulement il faut assurer la conservation des espèces visées et limiter les prises accessoires, mais ces pêches ne doivent pas menacer la conservation d’autres espèces dont l’alimentation dépend des espèces fourragères. En conséquence, cette politique vise à établir un cadre garantissant que les pêches des espèces fourragères sont menées en conformité avec la conservation de l’ensemble de l’écosystème, et que leur développement durable est évalué dans ce contexte plus vaste. Le fait que cette politique sur la pêche des espèces fourragères traite explicitement de développement durable dans un contexte écosystémique ne signifie pas que les considérations écosystémiques ne sont pas pertinentes dans les pêches d’autres espèces qui ne constituent pas une source importante de nourriture pour d’autres prédateurs. Il s’agit plutôt d’inscrire plus explicitement dans la gestion, la surveillance et l’évaluation de la pêche des espèces fourragères les composantes et les processus écosystémiques, et de le faire à toutes les étapes du cycle de planification, d’opération et d’évaluation des pêches visant les espèces fourragères.

2. Définitions

Une espèce fourragère est une espèce qui se trouve située à un niveau qui n’est pas le plus haut dans une chaîne alimentaire aquatique, qui constitue une importante source de nourriture pour au moins quelques prédateurs et qui connaît une forte mortalité par prédation. De nombreuses espèces marines connaissent une forte mortalité par prédation à certaines étapes de leur cycle biologique, mais dans le contexte de la pêche des espèces fourragères, un aspect crucial est le fait que l’espèce sera entièrement recrutée à la pêche à des âges qui connaissent encore une forte mortalité due à la prédation.

Remarque : Les espèces fourragères présentent souvent d’autres caractéristiques biologiques, par exemple : elles connaissent de grandes fluctuations naturelles de l’abondance en réponse à des facteurs environnementaux; les fluctuations de l’abondance se situent à des échelles temporelles comparables à la durée d’une génération ou plus courtes; les espèces fourragères forment des bancs denses pendant au moins une partie du cycle annuel; elles ont une durée de vie relativement courte, quelques semaines à quelques années; elles présentent une répartition côtière pendant au moins une partie du cycle annuel. Il est important de noter que ces caractéristiques peuvent apparaître séparément ou combinées chez des espèces que l’on ne considère pas habituellement comme des espèces fourragères, et que certaines espèces fourragères peuvent n’en présenter aucune.

Un prédateur dépendant est une espèce située plus haut dans une chaîne alimentaire aquatique, qui tire une partie importante de sa ration alimentaire annuelle de l’espèce fourragère, au moins pendant les périodes où l’espèce fourragère est abondante. Lorsque l’espèce fourragère connaît une baisse marquée de l’abondance (due à des causes naturelles ou à la surexploitation), le prédateur dépendant présentera vraisemblablement des réactions biologiques comme : changements importants dans l’alimentation, qui souvent (mais pas toujours) ne réussiront pas à compenser totalement la perte de disponibilité de l’espèce fourragère; réduction du taux de croissance ou du coefficient de condition; baisse du succès de reproduction ou retard de la maturation; changements dans les modes normaux de distribution saisonnière.

Remarque : Les prédateurs dépendants ont souvent plus de visibilité que l’espèce fourragère elle-même, par exemple certaines espèces d’oiseaux de mer et de mammifères marins. Ces espèces peuvent aussi connaître dans leur cycle annuel des aspects de vie terrestre (souvent, mais pas toujours, la reproduction), de sorte que leur dépendance à l’égard de l’espèce fourragère peut avoir une composante géographique aussi bien que démographique.

L’état d’une espèce ou d’un stock, qu’il s’agisse de la cible d’une pêche ou d’une espèce écologiquement liée, doit s’interpréter de façon large. Les attributs classiques, la biomasse des géniteurs, le taux d’exploitation, etc. sont des composantes de l’état des stocks, mais d’autres facteurs comme la composition par âge, le taux de croissance, le succès de reproduction, etc., peuvent aussi être des indicateurs importants de l’état de la ressource.

4. Buts et objectifs généraux

Les objectifs d’une politique sur la pêche des espèces fourragères, axés sur la conservation, comprennent :

Il s’agit là d’objectifs et non pas d’options que l’on pourrait laisser de côté dans certains cas. La pêche d’une espèce fourragère doit être conçue de façon à s’assurer, avec un haut niveau de probabilité, que ces cinq objectifs seront atteints. Par ailleurs, si la probabilité d’atteindre les objectifs est forte, on peut mettre en place une pêche économiquement viable et réglementée efficacement de l’espèce fourragère. De même, si la pêche est menée d’une façon qui maximise l’accumulation de savoir en même temps que les opérations avancent, cela accroît la capacité de déterminer la possibilité d’atteindre les autres objectifs.

5. Principes, justifications et incidences

Un certain nombre de principes d’écologie et de gestion des pêches constituent un cadre sur lequel peut s’appuyer une politique sur la pêche des espèces fourragères. La justification des principes et leur importance pour le cadre global apparaît lorsque l’on analyse explicitement les incidences. Ces principes, avec leurs incidences, comprennent :

5.1 – L’exploitation d’un stock doit tenir compte à la fois de la productivité du stock et de son rôle trophique dans l’écosystème. La pêche d’une espèce fourragère n’a ceci de particulier que l’importance qui est accordée au rôle trophique.

Traditionnellement, les pêches commerciales sont axées sur les stocks dont la productivité naturelle est forte et sur les espèces situées haut dans la chaîne alimentaire. Toutefois, même des stocks à faible productivité peuvent faire l’objet d’une exploitation soigneusement réglementée, et le seul fait qu’une espèce soit en position trophique basse ne constitue pas une justification a priori pour interdire l’exploitation.

5.2 – L’effectif des classes annuelles d’une espèce fourragère (et d’autres espèces) connaît souvent de grandes variations, et la taille des classes annuelles est souvent corrélée sur plusieurs années. Dans un tel cas, un taux fixe d’exploitation ne permet pas de garantir qu’une biomasse adéquate de géniteurs sera toujours protégée.

Le seul recours à un taux d’exploitation fixe est souvent insuffisant comme stratégie de gestion pour assurer la conservation des espèces dont les classes annuelles sont très variables. Il est aussi vraisemblablement nécessaire d’établir comme stratégie de gestion le maintien d’une biomasse minimale de géniteurs. Si on observe une série de mauvaises classes annuelles, c’est que des stocks bien gérés peuvent à l’occasion descendre au-dessous de ces minimums et que toutes les pêches devraient être fermées.

