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Les océans du Canada maintenant – 2020

Les océans du Canada maintenant – 2020
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Avant-propos

Dans le cadre de l’engagement continu du gouvernement à informer ses citoyens sur l’état actuel de ses océans, Pêches et Océans Canada produit une série de rapports intitulés Les océans du Canada maintenant. Chaque série quadriennale comprend un rapport annuel résumant l’état actuel et les tendances des océans Pacifique, Atlantique et Arctique, suivi d’une synthèse nationale. Les rapports présentent des faits saillants et des exemples de la multitude d’influences et de changements qui touchent ces systèmes océaniques dynamiques.

Les océans du Canada maintenant, 2020 consiste en un examen et en une mise à jour à l’échelle nationale des trois océans du Canada fondés sur de précédents rapports techniques et publics relatifs aux océans Pacifique, Atlantique et Arctique. De nouvelles connaissances ont également été intégrées à partir de données actualisées. Une recherche scientifique a été menée, principalement par Pêches et Océans Canada et Environnement et Changement climatique Canada (oiseaux de mer); certaines données sont également fondées sur les connaissances des communautés et des Autochtones ainsi que sur des travaux d’universités et d’organisations non gouvernementales.

Citations

Rapports techniques

BERNIER, R.Y., R.E. Jamieson et A.M. Moore, (dir.) 2018. Rapport de synthèse sur l’état de l’océan Atlantique. Rapport tech. can. sci. halieut. aquat. 3167: iii + 149 p.

BOLDT, J.L., A. Javorski et P.C. Chandler (dir.) 2020. État des ressources physiques et biologiques et de certaines ressources halieutiques des écosystèmes des eaux canadiennes du Pacifique en 2019. Rapport tech. can. sci. halieut. aquat. 3377: x + 288 p.

NIEMI, A., S. Ferguson, K. Hedges, H. Melling, C. Michel et al. 2019. État des mers arctiques du Canada. Rapport tech. can. sci. halieut. aquat. 3344 : xv + 189 p.

Rapports publics

Les océans du Canada maintenant : Écosystèmes de l’Atlantique, 2018.

Les océans du Canada maintenant : Écosystèmes de l’Arctique, 2019.

Les océans connectés du Canada

Notre pays est un gardien des écosystèmes uniques et de la riche biodiversité qui existent au large de nos côtes.

Avec ses eaux marines de sa côte Ouest à sa côte est en passant par sa côte Nord, le Canada est une nation océanique. Les Canadiens sont influencés à bien des égards par les océans Pacifique, Arctique et Atlantique. Nos trois océans reliés entre eux et qui bordent le pays soutiennent une multitude d’habitats, de plantes et d’animaux et jouent un rôle clé dans notre économie, notre culture, notre identité, notre santé et notre bien-être (voir Tous les Canadiens ont des liens avec les océans). Même si l’être humain recueille des observations sur l’océan depuis des siècles déjà, les océans du Canada ont encore beaucoup à nous apprendre. Aujourd’hui, de nouvelles technologies sont utilisées, tout comme les connaissances locales et autochtones, pour mieux comprendre les écosystèmes marins et leurs changements. Les questions complexes, telles que le comportement et le statut des espèces migratrices qui se déplacent entre les océans, sont mieux traitées lorsque des chercheurs issus de disciplines, d’organisations ou de pays différents collaborent (voir Animaux marins sans frontières).

Les eaux qui entourent le Canada sont en mouvement constant (Figure 1 : Va-et-vient dans les océans du Canada). Sur la côte Ouest, les eaux du Pacifique se déversent dans l’Arctique, amenant vers le nord des eaux naturellement acides. Sur la côte Est, le courant frais du Labrador pousse l’eau de l’Arctique vers le sud, sur les plateaux de Terre-Neuve et du Labrador, tandis que le talus du plateau néo-écossais est réchauffé par le Gulf Stream qui s’écoule vers le nord. Plus près des collectivités côtières du Canada, le flux et le reflux des marées découvrent des habitats peu profonds tels que des vasières et des rivages rocheux, altérant les berges par l’érosion et le dépôt de sédiments. Les réseaux entrelacés de lacs intérieurs, de ruisseaux et de rivières relient des emplacements géographiques dans tout le pays et apportent également de l’eau douce à l’océan. Par exemple, le fleuve Saint-Laurent coule du lac Ontario dans le golfe du Saint-Laurent et crée un vaste environnement estuarien productif où de grandes quantités d’eau douce sont déversées dans l’océan Atlantique.

Les écosystèmes uniques des eaux marines du Canada abritent une incroyable diversité d’espèces et d’habitats. Au large de la côte Ouest du Canada, des centaines de cheminées hydrothermales en eaux profondes rejettent des gaz surchauffés du fond de l’océan Pacifique. Sur la dorsale Juan de Fuca, les cheminées abritent une soixantaine d’espèces différentes, dont 12 n’existent nulle part ailleurs dans le monde. Au nord, dans le Haut-Arctique, certaines des glaces de mer les plus anciennes et les plus épaisses du Canada se trouvent dans la zone de protection marine (ZPM) de Tuvaijuittuq, qui vient d’être désignée. La vieille glace provenant des eaux d’autres régions arctiques peut s’y accumuler, ce qui en fait une réserve de glace de mer en été et un habitat pour les nombreuses espèces dont la survie dépend de la glace de mer. À l’est, au Canada atlantique, les marées de la baie de Fundy sont parmi les plus hautes du monde, et les puissants courants brassent les nutriments nécessaires à la croissance du plancton, ce qui en fait un secteur propice pour la biodiversité, notamment les baleines, les poissons, les organismes benthiques et les oiseaux de mer.

Les océans du Canada sont également liés par le changement. Nos océans ont tous connu ces dernières années des changements physiques et biologiques marqués sous l’effet des changements climatiques et de l’activité humaine – les températures augmentent, les habitats se dégradent, la répartition des espèces se déplace, et les réseaux trophiques se transforment. Dans le présent rapport national sur l’état des océans, nous faisons état d’observations et de tendances communes et uniques dans les trois océans du Canada en ce qui concerne le climat, les habitats, les espèces, et les réseaux trophiques.

