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Répercussions socio-économiques de la présence de la carpe asiatique dans le bassin des Grands Lacs

Répercussions socio-économiques de la présence de la carpe asiatique dans le bassin des Grands Lacs

Répercussions socio-économiques de la présence de la carpe asiatique dans le bassin des Grands Lacs (PDF, 662 KB)

Préparé par
Salim Hayder, Ph. D.

Publié sous la direction de
Debra Beauchamp

Pêches et Océans Canada, Politiques et économie
501, croissant University, Winnipeg (Manitoba) R3T 2N6

Table des matières

Chapitre 2 : Analyse documentaire

Comparativement aux efforts de recherche réalisés pour approfondir les connaissances concernant les impacts des EAE sur les Grands Lacs et l'économie des États-Unis (p. ex., Felts, Johnson, Lalor, Williams et Winn-Ritzenberg 2010; Thomas 2010; Austin, Anderson, Courant et Litan 2007; Leigh 1998; Ainsworth 1977), la recherche s'est moins penchée, jusqu'à récemment, sur la mesure des impacts au Canada. Il y a donc peu de renseignements sur le Canada dans la littérature scientifique existante. Cette section fournit un résumé des publications existantes qui traitent des aspects économiques liés aux espèces envahissantes qui menacent les Grands Lacs dans l'optique des États-Unis ou du Canada.

Felts, Johnson, Lalor, Williams et Winn-Ritzenberg (2010) ont examiné les répercussions sur les politiques des EAE dans la ville de Milwaukee et ils soutiennent que des politiques adéquates en matière d'EAE équilibrent la responsabilité écologique, réduisent au minimum les dommages économiques causés par les EAE, renforcent la vitalité économique de Milwaukee et la faisabilité des politiques. Le rapport conclut que, à court terme, il faudrait s'employer à empêcher l'introduction d'EAE causée par les navires qui arrivent au port de Milwaukee et qu'à long terme, la lutte contre les EAE devrait également porter sur la gestion et l'élimination des EAE établies.

À l'aide d'un modèle de simulation bioéconomique, Thomas (2010) a mené une analyse coûts/avantages de la gestion préventive des moules zébrées et quagga dans le réseau hydrographique du Colorado et de la rivière Big Thompson. L'étude a démontré que le programme d'inspection des navires était très efficace et qu'il avait presque entièrement supprimé toute possibilité d'invasion du système du réservoir. Cependant, il est improbable que les avantages liés à des coûts réduits d'infrastructure compensent les coûts du programme d'inspection des navires, car la probabilité d'invasion reste faible, même en l'absence du programme d'inspection des navires. L'étude fait également état de ses propres limites : i) les nombreux avantages omis dans l'analyse; ii) la portée limitée de l'analyse; iii) l'incertitude liée au modèle bioéconomique.

Austin et al. (2007) ont adopté des approches portant sur des améliorations précises ou des améliorations cumulées découlant de la restauration écologique des Grands LacsFootnote 22 dans le but de déterminer les coûts et les incidences écologiques probables et d'estimer les avantages économiques de ces impacts écologiques. La première approche a établi les améliorations précises que la restauration écologique devrait apporter au milieu pour ensuite estimer les améliorations cumulées. La deuxième approche a estimé l'augmentation de la valeur des propriétés dans toutes les zones qui seraient touchées par l'initiative de restauration.

Grâce à ces approches, Austin et al. ont constaté que les initiatives de restauration écologique généraient des avantages économiques à long terme d'une valeur actuelle dépassant les 50 milliards de dollars ($ US) pour l'économie des États-Unis.Footnote 23 En sus des avantages économiques à long terme, l'étude a permis d'estimer des avantages supplémentaires à court terme sous la forme d'effets multiplicateurs d'une valeur allant de 30 à 50 milliards de dollars ($ US), principalement pour l'économie régionale. Toutefois, cette estimation ne rend pas bien compte des avantages liés à la mise au point de nouvelles technologies et industries résultant de l'investissement dans la restauration écologique des Grands Lacs.

Leigh (1998) a évalué la rentabilité d'autres stratégies de lutte et a déterminé la valeur économique pour les pêches des Grands Lacs de la mise en œuvre d'un programme de lutte contre la grémille. D'après les changements prévus aux identificateurs biométriques, l'étude a montré que la lutte précoce contre une espèce de poisson non indigène comme la grémille pouvait se traduire par un rendement plus élevé des investissements. La mise en place d'un programme de lutte permettrait aux États-Unis, même si les avantages prévus ne sont que modérés, de faire des économies nettes sur les deniers publics estimées à 513 millions de dollars américains au cours des cinq prochaines décennies, jusqu'en 2050.