5.3 – Lorsque l’on a recours à la biomasse pour fixer des cibles et des points de référence pour les stocks d’espèces fourragères, on doit s’assurer à la fois que le recrutement futur de l’espèce cible n’est pas en danger et que l’approvisionnement en nourriture des prédateurs marins étroitement liés ou écologiquement dépendants n’est pas affaibli.

Les graphiques stock-recrutement des espèces fourragères (et d’autres) donnent souvent peu d’indication de relations fonctionnelles claires. Toutefois, lorsque l’on dispose de données sur le stock et le recrutement (ou des substituts), il faut les analyser pour estimer à la fois la biomasse à laquelle la probabilité de recrutement médiocre s’accroît et la biomasse à laquelle la probabilité de bon recrutement baisse. La contribution de la biomasse de géniteurs aux points de référence biologiques doit se situer au-dessus de ces deux estimations, lorsque l’on peut les établir.

Les besoins alimentaires des prédateurs doivent être estimés directement, à l’aide de la meilleure information disponible sur la taille des populations de prédateurs, leurs exigences en nourriture et en énergie ainsi que la contribution de l’espèce fourragère à leur régime alimentaire. Des modèles écosystémiques complexes ne doivent servir à établir des estimations indirectes de la consommation que lorsqu’ils ont fait la preuve qu’ils pouvaient estimer les exigences de la consommation d’une façon plus fiable que les calculs directs.

Les points de référence biologiques servant pour la gestion doivent dépasser la somme des estimations de la composante frai et de la composante alimentation. On pourra souvent avoir recours à des points de référence biologiques pour les attributs de l’espèce fourragère en plus de la biomasse mature et du taux d’exploitation (voir 5.4), et il faudrait aussi tenir compte des besoins des prédateurs ainsi que de ceux de l’espèce fourragère elle-même.

5.4 – Conformément à l’approche de précaution, l’exploitation des espèces fourragères doit garantir qu’il existe une forte probabilité de respect des points de référence et que des règles préalables de contrôle de l’exploitation permettront de réduire de façon rapide et efficace la pêche (notamment par la fermeture) lorsque le risque de voir un stock tomber au-dessous d’un point de référence est trop élevé.

L’approche de précaution convient particulièrement aux espèces fourragères, et ce, pour diverses raisons. Il existe vraisemblablement une forte incertitude dans les estimations de nombreux paramètres démographiques, comme la taille de la population de l’espèce fourragère, son taux d’exploitation et les besoins alimentaires des prédateurs. Il existe aussi vraisemblablement une forte incertitude qui concerne les relations fonctionnelles importantes, comme la dépendance du recrutement à l’égard du stock local de géniteurs (aussi bien pour le stock dans son ensemble que pour les sous-unités géographiques) et la réaction de la dynamique trophique à des changements dans l’abondance des populations de prédateurs et de proies. L’effondrement d’une espèce fourragère aura aussi probablement des conséquences de grande ampleur et difficiles à renverser.

5.5 – Des points de référence peuvent aussi être fixés pour des propriétés comme le taux de croissance, le coefficient de condition ou le succès reproductif des prédateurs écologiquement dépendants marins, notamment lorsque ces facteurs peuvent être suivis avec un degré d’exactitude et de précision comparable ou meilleur à celui de la biomasse, du taux d’exploitation et d’autres propriétés de l’espèce fourragère elle-même.

La gestion doit garantir que la probabilité du respect de ces points de référence et l’efficacité des règles de contrôle de l’exploitation fondées sur ces points sont comparables à celles de l’espèce cible. Les points de référence et les règles de contrôle fondés sur des espèces écologiquement liées doivent reconnaître également la variabilité naturelle de ces espèces ainsi que les nombreux facteurs qui peuvent les affecter.

5.6 – La gestion d’une espèce fourragère doit garantir qu’il n’y aura pas d’appauvrissement local de certaines composantes de la population et que les points de référence établis pour l’ensemble du stock seront respectés.

Étant donné que certains prédateurs marins écologiquement dépendants peuvent présenter une mobilité restreinte pendant au moins certaines parties de l’année, leur bien-être peut dépendre de l’abondance locale de l’espèce fourragère, plutôt que de l’abondance à l’échelle du stock. De la même façon, si un niveau d’exploitation qui était durable pour l’ensemble du stock a été appliqué dans une zone géographiquement restreinte, l’affaiblissement local de l’espèce fourragère peut se traduire par une pénurie de nourriture chez les prédateurs dépendants marins. Les approches de gestion doivent aborder directement ce risque.

5.7 – La capacité d’exploitation ne doit pas être autorisée à croître d’une façon qui serait difficile à renverser pendant les périodes où une espèce fourragère est plus abondante que dans des conditions correspondant à la moyenne à long terme.

Comme on l’a vu à 5.2, de nombreuses espèces fourragères connaissent occasionnellement des périodes de forte productivité naturelle et peuvent alors atteindre des biomasses élevées. Même en l’absence d’exploitation, ces fortes biomasses ont peu de chances de se maintenir à long terme et les baisses peuvent être brutales et rapides. Une industrie de la pêche économiquement autonome devrait être capable de réagir aux baisses en s’imposant de façon immédiate une forte réduction de l’exploitation. De la même façon, la flottille ne devrait pas être de taille à nécessiter une exploitation pendant les périodes de forte abondance pour demeurer économiquement viable, même si cela signifie qu’il faut renoncer à une certaine possibilité de capture pendant les périodes de forte abondance.

L’opposition à des propositions de pêche d’espèces fourragères s’est toutefois appuyée non sur la proposition elle-même, mais sur la crainte qu’une pêche limitée au départ ne soit autorisée à s’accroître avec le temps au point de risquer de causer des pénuries de nourriture pour les prédateurs dépendants. La pêche des espèces fourragères doit se fonder sur des plans à long terme qui visent explicitement la conservation des ressources et le développement durable de la pêche pendant toute leur période de validité.

5.8 – Dans les cas où des espèces fourragères ont alimenté à travers l’histoire des pêches autochtones à des fins alimentaires, sociales et cérémonielles, on doit pleinement tenir compte de ces utilisations dans toute analyse de possibilités de pêche commerciale nouvelles ou élargies et la gestion de ces pêches.