Encadré : Tous les Canadiens ont des liens avec les océans

Le Canada possédant le plus long littoral du monde, l’océan est profondément intégré dans la vie de tous ses habitants.

Un lien avec l’océan est un élément naturel de la vie humaine. Nous sommes attirés par l’océan pour sa complexité, sa diversité, sa signification spirituelle, sa beauté et bien d’autres choses. Les océans du Canada soutiennent des aspects importants de l’identité sociale et culturelle, en particulier chez les collectivités autochtones et côtières.

Les océans fournissent des services naturels à la vie sur Terre en produisant de l’air et de l’eau propres. Ils contribuent à la sécurité alimentaire grâce à la récolte récréative, de subsistance et commerciale de plantes et d’animaux marins – nourrissant les collectivités et les pays proches ou éloignés.

Les trois océans du Canada soutiennent les moyens de subsistance, grâce aux industries de la pêche, de l’aquaculture, du transport maritime, de la production d’énergie, des voyages et du tourisme. Ils constituent un moyen de transport efficace pour les déplacements locaux et pour le transport de biens économiques dans le monde. Les loisirs nautiques permettent de pratiquer de nombreuses activités sur l’eau ou à proximité, qu’il s’agisse d’excursions de plongée, d’aventures en kayak, de voile ou de pêche.

Compte tenu des liens étroits entre nos océans et le bien-être humain, il n’est pas surprenant que les Canadiens s’intéressent aussi beaucoup à l’intendance des océans. En particulier, la recherche et l’éducation sur les océans au Canada cherchent depuis longtemps à équilibrer nos modes d’utilisation des océans afin d’en maintenir la santé tout en continuant à en faire profiter les populations.

Points saillants : Animaux marins sans frontière

De nombreux animaux marins se déplacent d’un océan à l’autre et traversent les frontières internationales pour trouver une aire d’alimentation où la nourriture est abondante ou une température de l’eau idéale, ou pour accomplir une partie de leur cycle biologique. L’étude de ces animaux nécessite une collaboration entre les régions et les pays.

La tortue luth et la tortue caouanne sont présentes dans le Canada atlantique à l’été et à l’automne, lorsqu’elles viennent s’alimenter dans les eaux chaudes du large influencées par le Gulf Stream. Elles migrent vers cette région depuis leurs sites de nidification dans le sud, qui se trouvent dans plus d’une douzaine de pays d’Amérique du Sud, dans les Caraïbes et le sud-est des États-Unis.

Certains mammifères marins migrateurs, tels que le morse de l’Atlantique, le narval, le phoque du Groenland et le phoque à capuchon, migrent vers le sud, de l’Arctique aux eaux de l’Atlantique, pendant une partie de l’année pour mettre bas et se nourrir. Les bélugas, qui se nourrissent et mettent bas dans l’ouest de l’Arctique canadien, se dirigent vers l’ouest à l’automne, traversant les eaux arctiques américaines et russes.

Même les espèces qui vivent près des fonds marins traversent les frontières. Le merlu du Pacifique est le poisson de fond (poisson vivant et se nourrissant sur le plancher océanique ou à proximité) le plus abondant dans le nord-est de l’océan Pacifique. Chaque année, les populations côtières migrent des eaux plus profondes du nord de la Californie vers les eaux moins profondes de la bordure du plateau continental et la côte de l’île de Vancouver pour se nourrir. Elles se déplacent vers le nord en longeant la côte de la Colombie-Britannique, jusqu’au sud de l’Alaska certaines années. Dans l’Arctique, on a récemment découvert que le flétan du Groenland se rendait de la baie de Baffin, au Nunavut, jusqu’aux Grands Bancs de Terre-Neuve et à la côte Ouest de l’Islande.

Infographie : Va-et-vient dans les océans du Canada

Figure 1 : Principaux courants qui relient les océans Pacifique, Arctique et Atlantique du Canada – et certaines de leurs caractéristiques uniques. Les cercles jaunes numérotés mettent en évidence quelques régions importantes pour chaque océan.

Climat des océans

Les océans du Canada sont devenus plus chauds, plus acides et moins oxygénés sous l’effet des changements climatiques.

Les océans du Canada sont étroitement liés à l’atmosphère et au climat mondial. Ils sont influencés par la variabilité climatique saisonnière et interannuelle, de même que par les changements climatiques à long terme. L’augmentation des niveaux de gaz à effet de serre dans l’atmosphère entraîne une hausse des températures mondiales. À mesure que les océans du Canada absorbent cette chaleur et le dioxyde de carbone, ils se réchauffent et deviennent plus acides, leur taux d’oxygène diminue, la glace de mer en été dans l’Arctique diminue et les vagues de chaleur marines deviennent plus fréquentes. Les courants et les mélanges océaniques redistribuent la chaleur et le dioxyde de carbone absorbés à la surface de la mer vers les eaux plus profondes, provoquant d’autres modifications des écosystèmes marins qui pourraient persister pendant des décennies.

Température des océans

La chaleur du soleil réchauffe les eaux superficielles de l’océan et le mélange transfère cette chaleur dans les couches d’eau plus profondes. En raison des changements climatiques, les températures de l’eau fluctuent comme jamais auparavant, de la surface jusqu’au fond des océans. Les changements de la température de l’eau peuvent également avoir une incidence sur la répartition, la croissance et le cycle biologique des plantes et des animaux –  ainsi que sur la disponibilité et la période de disponibilité des sources de nourriture dans les écosystèmes marins.

L’état des océans du Canada

Tous les océans du Canada se réchauffent, et les températures de la surface de la mer augmentent de près de 1 °C par siècle. Cependant, dans certaines régions de l’Arctique, la température des eaux de surface en été a augmenté de 1 °C par décennie au cours des 20 dernières années. On observe des températures saisonnières plus élevées dans les eaux plus profondes et des vagues de chaleur marines plus fréquentes. Ces hausses des températures océaniques touchent des écosystèmes entiers – favorables pour certaines espèces, mais défavorables pour d’autres.

