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Orthoréovirus pisciaire et inflammation des muscles squelettiques et cardiaques (IMSC)

Préface

Pêche et Océans Canada (MPO) a reçu un grand nombre de demandes de renseignements concernant la présence de l’orthoréovirus pisciaire (également appelé réovirus pisciaire) et de l’IMSC sur la côte du Pacifique.

Le gouvernement du Canada possède un Programme national sur la santé des animaux aquatiques (PNSAA) reconnu à l’échelle internationale qui est exécuté par l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) en collaboration avec le MPO en vertu de la Loi sur la santé des animaux de l’ACIA et du Règlement sur la santé des animaux. Dans le cadre du PNSAA, le système de laboratoire du MPO assure la réalisation de diagnostics et la recherche et fournit des avis scientifiques sur les pathogènes de poissons, de mollusques et de crustacés qui doivent être déclarés.

En plus du PNSAA, la Division de la gestion de l’aquaculture du Pacifique du MPO intervient dans la gestion de la santé des poissons par l’intermédiaire de son programme de vérification qui mène des vérifications de la santé des poissons dans une trentaine d’exploitations actives par trimestre. À titre de principal organisme de réglementation de l’aquaculture en Colombie-Britannique, le MPO travaille étroitement avec l’ACIA, l’industrie aquacole et d’autres partenaires afin de déterminer et de gérer les risques potentiels pour la santé des saumons sauvages et d’élevage.

Le MPO participe également à la recherche associée aux autres microbes qui peuvent toucher les salmonidés, mais qui ne sont pas mentionnés dans les lois et règlements. À titre de ministère à vocation scientifique, le MPO s’appuie sur les connaissances scientifiques existantes, mène ses propres recherches et collabore avec d’autres organismes. Certaines de ces recherches sont menées dans le cadre du Programme de recherche sur la réglementation de l’aquaculture (PRRA), un programme du MPO qui appuie la recherche sur les maladies des animaux aquatiques. Par ailleurs, l’initiative stratégique visant la santé du saumon (ISSS), cofinancée par le MPO, la Fondation du saumon du Pacifique et Genome BC, est un consortium international de scientifiques qui mènent des recherches sur les microbes pouvant toucher les saumons sauvages, mis en valeur et d’élevage de la Colombie-Britannique. Le PRRA et l’ISSS fournissent également des données et des renseignements scientifiques relatifs à l’orthoréovirus pisciaire et à l’IMSC chez le saumon en Colombie-Britannique.

Résumé simplifié :

Orthoréovirus pisciaire

Répartition et espèces vulnérables

La présence de l’orthoréovirus pisciaire est connue en Norvège, au Royaume-Uni, en Irlande, au Chili, aux États-Unis et au Canada (Biering et Garseth 2012; Kibenge et al. 2013; Siah et al. 2015). Au Canada, les essais menés sur des échantillons archivés ont démontré la présence de l’orthoréovirus pisciaire chez le saumon sauvage ou d’élevage du Pacifique depuis 1987 et probablement dès 1977. Des études supplémentaires réalisées par divers laboratoires et organismes au Canada et aux États-Unis ont permis d’élargir l’éventail d’hôtes du réovirus pisciaire dans le Pacifique Nord pour y inclure les espèces suivantes : truite fardée (Oncorhynchus clarkii), saumon quinnat (Oncorhynchus tshawytscha), saumon rouge (Oncorhynchus nerka), truite arc-en-ciel (Oncorhynchus mykiss), saumon coho sauvage (Oncorhynchus kisutch), saumon kéta (Oncorhynchus keta), saumon rose (Oncorhynchus gorbusca) et saumon de l’Atlantique d’élevage (Salmo salar) (MPO 2015). Les détections ont été effectuées dans des populations de poissons d’élevage et sauvages qui se sont étendues de l’État de Washington vers le nord jusqu’en Alaska en passant par la Colombie-Britannique (MPO 2015; Marty et al. 2015; Siah et al. 2015, Miller et al. 2017, Morton et al. 2017, Purcell et al. 2017).

Dans les eaux de l’Atlantique Nord, l’orthoréovirus pisciairea touche des salmonidés et des non-salmonidés, des espèces qui comprennent notamment le saumon de l’Atlantique sauvage et d’élevage (Salmo salar), la truite de mer sauvage (Salmo trutta), la grande argentine (Argentina silus), le chinchard (Trachurus trachurus), le hareng de l’Atlantique (Clupea harengus) et le capelan (Mallotus villosus) (Wiik-Nielson et al. 2012; Garseth et al. 2013).