Lorsque les prises doivent être réduites afin de s’assurer que le rôle de l’espèce fourragère dans l’écosystème ne soit pas compromis, les pêches autochtones traditionnelles ont priorité. Elles ne seront retranchées ou interdites que si la conservation de l’espèce en question est menacée et seulement lorsque, même après la fermeture de toutes les autres pêches commerciales visant le stock, la conservation pose encore problème.

5.9 – Pour assurer la conservation des prédateurs dépendants marins et d’autres espèces associées à l’espèce fourragère, il est nécessaire de surveiller leur situation, tout comme celle de l’espèce fourragère elle-même.

De deux points de vue, la surveillance directe de composantes choisies de l’écosystème est essentielle si l’on veut évaluer les effets de la pêche de l’espèce fourragère sur le plan de la conservation à l’échelle de l’écosystème. De nombreuses espèces fourragères sont présentes sous forme d’agrégations denses pendant au moins une partie de chaque année, de sorte qu’une pêche efficace peut maintenir un niveau élevé de capture même si l’abondance relative de l’espèce est faible. On ne dispose peut-être pas d’autres indices fiables de l’état du stock, étant donné qu’une espèce à distribution spatialement irrégulière peut être difficile à quantifier avec précision. En conséquence, les changements dans la situation des prédateurs dépendants marins peuvent être l’un des premiers signes fiables d’alerte indiquant que l’abondance de l’espèce fourragère est en baisse, au moins à l’échelle locale. D’un autre côté, l’abondance des prédateurs dépendants et associés peut changer pour diverses raisons, notamment, mais pas uniquement, à cause de la disponibilité de l’espèce fourragère. C’est seulement par une surveillance directe efficace que l’on peut déterminer si un changement dans la situation du prédateur dépendant marin est une conséquence d’un changement dans la situation de l’espèce fourragère et nécessite donc des modifications du régime d’exploitation. Lorsque l’abondance ou le succès de la reproduction des prédateurs dépendants marins diminue et que les causes sont nettement incertaines, l’approche de précaution justifierait l’application de restrictions sur la pêche commerciale d’espèces fourragères, au moins jusqu’à ce que le déclin soit freiné ou que les causes soient établies.

5.10 – L’industrie de la pêche doit jouer un rôle responsable en partageant les coûts et en participant à la surveillance des propriétés de l’écosystème qui servent de points de référence ou qui, d’une façon ou d’une autre, déclenchent la mise en œuvre de règles de contrôle de l’exploitation.

L’exploitation d’une espèce fourragère a toujours le potentiel d’accroître le risque pour les prédateurs dépendants, du fait qu’elle accroît la possibilité de réduction de l’abondance ou de la disponibilité de l’espèce fourragère à un moment où les prédateurs dépendants ont déjà de la difficulté à trouver des sources de nourriture adéquates. Étant donné que l’accroissement du risque est une conséquence de l’exploitation, le coût de gestion du risque doit être partagé avec l’industrie. Les responsabilités spécifiques liées à ce rôle doivent être précisées pour toutes les parties dès le début du développement de la pêche d’une espèce fourragère.

6. Politique

De façon générale, la pêche des espèces fourragères sera autorisée dans les stocks canadiens, mais seulement lorsque l’on peut, de façon raisonnable, prévoir que les cinq objectifs de la section 4 seront atteints. Lorsqu’il s’agira d’une pêche nouvelle au Canada, elle devra être développée conformément à la Politique sur les nouvelles pêches, tout en respectant les préalables additionnels énoncés dans la section 6.1 ci-dessous. Dans le cas des pêches d’espèces fourragères déjà établies et durables, dont la conservation de la ressource est bien assurée, elles peuvent se poursuivre dans le cadre des approches de gestion actuelles. Toutefois, les propositions de modification des taux d’exploitation, des engins, des saisons ou d’autres attributs des pêches qui pourraient nuire à la conservation de l’espèce fourragère ou des espèces qui s’en nourrissent doivent être évaluées en fonction des préalables ci-dessous.

Pour démontrer que l’on peut « raisonnablement s’attendre » à atteindre les objectifs de la conservation, de l’aspect social et de l’aspect économique, il faut respecter plusieurs conditions. Certains préalables sont d’ordre biologique, d’autres s’appliquent à un système de gestion. Dans certains cas, l’information est insuffisante pour permettre d’évaluer une espèce fourragère ou son exploitation en fonction d’un ou de plusieurs des critères. De telles situations n’interdisent cependant pas automatiquement d’entamer une pêche à petite échelle, conformément aux dispositions de la Politique sur les nouvelles pêches. Toutefois, elles nécessitent un degré encore plus élevé de prudence et un effort particulier pour accroître la collecte d’information sur l’espèce et sur les effets de la pêche.

Même si la pêche proposée d’une espèce fourragère a vraisemblablement un caractère durable et compatible avec la conservation de l’écosystème sur tous les critères pour lesquels on dispose d’information, l’approbation n’est pas garantie. En particulier, si on relève des incertitudes exceptionnelles dans certaines des évaluations ou si les conséquences du non-respect de l’objectif de conservation de l’espèce fourragère sont graves, la décision correcte peut être de ne pas autoriser des pêches dirigées.

6.1 Préalables biologiques pour les pêches commerciales

6.1.1. Il doit être possible d’établir certaines mesures de la situation de l’espèce fourragère de façon régulière et de se servir des résultats de ces mesures pour juger de l’atteinte de l’objectif de conservation.

Voici quelques exemples de telles mesures :
Composition par âge – mesurée relativement à un état de non-exploitation ou à la composition par âge à un moment où l’exploitation était jugée durable et où la conservation du stock était assurée.
Biomasse mature – mesurée relativement au pourcentage de réduction de la biomasse inexploitée (si elle est connue) ou à l’abondance moyenne historique pendant une période où la conservation du stock était assurée.
Dans tous les cas, la pêche ne doit pas occasionner des fluctuations des populations (ou des caractéristiques biologiques) de l’espèce fourragère ou de ses prédateurs qui dépassent la fourchette normale de variabilité des populations. Toutefois, dans de nombreux cas, on ne connaît pas les limites de la variabilité naturelle, tout au moins au début de l’exploitation.