À l'aide de modèles de l'offre et de la demande du marché et de jugements structurés émis par les spécialistes (à partir de la recherche scientifique pertinente et des avis professionnels), Rothlisberger, Finnoff, Cooke et Lodge (2012) ont examiné l'impact des espèces envahissantes en provenance des navires transocéaniques sur l'observation de la faune, l'utilisation de l'eau brute, la pêche commerciale et récréative dans la partie étatsunienne des Grands Lacs. Comparé au scénario prévoyant des invasions non liées aux navires, l'étude a fait ressortir que, dans les eaux des États-Unis, les dommages médians cumulés pour les divers écoservices s'élevaient à 138 000 000 $ US par an, répartis de la manière suivante : dommages à la pêche commerciale (5 300 000 $ US), à la pêche récréative (106 000 000 $ US, avec un degré d'incertitude plus élevé pour ce qui est de la répartition des impacts), à l'utilisation d'eau bruteFootnote 24 (27 000 000 $ US, médiane des coûts de fonctionnement supplémentaires cumulés dans toutes les installations des Grands Lacs). Selon l'étude, les répercussions des espèces envahissantes rien que sur la pêche récréative pourraient s'élever à 800 millions de dollars américains (probabilité de 5 %).

Grâce à la méthode hédonique concernant la valeur des propriétés, Zhang et Boyle (2010) ont observé que l'infestation de certains lacs du Vermont par le myriophylle en épi (une mauvaise herbe aquatique envahissante) venait s'ajouter à la croissance totale de macrophytes (une plante aquatique qui pousse dans l'eau ou à proximité) et pouvait se traduire par une diminution de la valeur des propriétés allant d'à peine 1 % jusqu'à 16 %, de manière proportionnelle au niveau d'infestation.

Braden, Won, Taylor, Mays, Cangelosi et Patunru (2008) ont estimé les avantages économiques de l'assainissement d'un secteur préoccupant de la rivière Sheboygan, au Wisconsin, à l'aide d'une analyse hédonique et d'une méthode fondée sur les relevés. L'analyse hédonique a déterminé que la perte globale de valeur de la propriété des maisons occupées par les propriétaires dans un rayon de 5 milles autour du secteur préoccupant de la rivière Sheboygan s'élevait à 158 millions de dollars américains (8 % prix du marché). Les impacts étaient proportionnellement plus importants sur les propriétés les plus proches du secteur préoccupant. Une méthode fondée sur les relevés a estimé la volonté de payer (VDP) moyenne à 218 millions de dollars américains (10 % de la valeur de la propriété) pour l'assainissement complet du secteur préoccupant.

Les résultats d'une étude séparée (Braden et al. 2008) qui portait sur un secteur préoccupant de la rivière Buffalo (État de New York) a montré qu'une fois neutralisés, les nombreux effets structuraux, communautaires et spatiaux à l'œuvre, la valeur des résidences unifamiliales au sud de la rivière s'était dépréciée de 118 millions de dollars américains, soit 5,4 % du prix du marché, en raison de leur proximité au secteur préoccupant. Dans la zone où l'étude de marché a signalé des diminutions de prix, les estimations dérivées des relevés ont évalué la VDP pour un assainissement complet du secteur préoccupant à environ 250 millions de dollars américains (14 % du prix du marché médian).

Sur la côte nord du lac Érié, au Canada, Kreutzwiser (1981) a mené une étude portant sur 703 utilisateurs du marais public à Long Point et à la Pointe-Pelée en 1978, à l'aide de la méthode d'évaluation des contingences (une méthode utilisée pour estimer la valeur économique des écosystèmes et des écoservices). Il a constaté que les utilisateurs récréatifs ont dépensé un total de 119 000 $, pour retirer des avantages d'une valeur contingente estimée à 213 000 $, auxquels il faut ajouter des dépenses connexes, générées directement ou indirectement, de 225 000 $ au niveau local (p. ex., voyage, repas, hébergement) par an, ce qui représente un rendement de 179 %.

Comme il a été mentionné, peu d'études ont évalué les incidences économiques (nettes) des EAE des Grands Lacssur l'économie canadienne par rapport aux nombreuses études qui en ont évalué les impacts sur l'économie des États-Unis. La plupart des études canadiennes (p. ex., Genesis Public Opinion Research Inc. 2007; et EC 2000) s'inscrivent dans une optique provinciale ou nationale; très peu d'études (p ex., MPO 2008; Krantzberg et al. 2008, 2006) ont souligné la contribution économique des Grands Lacs pour le Canada par secteur d'activité et par zone. Le chapitre 5 de la présente étude porte sur la littérature scientifique pertinente pour chaque activité.

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