Avis scientifique 2022/031
Évaluation du stock de saumon atlantique à Terre-Neuve-et-Labrador en 2020
Sommaire
- Dix-sept populations de saumon atlantique (Salmo salar) ont été évaluées en 2020. On a dénombré les remontes de saumons adultes dans 16 rivières à l’aide de barrières de surveillance ou de passes à poissons, et on les a estimées dans une rivière à l’aide d’une combinaison d’une barrière de dénombrement et d’un relevé au tuba (ruisseau Little Barachois, zone de pêche du saumon [ZPS] 13).
- Les mesures de santé publique liées à la COVID-19 en 2020 ont entraîné des perturbations et des retards dans les activités de surveillance du saumon atlantique. Il n’y a pas eu de dénombrement de saumoneaux en 2020 et les barrières pour les adultes n’ont pas été installées sur la rivière Harrys (ZPS 13) et la rivière Sand Hill (ZPS 2). Les barrières de dénombrement ont été installées plus tard que d’habitude sur six rivières. La proportion des remontes de saumons de 2020 avant l’installation de la barrière de dénombrement a été estimée à l’aide des données disponibles sur le moment de la montaison dans chacune de ces rivières depuis 2005.
- En 2020, on a constaté une diminution des remontes totales dans huit des 16 rivières surveillées sur lesquelles on dispose d’informations sur la génération précédente : une rivière au Labrador (rivière English, ZPS 1) et sept à Terre-Neuve, dont six ont connu un déclin de plus de 30 % par rapport à la génération précédente. Cinq de ces six rivières étaient situées sur la côte sud de Terre-Neuve.
- Les trois populations de saumon atlantique surveillées dans la ZPS 11 sur la côte sud de Terre-Neuve se situaient très bas dans la zone critique (moins de 20 % du point de référence limite [PRL]). Les remontes dans la rivière Conne en 2020 étaient les plus basses jamais enregistrées dans la série chronologique disponible, et celles dans la rivière Little étaient les deuxièmes plus basses, les deux populations étant proches de l’extinction locale. La survie en mer estimée en 2020 (année de montaison des adultes) dans la rivière Conne était inférieure à 1 %.
- Dans la rivière Garnish, les prises dans la pêche à la ligne étaient importantes autrefois (environ 1 000 à 2 000 poissons débarqués à la fin des années 1970 et dans les années 1980) et, bien que les données de surveillance soient limitées (de 2015 à 2020), la tendance au déclin (> 60 %) était similaire à celle des rivières voisines. La survie en mer estimée en 2020 (année de montaison des adultes) dans la rivière Garnish était inférieure à 1 %.
- La survie en mer était considérée comme un facteur majeur limitant l’abondance du saumon atlantique à Terre-Neuve-et-Labrador, les remontes d’adultes d’une année donnée étant déterminées principalement par la survie en mer plutôt que par la production de saumoneaux. Les estimations interannuelles de la survie en mer étaient inférieures aux moyennes de la génération précédente et de trois générations dans la plupart des rivières pour lesquelles des estimations étaient disponibles.
- Sur 13 rivières pour lesquelles on disposait de renseignements sur les remontes d’adultes au cours des trois générations précédentes, les remontes totales en 2020 étaient inférieures dans six rivières (toutes à Terre-Neuve), et ont diminué de plus de 30 % dans cinq d’entre elles.
- En 2020, les échappées estimées de géniteurs (œufs) dans les rivières du Labrador se situaient dans la zone critique (en dessous du PRL de la rivière) dans le ruisseau Southwest (ZPS 2) et dans la zone saine (au-dessus du point de référence supérieur du stock [PRS]) dans la rivière English et le ruisseau Muddy Bay.
- En 2020, les échappées estimées de géniteurs (œufs) se situaient dans la zone critique dans 7 des 14 rivières de Terre-Neuve évaluées en 2020. Elles se trouvaient dans la zone saine pour cinq autres rivières et dans la zone de prudence (entre le PRL et le PRS) pour deux.
- Les estimations préliminaires de la récolte dans les pêches autochtones et de subsistance au Labrador en 2020 ont été déduites des journaux de bord (dont 63 % ont été retournés) et s’élèvent à 13 713 saumons (7 558 petits et 6 155 grands), soit 3 % de moins que la moyenne des sept années précédentes (2013 à 2019).