Dans le Pacifique

L’océan Pacifique du Canada affiche une tendance à long terme au réchauffement. Les températures quotidiennes de la surface de la mer recueillies le long de la côte de la Colombie-Britannique depuis 80 ans montrent que les eaux côtières se sont réchauffées d’environ 0,7 °C. Dans le nord-est de l’océan Pacifique, les vagues de chaleur marines sont devenues plus fréquentes. Pendant une vague de chaleur marine pluriannuelle de 2014 à 2016, appelée « le Blob », la température de la surface de la mer a grimpé à plus de 3 °C au-dessus des moyennes saisonnières. On n’a jamais vu de telles conditions de chaleur prolongées dans cette région depuis que l’on a commencé à tenir des registres. Durant l’été 2019, une vague de chaleur marine similaire s’est produite dans la même région, mais depuis, les températures de la surface du Pacifique sont revenues à la moyenne des 30 dernières années.

Dans l’Arctique

Les températures moyennes de la surface de la mer en été (août) ont été supérieures de 1 à 4 °C à la normale dans la mer de Beaufort, la baie de Baffin et le Haut-Arctique canadien ces dernières années. Cependant, la température de la surface de la mer en hiver, lorsque l’océan est recouvert de glace, n’a pas changé. La perte de la glace de mer en été permet à la température de la surface de la mer d’augmenter plus rapidement en raison de la température de l’air en surface. La température de l’air dans tout l’Arctique se réchauffe deux fois plus rapidement que la moyenne mondiale. La hausse de la température de l’air et de l’océan fait également dégeler le sol gelé dans l’Arctique canadien et provoque l’effondrement des zones côtières et leur érosion dans l’océan.

Dans l’Atlantique

En ce qui concerne la température de la surface de la mer, deux des cinq années les plus chaudes enregistrées depuis le début des observations par satellite en 1985 sont les années 2012 (la plus chaude) et 2014 (quatrième rang). Sur les plateaux de Terre-Neuve et du Labrador, les températures au fond étaient globalement supérieures à la moyenne entre 2012 et 2016. La contribution croissante des eaux plus chaudes du Gulf Stream a également conduit à des records successifs de températures élevées sur 100 ans dans le nord du golfe du Saint-Laurent.

Glace de mer

Dans les océans Atlantique et Arctique, des écosystèmes marins entiers sont influencés par la présence et le mouvement de la glace de mer. Dans l’Arctique, la glace de mer est l’élément le plus influent du milieu océanique; des écosystèmes marins entiers sont en train de se modifier à mesure que la glace de mer est altérée par les changements climatiques. La glace de mer a des répercussions sur les moyens de subsistance le long des côtes de l’Arctique et de l’Atlantique et fait partie intégrante de la culture inuite. Elle agit comme une autoroute de glace et relie les collectivités aux ressources océaniques et les relie entre elles. À mesure que la glace de mer continue d’évoluer, son influence sur le climat a des effets de grande ampleur – tant à l’échelle locale que mondiale.

L’état des océans du Canada

Dans tout le Canada, on constate une réduction de la quantité et de l’épaisseur de la glace de mer, ainsi qu’un raccourcissement de la saison de la glace de mer. L’emplacement et la stabilité des zones de glace de mer, de même que le moment où elles se forment, sont devenus moins prévisibles. La vieille glace de mer restante est essentiellement concentrée dans la partie la plus septentrionale de l’Arctique canadien, ce qui en fait un refuge unique pour les écosystèmes et les espèces associés à la glace.

Dans l’Arctique

Dans l’Arctique, la glace de mer fond plus tôt et se forme plus tard, ce qui se traduit par une plus longue période d’eaux libres qui modifie les fonctions des écosystèmes et les interactions entre les espèces. Dans les eaux arctiques canadiennes, une grande partie de la vieille glace (ayant résisté aux périodes estivales et hivernales) subsiste encore autour des îles du Nunavut et des Territoires du Nord-Ouest, ce qui fait du Canada l’un des derniers abris de cet habitat de glace de mer qui se rétrécit.

Dans l’Atlantique

La couverture de glace de mer diminue dans les eaux de l’Atlantique. Depuis la fin des années 1800, les hivers plus chauds ont mené à de plus longues périodes où la mer était libre de glace et à une diminution de la glace. Durant la dernière décennie, la quantité de glace sur les plateaux de Terre-Neuve et du Labrador, dans le golfe du Saint-Laurent et sur le plateau néo-écossais était inférieure à la moyenne la plupart des années. Elle a atteint un creux record dans le golfe du Saint-Laurent en 2010 et sur les plateaux de Terre-Neuve et du Labrador en 2011.

Circulation de l’eau

La circulation de l’eau dans les océans du Canada est complexe. Les régimes atmosphériques varient dans le temps et modifient naturellement la circulation des eaux océaniques. L’eau des océans se déplace à la fois horizontalement (courants océaniques) et verticalement dans la colonne d’eau (figure 2 : Remontée d’eau). Ces mouvements sont influencés par la façon dont les océans interagissent avec l’atmosphère et la glace de mer. Les changements climatiques peuvent influencer la circulation des eaux océaniques – notamment modifier les régimes de remontée d’eau, les courants, la stabilité verticale des couches de l’océan (stratification) et le niveau de la mer (figure 3 : Le niveau de la mer change). Les régimes de circulation de l’eau présentés à la figure 1 offrent une vue d’ensemble des courants à la surface des océans autour du Canada.

L’état des océans du Canada

La hausse des températures, le ruissellement d’eau douce accru et la diminution de la glace de mer modifient les régimes de circulation des océans du Canada. Le réchauffement des eaux de surface entraîne une diminution du mélange vertical avec les couches plus profondes de l’océan, ce qui se répercute sur l’approvisionnement en énergie et en oxygène des réseaux trophiques océaniques. Une élévation du niveau de la mer à l’échelle mondiale a des répercussions sur les zones côtières du Canada.

Dans le Pacifique

La saison de la remontée d’eau estivale dans le Pacifique commence plus tôt depuis 2005; mais elle ne se traduit pas par une plus grande productivité primaire de l’écosystème. Le long des côtes, l’apport d’eau douce du fleuve Fraser dans l’océan a augmenté au cours des 100 dernières années. Le débit de pointe du fleuve se produit également plus tôt dans l’année, bien que l’on ne connaisse pas avec certitude l’influence que ces changements peuvent avoir sur les écosystèmes voisins. Les courants de marée contribuent également beaucoup à la circulation dans de nombreux bras de mer et fjords côtiers en Colombie-Britannique, mais ne subissent pas directement l’influence des changements climatiques.