Variabilité génomique

Le séquençage génomique du réovirus pisciaire en Colombie-Britannique a révélé quelques différences génétiques par rapport au réovirus pisciaire présent dans d’autres régions (Kibenge et al. 2013, Siah et al. 2015). Après analyse de ces différences génétiques, les auteurs Kibenge et al. 2013 ont supposé que le réovirus pisciaire était sans doute arrivé en Colombie-Britannique depuis la Norvège aux alentours de 2007. Cependant, des tests récents d’échantillons archivés détenus par le MPO ont révélé que le réovirus pisciaire était présent chez les salmonidés sur la côte du Pacifique de l’Amérique du Nord depuis bien 1987 et probablement dès1977 (Marty et al. 2015; Siah et al. 2015).

IMSC

La maladie IMSC a été signalée pour la première fois chez le saumon de l’Atlantique d’élevage en Norvège en 1999 (Kongtorp et al. 2004a) et a entraîné des pertes de production pour l’exploitation. Depuis, le nombre de cas en Norvège a augmenté régulièrement pour atteindre un pic de 181 foyers de maladie signalés dans les exploitations en 2014. L’IMSC continue d’entraîner une réduction de la survie des poissons en Norvège (Marine Harvest 2015). Une maladie semblable à l’IMSC a également été signalée chez le saumon d’élevage de l’Atlantique en Écosse (Ferguson et al. 2005) et au Chili (Godoy et al. 2016).

L’IMSC se caractérise par une mortalité qui va de négligeable à 20 % et une morbidité (définie comme le pourcentage de poissons présentant des signes de la maladie) qui peut atteindre 100 % dans les populations touchées (Kongtorp et al. 2004a). L’IMSC apparaît souvent cinq à neuf mois après le transfert dans l’eau de mer, à l’occasion dans l’eau douce, et peut durer plusieurs mois (Kongtorp et al. 2009; Johansen et al. 2016).

En plus de la morbidité, les signes cliniques peuvent inclure l’accumulation de liquides dans la cavité abdominale (ascite), un cœur et un foie pâles, une rate hypertrophiée et des hémorragies diffuses et localisées dans les organes internes (pétéchies viscérales). Cependant, tous les poissons atteints d’IMSC ne présentent pas forcément les mêmes signes cliniques et pendant les premiers stades de la maladie, les poissons peuvent sembler en bonne santé, malgré la présence de lésions internes. En Norvège, on diagnostique généralement le HSMI après un événement stressant pour les poissons (Løvoll et al. 2012), ce qui est vrai pour de nombreuses maladies.

Bien que des observations sur le terrain aient laissé penser que les poissons survivants dans les cages flottantes affectées pourraient se rétablir (observations sur le terrain non publiées; Kongtorp et al., 2004a), des éclosions de maladie non létales restent considérées comme un problème important dans l’élevage du saumon de l’Atlantique en Norvège en raison d’une faible croissance et d’un rendement général faible du poisson après l’infection.

L’IMSC est diagnostiquée par l’apparition de lésions histopathologiques dans le cœur et le muscle squelettique; une panmyocardite (inflammation dans les couches compactes et spongieuses du myocarde); et une dégénération et une nécrose du myocarde (Biering et Garseth 2012). Le muscle squelettique présente également une myodégénération modérée à sévère et une nécrose des fibres du muscle rouge, ainsi qu’une inflammation (Kongtorp et al. 2004a). Les lésions dans le muscle squelettique tendent à apparaître généralement pendant le pic de l’éclosion de la maladie et, dans une moindre mesure, dans la phase de rétablissement (Kongtorp et al. 2006). Parmi les lésions histopathologiques dans d’autres organes, on compte la nécrose et la congestion du foie / les hémorragies dans le foie, le rein, la rate et les branchies (Kongtorp et al. 2004a).