6.1.2 Il doit être possible d’identifier certaines espèces de prédateurs qui permettraient d’évaluer de façon adéquate le caractère durable de la pêche dans le contexte des espèces écologiquement associées.

De nombreuses espèces peuvent être affectées par les fluctuations de l’abondance d’une espèce fourragère, mais ce sont celles qui sont les plus sensibles à l’abondance de l’espèce fourragère qui conviennent le mieux pour évaluer le caractère écologiquement durable de la pêche. Les espèces sensibles sont celles qui présentent des exigences alimentaires relativement élevées, dont l’espèce fourragère compose une bonne partie de l’alimentation, et qui ont relativement plus de difficulté à changer de proie ou à trouver une nourriture adéquate quand l’espèce fourragère n’est pas abondante. Ce dernier trait est souvent présent lorsque s’exercent des contraintes sur la période et la distance de la recherche de nourriture. Les espèces prédatrices les plus appropriées seraient aussi celles pour lesquelles il serait possible d’obtenir des estimations précises de l’abondance, du succès de reproduction, du taux de croissance ou d’autres mesures similaires du bien-être. L’hypothèse est alors la suivante : si la pêche d’une espèce fourragère est gérée de façon à assurer la conservation des espèces très sensibles qui lui sont écologiquement associées, la conservation des espèces moins sensibles est encore moins susceptible d’être mise en danger par la pêche.

6.1.3 Il doit être possible d’estimer le risque que le niveau proposé d’exploitation pose pour l’espèce fourragère et les espèces qui en dépendent écologiquement.

Idéalement, on utilise les méthodes officielles de quantification du risque, mais souvent ce n’est pas possible. Il faudra maintes fois avoir recours à des modèles simples, dont les paramètres proviennent d’espèces et de situations similaires, pour évaluer si l’ampleur proposée de l’exploitation est susceptible d’accroître le risque pour l’espèce fourragère ou les prédateurs dépendants. Il n’est pas nécessaire dans tous les cas de calculer les valeurs absolues de la taille des populations, de la quantité consommée, etc. Dans certaines situations, il est possible d’utiliser des mesures relatives ou des estimations biaisées dans le sens de la conservation (p. ex., des valeurs dont on sait qu’elles sous-estiment la taille réelle de la population fourragère ou qu’elles surestiment les besoins réels en nourriture des prédateurs) pour évaluer si une pêche proposée accroîtra vraisemblablement les risques. Dans les applications où on ne peut avoir qu’une idée approximative du risque, l’incertitude au sujet de l’importance du risque et l’ampleur des conséquences seront vraisemblablement très élevées. Dans de telles situations, la conservation exigera souvent que l’on prenne des décisions très axées sur la réduction des risques.

6.1.4 Il faut posséder des connaissances suffisantes sur l’espèce fourragère et sa relation avec ses principaux prédateurs pour guider adéquatement les opérations de pêche dans l’espace et dans le temps.

Il faut pour cela connaître à la fois la distribution et le degré d’agrégation de l’espèce fourragère (et leurs modifications saisonnières, le cas échéant) ainsi que les distributions saisonnières et spatiales des prédateurs dépendants marins, de même que leurs besoins.

6.2 Préalables pour la gestion

6.2.1 Conformément à l’approche de précaution, il faut établir clairement des points de référence de conservation (limites) et des règles connexes d’exploitation correspondant à des propriétés mesurables, à la fois de l’espèce fourragère (voir 6.1.1) et de certains prédateurs dépendants marins (voir 6.1.2). Les points de référence limites doivent garantir que la pêche ne réduit pas l’espèce fourragère à un niveau où sa productivité ou la productivité des prédateurs qui en dépendent seraient réduites.

Les points de référence limites ne doivent pas nécessairement être des valeurs absolues de la biomasse ou de la mortalité, mais doivent avoir une base biologique. Les valeurs doivent être explicites et établies de concert par le MPO et l’industrie, avant le début de chaque pêche. Une fois établies, ces valeurs devraient demeurer stables jusqu’à ce que de nouvelles connaissances justifient de modifier soit le point de référence, soit la propriété biologique (p. ex., passer de l’âge maximum dans les captures à un minimum de la biomasse de géniteurs). De tels changements sont rarement apportés dans les pêches bien établies, mais le sont plus souvent dans les pêches nouvelles et en développement.

6.2.2 Pour que les points de référence et les règles de contrôle de l’exploitation puissent garantir que l’objectif de conservation est atteint, la surveillance et l’application des règlements exercées dans la pêche doivent être adéquates pour garantir un niveau élevé de respect du plan de gestion, d’une manière qui puisse être constatée.

Il sera nécessaire d’établir ou de maintenir des programmes de surveillance visant à la fois l’espèce fourragère et les prédateurs dépendants marins choisis (voir 6.1.2). Les résultats produits par les programmes doivent présenter suffisamment d’exactitude et de précision pour permettre d’évaluer la situation des populations par rapport aux points de référence avec une fréquence adaptée au cycle biologique de l’espèce surveillée et au mode de fonctionnement des pêches. Étant donné que les pêches commerciales des espèces fourragères ont le potentiel de mettre en péril la conservation de nombreuses composantes de l’écosystème, un grand nombre d’intervenants seront légitimement intéressés à la conception, à la réalisation et à l’évaluation des programmes de surveillance.

6.2.3 Les coûts d’administration et de gestion de ces pêches seront probablement élevés, car il est nécessaire que soient respectées les dispositions des plans de gestion d’une façon rigoureuse et visible, et qu’il faut exercer une surveillance étendue et fiable de l’espèce fourragère, et souvent de certains de ses prédateurs. L’industrie doit prendre la responsabilité d’assumer une part équitable des coûts croissants de cette gestion.

6.2.4 Les plans de gestion de la pêche des espèces fourragères doivent comporter des dispositions explicites visant à garantir que les pêches ne causent pas indûment des affaiblissements localisés de l’espèce fourragère pendant une durée assez longue pour avoir des conséquences sur les prédateurs.

Bien souvent, l’information sera insuffisante pour permettre de fixer des valeurs précises de ce qui constitue un affaiblissement localisé inacceptable d’une espèce fourragère. Les dispositions des plans de gestion doivent être généreuses à cet égard, et la surveillance des espèces écologiquement associées doit permettre d’évaluer si possible les impacts spatiaux.

6.2.5 La limitation des prises accessoires et des impacts sur les habitats devront souvent devenir des composantes importantes des plans de gestion des espèces fourragères.