Dans l’Arctique

La remontée d’eau dans les eaux côtières a augmenté dans la partie occidentale de l’Arctique canadien en raison d’une rotation constante dans le sens horaire des eaux de surface loin au large. Dans la zone hauturière, l’océan est devenu plus résistant au mélange, car la stratification a été renforcée par l’accumulation d’eau douce et par le réchauffement de la surface de la mer dans les zones libres de glace en été. Les changements dans les tempêtes et les vents ont également des effets plus importants sur les rivages, car les vagues de tempête sont moins entravées par la glace de mer.

Dans l’Atlantique

L’augmentation de la stratification dans l’Atlantique, qui réduit le mélange des eaux de surface et des eaux profondes, a été liée au réchauffement des températures de la surface de la mer et à l’augmentation du ruissellement d’eau douce. L’eau qui entre dans le golfe du Saint-Laurent est un mélange des eaux du Gulf Stream provenant du sud et des eaux du Labrador arrivant du nord. Ces dernières années, le Gulf Stream, plus chaud, a eu une plus grande influence que le courant plus frais du Labrador, ce qui a donné des eaux plus chaudes et des concentrations en oxygène plus faibles, et ainsi modifié les conditions de l’habitat dans les parties plus profondes du golfe du Saint-Laurent. L’augmentation du niveau de la mer est variable dans l’Atlantique, les niveaux baissant dans certaines régions (2 mm par an) et augmentant dans d’autres (2 à 4 mm par an).

Infographie : La remontée d’eau

Figure 2 : La remontée d’eau, c’est-à-dire la circulation physique des eaux profondes riches en nutriments vers la surface de l’océan, est un processus important qui soutient la croissance du phytoplancton et des réseaux trophiques en haute mer.

À l’étude : Surveillance du climat des océans

La collecte de renseignements sur le climat des océans pour détecter les changements dans l’environnement nécessite des mesures précises des caractéristiques de l’eau dans toute la colonne d’eau et à différentes périodes de l’année. Au Canada, des programmes de surveillance océanographique sont menés à intervalles réguliers pour fournir des enregistrements à long terme des conditions physiques, chimiques et biologiques des eaux océaniques.

La surveillance des océans fait appel à des méthodes d’équipement ancré et à bord de navires, telles que les amarrages, les rosettes et les filets à plancton, ainsi qu’à des technologies plus récentes comme la télédétection, les bouées océanographiques et les planeurs. L’intégration de la technologie satellitaire pour observer la surface de la mer avec un système de flotteurs Argopour pour observer la colonne d’eau a permis de faire progresser considérablement le nombre et la précision des mesures océanographiques au Canada dans le temps (voir Comment se fait l’apprentissage, figure 12 : Technologies d’échantillonnage des océans).

Infographie : Le niveau de la mer change

Figure 3 : Le niveau global de la mer s’élève. L’importance et la direction de la variation du niveau de la mer changent près du littoral canadien en raison de l’influence des processus géologiques locaux.

Le niveau de la mer augmente à l’échelle mondiale en raison de l’apport accru d’eau douce provenant de la fonte des glaciers et des calottes glaciaires, ainsi que de l’expansion des eaux océaniques qui se réchauffent. L’élévation du niveau des océans peut éroder les côtes, dégrader les habitats océaniques tels que le varech et la zostère marine, inonder les terres et endommager les bâtiments et les quais pendant les tempêtes.

L’élévation du niveau de la mer est un phénomène complexe, car il varie considérablement d’un littoral à l’autre du Canada, surtout en raison de processus géologiques localisés tels que la dérive des continents et l’ajustement postglaciaire. Par exemple, sur la côte ouest de l’île de Vancouver, les forces tectoniques font monter le niveau des terres plus rapidement que l’élévation du niveau de la mer au niveau mondial, ce qui entraîne une baisse du niveau de la mer à l’échelle locale. Le niveau de la mer baisse également dans certaines parties de l’Arctique, comme dans la baie d’Hudson, car les terres s’élèvent en réaction au retrait de la dernière glace de glacier. Par ailleurs, l’élévation du niveau de la mer est plus rapide que la moyenne dans la région d’Halifax, où le niveau de la terre baisse.

Chimie de la mer

La chimie de la mer (c’est-à-dire la quantité d’oxygène, de dioxyde de carbone et de nutriments dissous dans les océans) est fondamentale pour la santé des écosystèmes marins. Cependant, elle est modifiée sous l’effet des changements climatiques et des activités humaines. Les océans du monde absorbent l’excès de chaleur et de dioxyde de carbone de l’atmosphère qui peuvent avoir de graves conséquences biologiques dans l’environnement marin. Les concentrations croissantes en dioxyde de carbone dans l’atmosphère réagissent avec l’eau de mer, entraînant une acidification des océans (figure 4 : Effets biologiques des eaux acidifiées) et la combinaison d’une plus faible teneur en oxygène dissous dans des eaux plus chaudes et d’un mélange réduit provoque une perte d’oxygène également dans les couches profondes des océans (voir À court d’oxygène). Les nutriments tels que l’azote, le phosphore et la silice sont nécessaires pour soutenir le réseau trophique marin, mais des quantités excessives de certains de ces nutriments ajoutés par les activités humaines peuvent nuire à la qualité de l’eau. Pour finir, l’acidification, les faibles niveaux d’oxygène, l’excès de nutriments et le réchauffement des eaux peuvent se combiner et causer de graves problèmes aux écosystèmes marins.

L’état des océans du Canada

L’acidité a augmenté dans tous les océans du Canada. Les niveaux d’oxygène diminuent dans les eaux du Pacifique et de l’Atlantique – à certains endroits plus qu’à d’autres. L’apport d’un excès de nutriments crée une pollution sur certaines côtes et rend les écosystèmes plus productifs dans d’autres parties des océans.