Le réovirus pisciaire et l’association avec la maladie

Le réovirus pisciaire a été identifié pour la première fois lors d’un séquençage de tissus cardiaques prélevés sur un saumon de l’Atlantique (Salmo salar) élevé en Norvège. L’échantillon de tissus présentait des signes de deux maladies cardiaques similaires, et indiquait une inflammation des muscles squelettiques et cardiaques (IMSC) et une cardiomyopathie (Palacios et al. 2010; Løvoll et al. 2010). Le réovirus pisciaire a systématiquement été observé en même temps que les éclosions d’IMSC dans les exploitations en Norvège (Lovoll et al. 2012; Wiik-Nielsen et al. 2016) et l’injection chez le saumon de l’Atlantique de Norvège d’homogénats tissulaires infectés par le réovirus pisciaire de poissons diagnostiqués comme ayant l’IMSC a, dans de nombreuses études (Kongtorp et al. 2004a; Watanabe et al. 2006; Alne et al. 2009; Kongtorp et Taksdal 2009; Yousaf et al. 2014, Saddique 2014; Johansen et al. 2015; Johansen et al. 2016), entraîné la formation de lésions du cœur et du muscle squelettique symptomatiques de l’IMSC.

Récemment, des séquences semblables au réovirus pisciaire ont également été découvertes en même temps que trois maladies (semblable à l’IMSC) chez des salmonidés d’élevage : chez la truite arc-en-ciel en Norvège, la maladie grossièrement décrite comme une défaillance du système circulatoire avec des hémorragies et une anémie, incluait, sur le plan pathologique, une nécrose du foie et des lésions dues à l’IMSC (Olsen et al. 2015); chez le saumon coho au Chili, la maladie grossièrement décrite comme un ictère et une anémie incluait, sur le plan pathologique, une nécrose du foie et des lésions semblables à l’IMSC (Godoy et al. 2016); chez les saumons coho d’élevage au Japon avec une maladie décrite comme le syndrome de corps d’inclusion érythrocytaire (Takano et al. 2016).

Des études exposant le saumon de l’Atlantique de Norvège au réovirus pisciaire purifié ont permis de démontrer que le poisson exposé avait reproduit le virus et développé des lésions histopathologies symptomatiques de l’IMSC, ce qui démontre que le réovirus pisciaire est l’agent responsable (Wessel et al. 2017). Wessel et al. 2017 fournit la preuve que l’infection par l’orthoréovirus pisciaire cause l’IMSC chez le saumon de l’Atlantique tout en reconnaissant qu’on ignore encore les raisons pour lesquelles dans de nombreux cas les infections n’entraînent pas la maladie. En développant la capacité de purifier le réovirus pisciaire, les auteurs ont permis à la communauté de chercheurs de caractériser les différentes souches possibles et les différences d’hôtes du virus, ainsi que les facteurs environnementaux nécessaires au développement de la maladie.

Études de l’infectiosité et de la maladie causant un risque de réovirus pisciaire

Pour les souches norvégiennes du réovirus pisciaire, la causalité avec l’IMSC a été démontrée de façon concluante, mais la maladie causant les souches nord-américaines possibles chez les espèces indigènes est mal connue. Les études menées jusqu’à ce jour en Amérique du Nord ont révélé que la présence d’un matériel génétique du réovirus pisciaire chez le saumon quinnat, le saumon coho, le saumon et la truite arc‑en-ciel de l’État de Washington, de la Colombie-Britannique et de l’Alaska, qui ont fait l’objet d’une surveillance de plusieurs années, n’a pas entraîné le développement de l’IMSC (Marty et al. 2015; Siah et al. 2015, Purcell et al. 2017). Par ailleurs, bien que l’IMSC ait été transmise de façon répétée à des poissons novices en Norvège par injection de matière infectée par le réovirus pisciaire obtenue auprès de poissons atteints de l’IMSC (Finstad et al. 2012; Mikalsen et al. 2012; Finstad et al. 2014), des études semblables de transmission sur la variante de Colombie-Britannique du réovirus pisciaire menées au MPO ont échoué à provoquer la maladie chez le saumon de l’Atlantique, rouge ou quinnat (Garver et al. 2016a; Garver et al. 2016b). Le saumon rouge, le saumon quinnat et le saumon de l’Atlantique exposés ont été infectés et ont supporté des niveaux élevés dans le sang semblables à celles provenant des études de provocation réalisées en Norvège. Cependant, contrairement à la Norvège, à ce jour, toutes les expositions expérimentales de saumons du Pacifique et de l’Atlantique en Colombie-Britannique à la souche du réovirus pisciaire de Colombie-Britannique ont échoué à produire la maladie ou la mortalité. Cela laisse penser que le réovirus pisciaire en Colombie-Britannique a une faible capacité à produire la maladie (faible virulence) pour ces espèces (Garver et al. 2016a; Garver et al. 2016b).