Pêches récréatives
- Les estimations des prises et de l’effort pour la pêche récréative de 2020 n’étaient pas disponibles au moment de l’évaluation. On a utilisé les valeurs moyennes des prises de la génération précédente pour calculer les remontes totales et les échappées de géniteurs de 2020, avec 20 574 saumons conservés et 25 704 relâchés pour les rivières de Terre‑Neuve et 1 288 poissons conservés et 6 302 relâchés pour les rivières du Labrador.
Génétique
- Les relevés sur les juvéniles et les analyses génétiques ont indiqué que la proportion d’hybrides sauvages-fugitifs de première génération dans le sud de Terre-Neuve en 2019 et 2020 était la plus faible depuis le début de la surveillance en 2014. Des hybrides de première génération ont malgré tout été détectés les deux années dans la baie Fortune et les échantillons des rivières plus petites étaient encore dominés par les hybrides. Tant les données expérimentales que l’augmentation de la détection de la progéniture d’hybrides de première génération et de saumons sauvages ont confirmé que la maturation précoce des hybrides mâles joue un rôle dans l’introgression en cours.
- L’analyse génomique du saumon atlantique dans tout le bassin versant de la rivière Conne a donné à penser que :
- malgré les preuves génomiques d’un déclin de l’abondance depuis le milieu des années 1980, il existait toujours une différenciation significative entre le cours principal et les affluents;
- une introgression avec des saumons d’élevage fugitifs s’est produite dans les parties basses du bassin versant.
- Une analyse génomique des populations explorant l’introgression européenne chez le saumon d’élevage nord-américain a indiqué que certains saumons atlantiques d’élevage s’étaient croisés avec des saumons d’origine européenne, et que des individus s’étaient échappés et s’étaient hybridés dans la nature au sud de Terre-Neuve.
Environnement
- Les conditions de l’écosystème marin dans la biorégion de Terre-Neuve et du Labrador sont restées révélatrices d’une productivité globale limitée de la communauté de poissons. La biomasse totale de toute la communauté de poissons est demeurée beaucoup plus faible qu’avant l’effondrement survenu au début des années 1990. Elle a affiché une certaine reprise jusqu’au début et au milieu des années 2010, où l’on a observé des baisses. La biomasse totale actuelle de la communauté de poissons est restée en deçà de son niveau du début des années 2010, mais avec quelques signaux positifs en 2020. Depuis le milieu des années 2000, cet assemblage est revenu à une structure dominée par les poissons, bien que les données de 2019-2020 indiquent une légère augmentation de la proportion de mollusques et crustacés.
- La température annuelle moyenne de l’air en 2020 à Terre-Neuve et au sud du Labrador était proche de la moyenne à long terme de 1991 à 2020, caractérisée par un hiver/printemps froid et un été chaud. Les températures estivales de la surface de la mer étaient supérieures à la moyenne et la glace de mer était inférieure à la moyenne pour la première fois depuis 2014 et 2013, respectivement. L’amplitude et la durée des conditions les plus chaudes de la température de la surface de la mer dans les zones moins profondes autour de Terre-Neuve ont augmenté depuis les années 1980, conformément aux projections des changements climatiques.
- Les concentrations de chlorophylle et la biomasse du zooplancton étaient inférieures à la normale au début et au milieu des années 2010, mais elles ont augmenté et se situent au-dessus de la moyenne à long terme (1999-2020) depuis 2016-2017. La structure des communautés de zooplancton a changé dans la dernière décennie, avec moins de copépodes de grande taille et plus de petits copépodes, bien que l’abondance des copépodes calanoïdes de grande taille et riches en énergie ait augmenté pour dépasser la normale dans certaines régions depuis 2017. En outre, des changements de la saisonnalité du zooplancton (signaux du zooplancton plus faibles au printemps et plus forts en été et à l’automne) peuvent avoir modifié la qualité des aliments et la période où ils sont disponibles pour les niveaux trophiques supérieurs.
Le présent avis scientifique découle de la réunion régionale d’examen par les pairs sur l’évaluation du saumon de l’Atlantique dans la région de Terre Neuve et Labrador qui s’est tenue du 2 au 4 mars 2021. Toute autre publication découlant de cette réunion sera publiée, lorsqu’elle sera disponible, sur le calendrier des avis scientifiques du MPO.
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