Dans le Pacifique

Les eaux du Pacifique Nord sont naturellement pauvres en oxygène par rapport aux autres océans parce que les eaux de subsurface ne peuvent atteindre la surface pour obtenir plus d’oxygène de l’atmosphère par les modèles de circulation océanique. Les eaux pauvres en oxygène du Pacifique Nord forment une « zone d’oxygène minimum » entre approximativement 500 m et 2 000 m. La plage de profondeurs de cette zone s’est élargie sur les 60 dernières années avec une réduction de 15 % de l’oxygène. Ce manque d’oxygène constitue une menace pour certains animaux marins, mais peut être lié au plus grand nombre de méduses observées. L’acidification croissante des océans a également été observée dans le Pacifique Nord au cours des 25 dernières années et est préoccupante pour les espèces des fjords côtiers qui sont sensibles à ces changements. Les conchyliculteurs de la mer des Salish signalent les effets néfastes de l’acidification des océans, en particulier sur les stades larvaires des espèces de mollusques.

Dans l’Arctique

La force et la superficie de l’acidification dans l’Arctique augmentent à mesure que les eaux naturellement acides du Pacifique continuent de se déverser dans l’océan Arctique. En raison de l’acidité de ces eaux, les gastéropodes volants (ptéropodes) du golfe Amundsen présentent des taux élevés de coquilles endommagées. L’acidification des eaux océaniques peut se produire dans tout l’Arctique canadien à différentes périodes de l’année, mais on en ignore les tendances pour la plupart des endroits. La couche d’eau du Pacifique dans l’Arctique est également importante pour l’apport de nutriments au réseau trophique. La remontée d’eau est un processus clé pour amener l’eau riche en nutriments du Pacifique ou d’autres couches plus profondes à la surface éclairée par le soleil. Les changements de la glace de mer et des températures influent sur le lieu et la période où les nutriments sont disponibles pour la base du réseau trophique.

Dans l’Atlantique

L’acidité des eaux océaniques dans certaines parties de la côte atlantique augmente à un rythme de 4,5 à 8,8 % par décennie. Cette menace peut être particulièrement grave pour les espèces à carapace dure. Par exemple, des expériences en laboratoire montrent que l’acidification des océans peut aggraver le taux de mortalité des stades juvéniles du homard d’Amérique et entraver leur croissance et leur développement. Dans l’estuaire maritime du Saint-Laurent, les records de températures chaudes au fond, les nutriments supplémentaires provenant des activités humaines et la réduction de l’oxygène ont amplifié la menace posée par l’acidification. Le nitrate des eaux profondes, un nutriment nécessaire pour alimenter la base des réseaux trophiques, était bien en dessous des niveaux moyens à long terme dans de nombreuses parties de l’Atlantique Nord-Ouest entre 2012 et 2016.

Infographie : Les effets biologiques des eaux acidifiées

Figure 4 : Effets observés de l’acidification des océans sur la vie marine dans les trois océans du Canada.

Faits saillants : À court d’oxygène

L’oxygène est un indicateur clé de la santé des écosystèmes. Le réchauffement et la stratification des eaux océaniques peuvent abaisser les niveaux d’oxygène à des niveaux créant un stress important pour de nombreuses formes de vie océaniques (hypoxie). L’activité humaine peut également faire baisser le niveau d’oxygène dans les océans.

Les apports excessifs d’azote et de phosphore provenant des engrais utilisés en agriculture, de l’évacuation des eaux usées et du ruissellement urbain alimentent la croissance des algues dans les zones côtières, provoquant d’importantes efflorescences algales à la surface de l’eau. Privées de la lumière du soleil par les fleurs d’eau ainsi formées, les plantes situées dans les eaux profondes meurent et se décomposent. Les fleurs d’eau coulent ensuite au fond de la mer, où elles sont consommées par des microbes qui extraient l’oxygène de l’eau. Des températures de l’eau élevées aggravent le problème en accélérant la croissance des algues et le rythme auquel les microbes se nourrissent de la matière végétale.

Aujourd’hui, on observe des signes inquiétants d’aggravation de l’hypoxie dans certaines zones des océans Pacifique et Atlantique du Canada. Les eaux situées à plus de 200 m sous la surface du nord-est de l’océan Pacifique sont particulièrement pauvres en oxygène, formant une zone d’oxygène minimum entre 500 m et 2 000 m sous la surface de l’océan. Avec un réchauffement plus important, la zone s’est étendue verticalement. Dans l’Atlantique, les conditions de faible teneur en oxygène dans les eaux profondes de l’estuaire du Saint-Laurent existent depuis 1984 et ont persisté avec l’augmentation de l’influence des eaux pauvres en oxygène dissous du Gulf Stream et les niveaux accrus de nutriments dus au ruissellement terrestre.

Habitats

L’activité humaine et les changements climatiques ont des effets sur tous les habitats océaniques, des eaux côtières aux eaux profondes du large et partout entre les deux.

Les habitats marins du Canada comprennent des rivages rocheux, des monts sous-marins, la glace de mer, des polynies et bien d’autres encore, qui abritent tous une grande diversité d’écosystèmes et d’espèces. La vie marine dépend d’habitats sains – des endroits dans l’océan qui peuvent fournir aux organismes vivants des conditions optimales pour leur croissance, leur survie et leur reproduction. Des côtes au large, des eaux peu profondes aux grands fonds, l’habitat est constitué par une grande variété d’environnements, de conditions océaniques et même d’espèces marines elles-mêmes. Cependant, les activités humaines et les changements climatiques dégradent les écosystèmes et nuisent à leurs habitants. Dans certains cas, plusieurs menaces ont été décrites (figure 5 : Les habitats océaniques du Canada, de la surface au fond de la mer).

Infographie : Les habitats océaniques du Canada, de la surface au fond de la mer

Figure 5 : Les trois océans du Canada abritent une grande diversité d’habitats qui soutiennent une abondante vie marine. Ces habitats subissent un stress croissant en raison des changements climatiques et des activités humaines.

Habitats littoraux

Le paysage marin côtier du Canada présente une grande diversité de milieux marins : estuaires, rivages rocheux, marais salés, forêts de varech, vasières, herbiers de zostère et glace de mer attachée à la terre. Les habitats de sable et de vase situés juste en dessous de la laisse de marée haute côtière abritent des vers, des mollusques et des petits crustacés, une nourriture importante pour les poissons et les oiseaux de mer. Les mollusques et crustacés récoltés dans ces habitats soutiennent également les pêches locales commerciales, récréatives et de subsistance. Les herbiers de zostère et les forêts de varech forment un habitat tridimensionnel le long des côtes qui offre une alevinière protégée pour les poissons – un endroit sûr où les jeunes poissons peuvent se nourrir et croître.