Bon nombre des espèces fourragères sont de petite taille et, en conséquence, attirent souvent de nombreux prédateurs. Cela signifie qu’il faudra pour les capturer utiliser des engins à petit maillage, dans des endroits où peuvent être présents des individus de nombreuses autres espèces qui se nourrissent de l’espèce fourragère. Dans de telles conditions, il existe un potentiel de fortes prises accessoires, qui sont parfois des petits individus d’espèces de prédateurs commercialement importants (p. ex., morue, sébaste) et à d’autres occasions des espèces présentant un fort intérêt social (p. ex., oiseaux de mer, petits cétacés). Les plans d’exploitation doivent comporter des mesures visant à détecter et à gérer les prises accessoires d’espèces non ciblées, qu’elles aient ou non une valeur commerciale. Lorsque l’aire de distribution d’une espèce fourragère se situe près du littoral ou au large, mais près du fond, les plans de gestion doivent aussi veiller à ce que les opérations de pêche ne dégradent pas la qualité de l’habitat.

6.2.6 La gestion de la pêche commerciale des espèces fourragères doit comporter des plans à long terme qui fixent la taille prévue de la flottille et le volume des captures sur plusieurs années, qui précisent les objectifs stratégiques à long terme de la pêche ainsi que des objectifs opérationnels annuels (ou à court terme) dans le cadre desquels s’exercera la pêche, de même que les règles de contrôle de l’exploitation qui guideront et restreindront les opérations.

Les dispositions des plans à long terme doivent être fondées sur la meilleure information scientifique (y compris les sciences économique et sociale, et la connaissance traditionnelle) disponible et être le fruit d’une vaste consultation de tous les intervenants. Des modifications ne seront apportées aux plans à long terme, en dehors de leur cycle pluriannuel de planification et d’examen, que lorsqu’apparaîtront de nouvelles connaissances substantielles sur les effets de la pêche.

Annexe I – Expérience acquise à l’échelle internationale et au canada dans la pêche des espèces fourrragères

Expérience internationale

Certaines espèces fourragères sont exploitées par la pêche depuis de nombreux siècles; on signale des pêches du hareng dans le nord de l’Europe dès le dixième siècle (Hoglund, 1972; Southward et al., 1988; Alheit et Hagen, 1997). Tout au fil de cette histoire, les pêcheries côtières ont connu des périodes de fortes captures sur plusieurs décennies, suivies d’intervalles de plusieurs décennies de prises négligeables (alors que les captures pouvaient être fortes dans d’autres parties de l’Europe du Nord pendant les mêmes périodes).

Les comptes rendus de la pêche à la sardine ne remontent pas aussi loin que ceux des prises de hareng, mais au Japon, on note des périodes de bonnes et de mauvaises prises de sardine qui remontent jusqu’au début du XVIIe siècle (Yasuda et al., 1999). L’histoire de l’abondance de la sardine et de l’anchois, dont témoignent les dépôts d’écailles dans les sédiments du fond marin, a été reconstituée pour une période de plus de 2 000 ans dans certaines zones de la côte pacifique américaine (Baumgartner et al., 1996, 1998).

Toutes ces données sur l’abondance des espèces fourragères révèlent des variations importantes sur des périodes de plusieurs décennies. Ces fluctuations sont difficilement imputables à la pression de pêche, car la technologie employée dans ces pêches de l’ère préindustrielle ne risquait pas d’affaiblir des stocks entiers de poisson ni même des agrégations à caractère local. Dans tous ces cas, et dans d’autres exemples relevés dans le monde entier, on a expliqué les fluctuations des espèces fourragères par des effets environnementaux sur le recrutement, et cette hypothèse continue à faire l’objet de recherches (Lluch-Belda et al., 1989; Ware, 1995; Cochrane et Hutchings, 1995; Alheit et Hagen, 1997; Francis et al., 1998).

Le fait que les fluctuations des espèces fourragères soient fortes, même en cas de faible exploitation, ne signifie pas que les pêches jouent seulement un rôle mineur dans la dynamique des stocks. Il est amplement reconnu que la surpêche peut contribuer de façon importante à l’effondrement des espèces fourragères (Serchuk et al., 1996; Slotte et Johannesson, 1997; Beverton, 1990, 1998). Depuis des décennies, les scientifiques s’interrogent sur la façon d’établir précisément le rôle relatif de l’environnement et de la pêche dans l’effondrement spectaculaire de certains stocks de harengs, d’anchois et de sardines, et il est peu probable que l’on ne puisse jamais vraiment rapprocher les hypothèses contradictoires. Toutefois, il est à peu près incontestable que, dans des conditions où l’environnement est improductif pour une espèce fourragère, une pêche intense peut accélérer le rythme du déclin, accroître l’ampleur de l’effondrement du stock et allonger le délai d’une éventuelle récupération.

La surpêche et les erreurs de gestion ont fait que l’effondrement de certaines espèces fourragères a duré pendant des décennies. Dans le cas de la pêche norvégienne des harengs géniteurs de printemps, à la suite d’une période où la pêche n’était pratiquement pas réglementée, le stock s’est effondré brutalement dans les années 1960 et est resté pendant plus de 30 ans à un niveau inférieur de deux ou trois ordres de grandeur à son abondance antérieure. À la fin des années 1980, toutefois, le stock a commencé à produire une série de fortes classes annuelles et est remonté à plus de 10 millions de tonnes. Dans le cadre d’une stratégie de gestion qui maintenait la mortalité par pêche au-dessous de 0,3, cette hausse se maintient depuis une décennie, même si certains aspects de la distribution saisonnière du stock n’ont pas retrouvé leurs schémas historiques (Bjorndal et al., 1997; Dragesund et al., 1997; ICES, 1999a).

La surpêche a aussi contribué à l’ampleur du déclin, au milieu du XXe siècle, de la sardine de Californie, dont le rétablissement a pris là encore près de trois décennies (Cisneros-Mata et al., 1995; Felix-Uraga et al., 1996; McFarlane et Beamish, 1999).