Dans une étude collaborative menée par des chercheurs à la Station biologique du Pacifique du MPO, il a été constaté que le saumon rouge infecté par le réovirus pisciaire présente une absence de réponse au virus deux et trois semaines après l’infection, même si une amplification virale substantielle s’est produite pendant cette période (Polinski et al. 2016). En revanche, lorsque le saumon rouge était infecté avec le virus de la nécrose hématopoïétique infectieuse (VNHI), un rhabdovirus hautement pathogène qui provoque des enzooties sur la côte Ouest de l’Amérique du Nord, des modifications considérables des voies immunitaires des hôtes ont été observées, y compris des réponses antivirales et inflammatoires. De plus, lorsque les saumons rouges infectés par le réovirus pisciaire étaient ensuite exposés au VNHI, l’infection au réovirus pisciaire n’avait pas d’effet considérable sur la réponse du saumon rouge au VNHI qui cause une surinfection. En conséquence, les infections simultanées de réovirus pisciaire et de VNHI ne semblent pas avoir d’incidence considérable sur l’infectiosité ou la sévérité de la maladie associée au VNHI chez le saumon rouge, bien que le moment des expositions au virus puisse se révéler un facteur important pour déterminer les relations entre les virus (Polinski et al. 2016).

Les scientifiques du MPO, ainsi que leurs collègues provinciaux et internationaux, mènent des études afin de mieux comprendre la biologie du réovirus pisciaire et de l’IMSC chez les saumons sauvages et les saumons d’élevage sur la côte Ouest de l’Amérique du Nord. Par exemple, les études qui évaluent l’association entre les infections au réovirus pisciaire et la réussite du frai du saumon rouge dans le fleuve Fraser (Miller et al. 2014), l’association potentielle du réovirus pisciaire avec la maladie chez le saumon du Pacifique, et l’évaluation des agents infectieux et des preuves histologiques de la maladie chez les saumons d’élevage, sauvages et mis en valeur. Les études cherchent également à déterminer si l’infection au réovirus pisciaire en l’absence de l’IMSC aurait une incidence sur la façon dont un poisson pourrait répondre une fois exposé à d’autres virus présents dans la nature.

Les auteurs Di Cicco et al. 2017 ont documenté le premier diagnostic de l’IMSC au niveau des exploitations en Colombie-Britannique. L’étude montrait des lésions inflammatoires dans le tissu cardiaque et le muscle squelettique, symptomatiques de cette maladie, dans une étude longitudinale provenant d’une exploitation de saumons de l’Atlantique en Colombie-Britannique. Au niveau individuel, tous les poissons n’étaient pas porteurs de lésions cardiaques et squelettiques à un moment quelconque, mais au niveau de l’exploitation, les deux types de lésions étaient présents et symptomatiques de la maladie. Aucune augmentation associée des mortalités n’a été signalée au niveau des exploitations. Même si cette étude ne visait pas à prouver ou à réfuter une relation de cause à effet entre le réovirus pisciaire et l’IMSC, il s’est avéré que le réovirus pisciaire est lié au développement de lésions symptomatiques de l’IMSC et situé dans les tissus touchés, ce qui est en adéquation avec l’étiologie de l’IMSC provenant d’autres pays. La découverte de lésions inflammatoires du cœur (myocardite) dans cette étude est cohérente avec les lésions cardiaques, dont l’origine suspectée est virale, qui ont été signalées dans le cadre du programme de vérification du MPO depuis 2008 et par l’industrie aquacole probablement dès 2002, mais qui n’ont jamais été diagnostiquées comme une maladie précise.

La présente page Web sera mise à jour régulièrement avec les résultats de nouvelles études importantes.


Références

Personne-ressource du programme :
Nathan Taylor, directeur de la Division des sciences, Région du Pacifique, 250-756-7395

Personnes-ressources aux Communications :
Michelle Rainer, Région du Pacifique, 604-775-5065
Natalie Seguin, conseillère en communications, Région de la capitale nationale, 613-990-5248

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