L’état des océans du Canada

Le développement commercial et industriel ainsi que les activités récréatives dégradent certains habitats côtiers. Les répercussions des changements climatiques, tels que l’élévation du niveau de la mer, l’intensification des ondes de tempête et la fonte des terres gelées, peuvent provoquer l’érosion des côtes. De nombreux estuaires du Canada souffrent d’une augmentation des niveaux de nutriments provenant du ruissellement terrestre qui entraîne des proliférations excessives d’algues et une perte de lumière et d’oxygène pour les plantes et les animaux qui vivent au fond de la mer. Les espèces envahissantes dans les eaux du Pacifique et de l’Atlantique continuent de menacer certains habitats côtiers. Ces influences sur la côte peuvent également créer des conditions de vie moins favorables pour de nombreuses espèces marines qui dépendent de ces habitats.

Dans le Pacifique

Les expansions des aires de répartition des espèces envahissantes dans le Pacifique, favorisées par le réchauffement climatique, ont des effets négatifs sur les habitats et les espèces qu’ils soutiennent. Par exemple, on continue de découvrir le crabe vert envahissant, établi dans des zones du Pacifique, dans de nouvelles régions adjacentes. De grands groupes de crabes verts ont endommagé une partie importante de l’habitat des zostères et ont nui aux espèces animales qui y vivent. Le manque d’oxygène dans le bras de mer Saanich a eu un effet négatif sur l’abondance d’espèces de crevettes commerciales à leur profondeur côtière de prédilection.

Dans l’Arctique

Le dégel et l’effondrement des falaises gelées et la diminution de la protection des côtes par la glace de mer modifient les zones côtières de l’Arctique canadien. L’érosion menace des habitations et des sites historiques dans l’ouest de l’Arctique et ajoute des sédiments et des nutriments à l’océan côtier, avec des conséquences inconnues sur la vie marine. Les habitats littoraux vierges sont fortement menacés par l’augmentation de l’activité humaine, comme le transport maritime qui facilite l’introduction d’espèces envahissantes.

Dans l’Atlantique

L’augmentation des niveaux de nutriments dans les estuaires de l’Atlantique entraîne une perte de qualité de l’habitat; dans le golfe du Saint-Laurent, les espèces vivant dans les battures intertidales et les habitats de zostère ont décliné. Dans la zone littorale, les varechs qui aiment les eaux froides sont confrontés à une double menace : le réchauffement des eaux et la présence d’un invertébré bryozoaire envahissant, le membranipore. À certains endroits, des forêts entières de varech ont été détruites et des algues opportunistes, comme l’envahissante voleuse d’huîtres, ont pu s’établir. En outre, les crabes européens envahissants ont endommagé les herbiers de zostères dans certaines zones. Les engins de pêche qui entrent en contact avec le fond perturbent certains habitats des fonds marins, nuisant aux communautés marines qui en dépendent.

Habitats de la glace de mer

Près de la surface de la colonne d’eau, dans les océans Arctique et Atlantique, la glace de mer soutient les plantes et les animaux marins. Des algues glaciaires prolifèrent dans la glace de mer, nourrissant le zooplancton brouteur; les phoques et les morses se reposent et mettent bas sur la glace, et les ours polaires se déplacent sur la glace de mer pour chasser les poissons et les phoques. La glace de mer est également un élément fondamental de la culture et de la sécurité alimentaire des Inuits, et a une incidence sur les collectivités côtières de l’Atlantique. Les modifications de la glace de mer peuvent avoir un effet sur tous les animaux marins qui vivent ou se reproduisent sur la glace ou autour de celle-ci (figure 6 : Habitats de la glace de mer), de même que sur les eaux libres et les habitats des fonds marins situés en dessous. Les polynies sont des milieux uniques et importants d’eaux libres entourées de glace de mer. Ces zones libres de glace peuvent abriter une abondante vie marine soutenue par une forte productivité primaire – en particulier les mammifères et les oiseaux marins.

L’état des océans du Canada

L’habitat de glace de mer au Canada change rapidement : perte et amincissement de la glace de mer, prédominance de la glace de mer saisonnière par rapport à la glace pérenne, réduction de son étendue et changements dans la période de formation de la glace de mer annuelle. Ces changements sont liés aux changements climatiques et se répercutent sur l’ensemble de l’écosystème, comme sur les animaux marins qui vivent ou se reproduisent sur la glace de mer ou à proximité. Les conditions de la glace de plus en plus dangereuses ou peu fiables limitent également les endroits et les périodes où les Inuits peuvent se déplacer et chasser sur la glace.

Dans l’Arctique

Dans tout l’Arctique canadien, la période de couverture de glace se raccourcit : la glace fond ou se dégage plus tôt et gèle plus tard. Dans certaines régions, la vieille glace ne domine plus les eaux de mer ouverte de l’océan Arctique, et la nouvelle banquise plus mince est plus facilement poussée par le vent. Autour des nombreuses îles du Grand Nord canadien, il reste de la vieille glace qui peut être à certains endroits aussi épaisse que celle mesurée il y a près de quatre décennies dans l’océan Arctique. Une zone unique avec un habitat de vieille glace de mer a été établie comme zone de protection marine afin de protéger les écosystèmes de glace importants et les espèces associées à la glace (voir Tuvaijuittuq).

Dans l’Atlantique

La quantité de glace de mer était généralement inférieure à la moyenne au cours de la dernière décennie. Les mauvaises conditions de la glace de mer ont entraîné la perte d’aires de reproduction pour les phoques gris dans le golfe du Saint-Laurent. En revanche, la diminution de l’étendue de la glace de mer et le déplacement des proies vers le nord se sont traduits par des visites plus fréquentes des épaulards dans les zones septentrionales de l’Atlantique et dans l’Arctique. Dans les zones côtières de Terre-Neuve, l’augmentation de la couverture de zostère a été liée à une diminution des dommages causés par la glace en raison de la réduction des conditions de la glace de mer en hiver.

Infographie : Changements dans l’habitat de glace de mer

Figure 6 : Les principaux événements de la vie des espèces dans les océans Arctique et Atlantique sont influencés par les nombreux changements dans la présence, la période et l’épaisseur de la glace de mer.