Bien que la surpêche puisse influencer et intensifier l’effondrement des stocks d’espèces fourragères, ces effondrements ne sont pas inévitables. Une réduction rapide de l’intensité et du régime d’exploitation peut faire beaucoup pour empêcher des stocks productifs de s’effondrer, comme on l’a vu dans le cas du hareng de la mer du Nord (ICES, 1999b). Dans les années 1970, la surpêche et la faible productivité ont causé l’effondrement de la biomasse adulte, puis le rétablissement a été lent et a nécessité la fermeture de la pêche dirigée pendant quatre ans. Dans les années 1990, la mortalité par pêche a recommencé à monter, du fait que plusieurs classes annuelles au-dessus de la moyenne ont commencé à entrer dans la phase exploitable. Dans ce cas, des réductions rapides de l’exploitation totale et un changement dans la composition par âge des captures ont permis au stock de retrouver sa taille caractéristique en deux ans seulement, malgré un recrutement seulement moyen.

Les effondrements de ces stocks de poissons fourragères ont causé des difficultés sociales et économiques ainsi qu’un manque à gagner, mais leurs ramifications écologiques pour les prédateurs dépendants peuvent être encore plus importantes. Pour cette raison, un certain nombre d’organismes de conseils scientifiques et de gestion des pêches ont examiné des stratégies de gestion qui seraient adaptées aux stocks d’espèces fourragères. Les meilleures de ces stratégies tiennent compte de la variabilité naturelle des stocks, de la menace que constitue la surpêche pour les stocks lorsqu’ils entrent dans des périodes de productivité réduite et de leur rôle dans l’écosystème (Butterworth et Bergh, 1993; Stephenson, 1996; Butterworth et al., 1997; Cochrane et al., 1998). Deux exemples sont brièvement analysés ci-dessous, le premier présentant une approche appliquée à une situation relativement riche en données, le deuxième correspondant à un système beaucoup plus pauvre en données.

Pêche du lançon en mer du Nord : Une pêche industrielle visant des espèces pélagiques mélangées, mais particulièrement le lançon (Ammodytes) a commencé en mer du Nord dans les années 1950. Les prises de lançons ont monté lentement pour atteindre environ 100 000 tonnes vers 1960, puis ont recommencé à grimper rapidement au début des années 1970 pour se tenir entre 500 000 et 800 000 tonnes. La productivité du lançon est demeurée élevée tout au long de la période, et les prises des dernières années de la décennie 1990 se situaient entre 830 000 et 1 139 000 tonnes. Pendant la période, la mortalité par pêche était en moyenne de 0,57, avec une légère baisse ces dernières années à cause d’une hausse du recrutement. Même si ces prélèvements et cette mortalité par pêche semblent élevés, la mortalité par prédation est beaucoup plus forte sur les âges 0, 1 et 2, et d’une ampleur comparable chez les poissons plus âgés. On estime que la biomasse totale de lançons consommés annuellement par les principaux prédateurs en mer du Nord est près de trois fois plus grande que la biomasse prélevée par les pêches (ICES, 1997, 1999c,d; Furness, 1998).

Même si dans l’ensemble la pêche du lançon respecte les critères de développement durable, la distribution des prises dans la mer du Nord ne correspond pas exactement à celle des lançons. L’intensité localisée des captures dans les zones proches du littoral a suscité des inquiétudes quant aux impacts possibles de la pêche du lançon sur le succès de reproduction des oiseaux de mer, à cause d’un affaiblissement des concentrations de lançons où s’approvisionnent les oiseaux de mer pour nourrir leurs petits. En réponse à une demande d’avis de la Commission européenne sur ce sujet, un groupe d’étude du CIEM a examiné l’information sur le succès de reproduction des oiseaux de mer, les pêches du lançon et leurs interactions, et a formulé des avis sur la gestion de la pêche du lançon qui tiennent compte explicitement des besoins alimentaires des oiseaux de mer (ICES, 1999c).

Pour résumer, le CIEM conclut que de toute évidence la pêche du lançon a eu un effet sur le succès de reproduction des oiseaux de mer pendant au moins une année. Le groupe d’étude a défini les critères qui ont amené au choix de la mouette tridactyle (Rissa tridactyla) comme indicateur secondaire sensible de la disponibilité locale des lançons pour les prédateurs terrestres. Le groupe a recommandé de surveiller chaque année le succès de reproduction de cette mouette et de fermer la pêche du lançon dans des zones côtières précises si le succès de reproduction tombait au-dessous de 0,5 petit par nid bien construit (valeur fondée sur des simulations de la dynamique de la population de mouettes tridactyles) pendant trois années consécutives. Le quota lui-même ne serait pas réduit, mais la distribution spatiale des prises serait soumise à des contraintes jusqu’à ce que le succès de reproduction dépasse 0,7 petit par nid bien construit.

Pêche du krill dans l’Antarctique : Il existe dans le monde un certain nombre de pêcheries de krill, qui visent au moins six espèces différentes d’euphausiacés, groupe de petits invertébrés marins (quelques cm, selon l’espèce). Bien que l’on pêche le krill depuis au moins un siècle, son exploitation intensive a commencé seulement dans les années 1950, et toutes les pêches opèrent nettement en-dessous de leur potentiel maximum (Nicol et Endo, 1997). Le krill joue un rôle écologique central dans de nombreux écosystèmes marins (Everson, 1977; Mackas et Fulton, 1989; Nicol et de la Mare, 1993; Pitcher et Chuenpagdee, 1995), car il constitue la première source de nourriture pour des oiseaux de mer, des mammifères marins et de nombreux poissons prédateurs. On connaissait très mal la dynamique de ces populations dans l’Antarctique, pas plus que leurs liens avec le krill, quand la pêche du krill dans l’Antarctique a commencé à prendre de l’expansion.