À l’étude : Explorer les habitats

Les habitats littoraux sont souvent explorés depuis le rivage ou à partir de petites embarcations avec du matériel de faible dimension comme des filets et des capteurs, ou par des plongeurs, afin de recueillir de l’information. On utilise aussi des drones aériens pour obtenir de larges images ou vidéos aériennes afin de mesurer des habitats tels que la zostère et le varech. Quand il s’agit d’explorer les habitats hauturiers et des grands fonds, de grands navires capables de soutenir la recherche collaborative ainsi que du matériel spécialisé sont nécessaires. Par exemple, les véhicules sous-marins téléguidés (VTG) sur les navires de recherche permettent d’explorer des habitats rarement vus auparavant. Les technologies de télédétection telles que le sonar multifaisceaux, le LiDAR (détection et télémétrie par ondes lumineuses) embarqué et les satellites d’observation de la terre peuvent permettre de cartographier et d’étudier des habitats tels que les eaux de surface, le plancher océanique et la glace de mer (voir Comment se fait l’apprentissage, figure 12 : Technologies d’échantillonnage des océans).

Points saillants : Tuvaijuittuq

Tuvaijuittuq, qui signifie « l’endroit où la glace ne fond jamais » en inuktitut, est une zone spéciale d’habitat de glace de mer située au large de la côte nord-ouest de l’île d’Ellesmere au Nunavut. Cette zone d’importance écologique et culturelle est une région unique de vieille glace de mer persistante, qui a survécu à au moins un deuxième été sans fondre complètement. La quantité d’habitats de vieille glace épaisse a rapidement diminué dans tout l’Arctique et la vieille glace restante est beaucoup plus mince qu’auparavant. La glace de mer de plus de quatre ans représentait 1 % de la banquise de l’océan Arctique au printemps 2019, contre 33 % en 1985. La vieille glace restante est en grande partie confinée à Tuvaijuittuq, où elle devrait également persister dans les décennies à venir.

Tuvaijuittuq peut donc être un habitat important pour les espèces dépendantes de la glace, notamment les phoques, les morses et les ours polaires. De grandes questions subsistent quant à l’intégrité des écosystèmes arctiques sans la présence d’un habitat de glace de mer tout au long de l’année (voir la figure 6 : Changements dans l’habitat de glace de mer). En 2019, le Canada a désigné Tuvaijuittuq comme zone de protection marine afin de protéger la plus vieille glace de mer de l’océan Arctique ainsi que ses habitats, écosystèmes et espèces associés.

Habitats hauturiers

Les habitats hauturiers comprennent les milieux pélagiques et la colonne d’eau de la haute mer, ainsi que les habitats en eaux profondes. Malgré leurs conditions profondes et souvent difficiles, les environnements marins du large et des grands fonds abritent une étonnante diversité d’habitats qui soutiennent des organismes inhabituels. Les monts sous-marins peuvent s’élever à plus de 1 000 m du fond de la mer, formant des points névralgiques du point de vue de la biodiversité. Les cheminées hydrothermales, les suintements froids et les volcans de boue sont des endroits où des fluides chauds et riches en substances chimiques s’échappent du plancher océanique, soutenant parfois des communautés luxuriantes dans des environnements très rudes. Les coraux et les éponges d’eau froide protègent les petits poissons et les invertébrés des prédateurs, servant de zones d’alimentation et de lieux de repos et de protection pour les œufs (voir Conditions de vie extrêmes).

L’état des océans du Canada

L’étendue et la santé des habitats hauturiers offerts par les coraux et les éponges, les monts sous-marins et les cheminées hydrothermales au Canada ont diminué dans certaines régions en raison de perturbations physiques (pêche entrant en contact avec le fond et extraction des ressources), de la pollution et des variations du climat des océans (réchauffement des eaux). Les jardins de coraux vivants et les récifs d’éponges siliceuses sont des habitats particulièrement vulnérables, car leur croissance est lente; même lorsque la pêche entrant en contact avec le fond est interdite, il faut beaucoup de temps à ces espèces pour se rétablir. Les engins de pêche perdus ou abandonnés peuvent continuer à dégrader l’ensemble de ces habitats.

Dans le Pacifique

Le nombre de monts sous-marins canadiens identifiés dans le Pacifique a triplé ces deux dernières années; cependant, les conditions de faible teneur en oxygène ont des répercussions sur les animaux qui vivent dans ces milieux. Des relevés sous-marins ont montré que les activités humaines ont eu des effets négatifs sur la plupart des récifs d’éponges siliceuses (dont certains sont situés dans l’environnement littoral), qui sont dans un mauvais état général et sont demeurés dans cet état ces cinq dernières années. Les jardins de coraux vivants et les récifs d’éponges siliceuses sont des habitats particulièrement vulnérables, car leur croissance est lente, et leur rétablissement peut être entravé par des menaces physiques et environnementales permanentes.

Dans l’Arctique

Les coraux et les éponges d’eaux profondes et les volcans de boue sont quelques-uns des habitats hauturiers uniques des eaux de l’Arctique. Les canyons et fosses sont d’autres habitats uniques où la morue arctique adulte, le principal poisson-proie dans l’Arctique, préfère vivre; les bélugas peuvent plonger à plus de 1 000 m de profondeur pour accéder à leur proie préférée. Une vaste zone d’habitats hauturiers dans l’Arctique canadien n’a jamais été étudiée et sa biodiversité est encore inexplorée.

Dans l’Atlantique

On a identifié quarante espèces de coraux dans les eaux du Canada atlantique, bien que dans de nombreuses régions, les éponges soient l’organisme dominant sur le plan de l’abondance et de la biomasse. Les coraux et les éponges n’ont pas été entièrement documentés dans les eaux atlantiques, et on continue à découvrir de nombreuses nouvelles espèces. Le seul complexe de récifs coralliens connu au Canada atlantique vit à 300 m de profondeur sur le plateau néo-écossais et mesure plus de 1 km de long. Dans le chenal Laurentien qui prolonge le golfe du Saint-Laurent, on trouve des groupes denses de pennatules, qui forment des habitats pour d’autres espèces. Les coraux et les éponges d’eaux profondes sont très vulnérables aux activités humaines comme la pêche et l’extraction des ressources. Les coraux peuvent également être vulnérables aux effets des changements climatiques, car certaines espèces ne peuvent survivre qu’à certaines températures.