La pêche du krill dans l’Antarctique, qui a démarré avec lenteur dans les années 1960, s’est développée régulièrement du début des années 1970 au début des années 1980, pour dépasser 500 000 tonnes en 1982 (Everson et Goss, 1991; Miller et Agnew, 1996; Agnew, 1997). Ce prélèvement ne représentait qu’une petite fraction de la production totale d’euphausiacés des eaux antarctiques, mais son impact possible sur les prédateurs dépendants a suscité de graves préoccupations (Nicol, 1991; Croxall et al., 1992), surtout à cause de la forte variabilité du krill à plusieurs échelles spatiotemporelles (Murphy et al., 1998). De ces préoccupations est née la Convention sur la conservation de la faune et de la flore marines de l’Antarctique (Edwards et Heap, 1981), qui est entrée en vigueur en 1982. La CCAMLR a trois grands objectifs qui visent directement l’importance des espèces proies, notamment le krill, pour les prédateurs. Ces objectifs sont les suivants :

La CCAMLR a suscité d’importantes recherches scientifiques sur l’écosystème marin antarctique, mais a aussi eu un impact majeur sur la gestion de la pêche du krill. Les premières mesures ont été des activités fondamentales de gestion de la pêche, notamment des exigences de fiabilité dans les déclarations des captures. Par ailleurs, un programme de surveillance de l’écosystème a également été élaboré sur plusieurs années et mis en œuvre intégralement en 1987. Le programme prévoit la surveillance d’un certain nombre de caractéristiques de l’écosystème comme les populations de prédateurs et de proies, des indicateurs de leur bien-être et des attributs environnementaux. Ces programmes de collecte des données sont étroitement liés aux activités de modélisation et d’analyse. L’objectif d’un programme de surveillance est de détecter des changements dans les indicateurs et dans les espèces associées, de déterminer si ces changements sont dus à l’impact de la pêche du krill et de modifier les règles de la gestion, au besoin, pour contrer les effets indésirables de la pêche (Agnew, 1997).

Les participants considèrent que l’approche de la CCAMLR dans la gestion de la pêche du krill a donné des résultats très positifs, sans avoir d’effets majeurs sur les espèces associées (Agnew, 1997; Nicol et Endo, 1997). La gestion a recours à des limites de précaution qui déclenchent des mesures de gestion plus restrictives. Ces limites sont notamment des estimations de la biomasse totale du krill, la mortalité naturelle, y compris la mortalité due à la consommation par les prédateurs, la croissance et la variation du recrutement. Les captures se sont en général maintenues au-dessous de 200 000 tonnes, bien que les zones de pêche aient changé plusieurs fois, ce qui correspond probablement à des changements géopolitiques plus qu’à des changements écosystémiques.

Expérience canadienne

Certaines espèces fourragères, comme le hareng, sont pêchées au Canada depuis des siècles. La pêche d’autres espèces comme le capelan et les crevettes du genre Pandalus n’ont atteint leur pleine échelle commerciale que depuis quelques décennies. De plus, les Autochtones exploitent l’eulakane depuis plusieurs siècles. On note plusieurs petites pêches commerciales des euphausiacés sur la côte du Pacifique ainsi que, pendant une brève période, une pêche expérimentale dans le golfe du Saint-Laurent.

La prospérité des pêcheries de hareng à Terre-Neuve et dans les Maritimes remonte au moins jusqu’au XVIIIe siècle (Templeman, 1966; Stobo et al., 1982). Les débarquements de tous les stocks ont fortement varié avec le temps, ce qui correspondait à des changements dans la disponibilité, le succès d’autres pêches et les marchés. On a noté certains événements exceptionnels dans les pêches du hareng de l’Atlantique, notamment une période de quatre ans pendant laquelle les captures ont atteint 300 000 tonnes, alors qu’elles se maintenaient généralement entre 20 000 et 40 000 tonnes, au moment où ont été découvertes de nouvelles concentrations d’hivernage. Bien que les fortes classes annuelles soient sporadiques dans tous les stocks, aucun des stocks de harengs de l’Atlantique n’est considéré comme ayant subi des effondrements importants et durables ni des périodes de mortalité par pêche excessive et soutenue (DFO, 1999a-d). Bien que l’intérêt se soit tourné vers une gestion à des échelles géographiques beaucoup plus fines, particulièrement dans les années 1990 (CSAS, 1997), aucune étude n’a fait ressortir que les pêches canadiennes du hareng de l’Atlantique aient pu avoir des effets notables sur les prédateurs du hareng.

Dans la pêche commerciale du hareng du Pacifique, l’histoire est bien différente. Les débarquements ont commencé au début du XXe siècle, ont augmenté lentement pour atteindre environ 75 000 tonnes jusqu’aux années 1930, ont baissé à cause des conditions du marché, puis ont augmenté de façon notable à partir du milieu des années 1930 pour atteindre plus de 200 000 tonnes dans les années 1950, afin de satisfaire le nouveau marché de la farine et de l’huile de poisson. Cette pêche minotière ne pouvait pas avoir un caractère durable, et le stock s’est brutalement effondré en 1965. La fermeture de la pêche minotière a été suivie par un rétablissement du stock et la réouverture en 1972 de la pêche du hareng rogué. Les captures étant extrêmement variables, en 1985 a été mis en place un plan global de gestion avec les grandes caractéristiques suivantes : seuil minimal de la biomasse de géniteurs commandant la fermeture de la pêche, et taux modeste et fixe d’exploitation quand les stocks sont au-dessus de la limite. Les quotas sont fixés selon les grandes unités géographiques, tandis que les opérations sont régies à des échelles spatiales beaucoup plus fines. L’établissement d’une limite minimale de la biomasse a causé plusieurs fermetures des pêches à l’échelle régionale, en réponse à la faiblesse du recrutement, mais les fermetures ont été de courte durée et les stocks ne sont pas tombés au-dessous de leurs plages historiques de variations (Stocker, 1993; Schweigert, 1997; DFO, 1999e-i). Malgré les craintes du public de voir la pêche du hareng rogué affecter d’autres prédateurs, notamment les saumons du Pacifique, aucune étude n’a révélé que les stratégies actuelles d’exploitation auraient un effet sur la disponibilité de la nourriture pour les autres prédateurs.

Jusqu’en 1972, les captures de capelan étaient faibles dans les eaux de Terre-Neuve et du Labrador, et limitées à des prises côtières effectuées pendant la frai. À partir de 1972 a commencé une forte exploitation hauturière, les captures atteignant un sommet de plus de 360 000 t en 1976. Les prises hauturières ont ensuite rapidement baissé, toutefois, pour se tenir entre 5 000 et 57 000 t jusqu’en 1992, date de fermeture de la pêche hauturière. Une pêche côtière des femelles roguées s’est développée dans les années 1980, mais les prises se sont toujours maintenues au-dessous de 36 000 t et ont même baissé ces dernières années (DFO, 1997). Les estimations de l’état de la ressource montraient une grande incertitude, mais l’abondance était fortement régie par les facteurs environnementaux qui affectent le recrutement (Carscadden et Nakashima, 1997). Des craintes ont souvent été formulées, tant par le public que parmi les scientifiques (p. ex., Brown et Nettleship, 1984) au sujet de l’exploitation commerciale du capelan à cause de son rôle comme espèce fourragère. Toutefois, depuis la fin des années 1970, les TAC ont été fixés à un maximum de 10 % des estimations prudentes de la biomasse mature et, plusieurs fois, les médiocres conditions du marché ont fait que les TAC annuels ont été encore plus bas. En fait, on a estimé que les prises réalisées dans les années 1980 étaient inférieures à 5 % de la biomasse mature (Shelton et al., 1992). À un tel taux d’exploitation, il ne semble pas que les captures puissent limiter la disponibilité de la nourriture pour les prédateurs (CSAS, 1997).

On pêche aussi un peu le capelan dans le golfe du Saint-Laurent, mais les taux d’exploitation semblent là aussi très faibles. Ces dernières années, les captures ne dépassaient pas 10 000 t, alors que l’on estime à plus de un million de tonnes par an la quantité de capelans consommés par les prédateurs dans le golfe du Saint-Laurent.

Les autres importantes espèces fourragères pêchées au Canada sont les crevettes. Sur la côte atlantique, la pêche exploite principalement Pandalus borealis, tandis que celle du Pacifique vise plusieurs espèces, appartenant en général au genre Pandalus. Dans les eaux de Terre-Neuve et du Labrador, l’exploitation a commencé dans les années 1970, les prises ne dépassant pas 5 000 t jusqu’au milieu des années 1980. Les prises et le domaine de pêche ont rapidement augmenté par la suite, particulièrement dans la deuxième partie des années 1990, les captures dépassant 70 000 t en 1998. Toutefois, des évaluations montrent que l’abondance du stock est en croissance, et de nouveaux relevés ont révélé la présence de concentrations jusque-là inconnues, de sorte que le taux d’exploitation du stock a peut-être en fait baissé pendant la période d’expansion rapide des captures (Parsons et al., 1999). On n’a pas estimé la consommation des crevettes par les prédateurs, mais la biomasse demeurant après la pêche est de l’ordre de plusieurs centaines de milliers de tonnes. Dans le golfe du Saint-Laurent et sur la plateforme Néo-Écossaise, les captures ont aussi augmenté ces dernières années, mais elles restent nettement plus basses que celles des eaux de Terre-Neuve et du Labrador. Il semble aussi que les stocks seraient en augmentation dans ces régions, de sorte que le taux d’exploitation est demeuré stable ou a baissé malgré la récente augmentation des captures (Koeller et al., 1998; Lambert et al., 1998). Les chercheurs continuent à tenter d’expliquer la hausse marquée des crevettes dans les eaux de l’Atlantique, mais n’ont pas encore formulé de conclusions.

Sur la côte du Pacifique, la pêche des crevettes n’a pas connu l’explosion observée dans l’Atlantique, malgré la découverte de certaines nouvelles zones de pêche. Dans cette région, on pêche la crevette depuis plus de 100 ans, mais la pêche hauturière n’a commencé qu’en 1973. La gestion se fait par cibles d’échappée plutôt que par un taux fixe d’exploitation seulement, ce qui permet de s’assurer qu’il reste toujours un stock suffisant après l’exploitation. Quand le stock est important, la pêche peut prélever de 25 % à 33 % du stock adulte, prélèvement qui est inférieur à la mortalité naturelle estimée par année chez ces espèces à courte durée de vie. Les captures de crevettes tachetées, relativement stables, ne dépassent pas 2 000 t par an, tandis que les prises des autres crevettes sont plus variables, selon le recrutement, et ont parfois atteint 12 000 t (Boutillier, 1993; Boutillier et al., 1999). Il ne s’agit là que d’une fraction négligeable des estimations des besoins alimentaires totaux des prédateurs (Pauly et al., 1998), bien que l’on ne connaisse pas, pour la plupart des prédateurs, la proportion exacte de crevettes dans cet ensemble.

Le krill (euphausiacés) est aussi pêché sur les deux côtes du Canada. L’exploitation d’Euphausia pacifica a commencé dans le détroit de Georgia dans les années 1970, à titre de programme expérimental. Les débarquements annuels n’ont pas dépassé 200 t jusqu’au milieu des années 1980 et, quand les prises ont augmenté, on a fixé des quotas séparés pour diverses parties du détroit. En 1990, le quota total a été fixé à 500 t, avec des allocations géographiques et des restrictions saisonnières pour limiter les prises accessoires (Haig-Brown, 1994; Mackas, 1998). À cause des difficultés de commercialisation, les prises sont souvent restées loin en-dessous du quota. Au départ, le quota avait été fixé à 3 % d’une estimation grossière de la consommation d’euphausiacés par les prédateurs. Les renseignements sur les besoins des prédateurs se sont nettement enrichis depuis cette estimation, mais le quota a été maintenu même s’il semble que les prédateurs consomment beaucoup plus d’euphausiacés qu’on ne le pensait au départ. L’exploitation est interdite dans les eaux hauturières de la Colombie-Britannique, étant donné les inquiétudes quant aux besoins alimentaires de nombreuses espèces importantes de poissons.

Dans le golfe du Saint-Laurent, des recherches ont été menées sur la faisabilité d’une pêche du krill dans les années 1970, mais l’exploitation commerciale n’a pas suivi. Une deuxième ronde de relevés, menée à la fin des années 1980 et dans les années 1990, a produit des estimations chiffrant la biomasse du krill entre 400 000 et 1 000 000 t, et une pêche exploratoire a été autorisée en 1990 et en 1994. La première faisait l’objet d’un permis de pêche scientifique et la deuxième opérait avec des quotas de 100 t pour le krill et de 50 t pour Calanus. Par la suite, le quota a été fixé à 300 t, ce qui tient compte de l’importance du krill et des copépodes pour de nombreux prédateurs marins, y compris les baleines. Les plans de gestion exigent une couverture totale par des observateurs et comportent d’autres dispositions visant les impacts écologiques possibles des captures (Gendron, 1994; Runge et Joly, 1995; Nicol et Endo, 1997). On note aussi une demande d’exploitation du krill sur la plateforme Néo-Écossaise. Cette demande a fait l’objet d’un examen approfondi, avec notamment la tenue d’un grand atelier concernant l’exploitation du krill sur la plateforme Néo-Écossaise (Head, 1997), mais aucune pêche commerciale n’a encore été autorisée.

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