Points saillants : Conditions de vie extrêmes

Parmi les habitats hauturiers uniques des océans canadiens, on trouve des endroits où les conditions chimiques et physiques sont considérées comme extrêmes par rapport aux autres habitats des grands fonds. Les cheminées hydrothermales et les suintements froids dans l’océan Pacifique et les volcans de boue dans l’océan Arctique sont des sites où des gaz s’échappent du plancher océanique. L’habitat chimique qui en résulte fournit de l’énergie aux microbes – la base du réseau trophique – qui survivent en utilisant des substances chimiques (chimiosynthèse) plutôt que la lumière du soleil (photosynthèse).

Dans les profondeurs de l’océan Pacifique, le mouvement des plaques tectoniques a donné naissance à des centaines de cheminées sur le fond marin d’où des panaches d’eau surchauffée et enrichie en minéraux peuvent s’élever de quelque 200 m-300 m dans la colonne d’eau. Certaines forment de grandes « cheminées » cylindriques composées de minéraux solidifiés provenant des panaches. Les cheminées hydrothermales abritent l’une des plus grandes diversités de microbes au monde. Celles de la crête de Juan de Fuca comptent environ 60 espèces animales distinctes, dont 12 n’existent nulle part ailleurs dans le monde. Les microbes soutiennent la vie autour des cheminées, comme organismes autonomes ou qui vivent dans le corps d’autres animaux, comme les grands vers tubicoles.

Dans la partie canadienne de la mer de Beaufort, des volcans de boue actifs déversent de la boue chaude et du méthane dans les eaux de l’océan Arctique. En 2013, on a découvert des vers tubicoles qui utilisent la chimiosynthèse pour survivre vivant sur ces volcans de boue. Ils forment la première et la seule communauté chimiosynthétique connue dans les eaux de l’Arctique canadien.

Dans les eaux profondes, à 200 km au large de la côte est de la Nouvelle-Écosse, se trouve le Gully, un canyon océanique profond qui s’étend sur deux kilomètres sous la surface de l’océan, qui est le plus grand canyon sous-marin de l’ouest de l’Atlantique Nord et l’une des zones de protection marine du Canada. Ici, des coraux d’eau froide – dont certains ont plus de 1 000 ans – occupent les parois et les pentes du canyon. Cet habitat spectaculaire est un point névralgique de la diversité pour tous les niveaux de vie océanique, des minuscules ophiures à une population en voie de disparition de baleine à bec commune.

Espèces

L’évolution du nombre, de l’aire de répartition et de la croissance des plantes et des animaux dans l’océan est difficile à prévoir

Les changements dans l’environnement océanique modifient l’abondance (nombre) et la répartition (aire de répartition) du phytoplancton, du zooplancton, des plantes, des invertébrés, des poissons (figure 7 : Poissons en mouvement), des mammifères marins, des oiseaux de mer et des tortues de mer. La réaction des plantes et des animaux à la variabilité climatique saisonnière et interannuelle dépend de leur capacité d’adaptation. En outre, les activités humaines telles que la pêche, le transport maritime et l’extraction des ressources peuvent avoir une incidence directe sur l’abondance et la répartition des espèces, ce qui peut rendre certaines espèces plus vulnérables aux dégradations de l’environnement. Certains groupes d’espèces, comme de nombreuses espèces de crevettes du Canada, ont une histoire complexe de réchauffement des eaux, de surpêche et de prédation accrue (figure 8 : Que se passe-t-il avec les crevettes?). On ignore encore les tendances de l’abondance dans le temps ou de la répartition de bien des espèces.

Infographie : Poissons en mouvement

Figure 7 : De nouvelles données montrent comment les poissons qui vivent dans les océans du Canada arrivent et se déplacent vers différentes zones. La répartition de nombreuses espèces de poissons du Canada change en réaction à l’évolution des conditions environnementales dans les trois océans.

Infographie : Que se passe-t-il avec les crevettes?

Figure 8 : Les crevettes sont importantes pour l’industrie de la pêche. Le réchauffement des eaux, la surpêche et l’augmentation de la prédation sont les principaux facteurs influençant l’abondance des crevettes dans les océans Pacifique et Atlantique.

À l’étude : Étude des espèces

La surveillance de la santé des espèces est un élément important des sciences océaniques. Cette activité consiste à comprendre où les espèces vivent, où et quand elles se reproduisent, leur croissance, leur santé et leur taux de mortalité, le nombre de leurs individus et leurs modèles de déplacements. Plusieurs approches de recherche distinctes permettent de recueillir des renseignements sur les invertébrés, les poissons, les mammifères marins et les oiseaux de mer. Les traits de plancton, la pêche plurispécifique au chalut et les relevés hydro-acoustiques et vidéo sont des approches couramment appliquées pour étudier les écosystèmes. Ces relevés sont effectués à partir de navires de recherche et servent à surveiller la répartition et l’abondance du plancton, des invertébrés et des poissons. Les mammifères marins et les oiseaux de mer sont observés depuis la terre, le ciel et la mer, et sont même suivis par des étiquettes satellites. L’écoute des sons émis sous l’eau est un moyen important de suivre les populations de baleines. On étudie les espèces envahissantes et leur propagation en déployant des plaques collectrices ou des pièges en fonction de l’espèce. La surveillance annuelle des espèces fournit les données à long terme nécessaires pour conserver et protéger la vie marine (voir Comment se fait l’apprentissage, figure 12 : Technologies d’échantillonnage des océans).

Tendance des espèces

La vie marine peut réagir positivement ou négativement à l’évolution des conditions des écosystèmes, selon le contexte. Les populations des espèces peuvent augmenter ou se stabiliser après que les espèces se déplacent dans de nouveaux milieux pour profiter d’un habitat plus propice. Les espèces peuvent également bénéficier d’une plus grande disponibilité de nourriture favorisant la croissance de leur population. Les efforts de conservation, tels que la réduction de la récolte commerciale ou la protection de l’habitat, peuvent produire d’autres changements positifs. Par ailleurs, la poursuite des activités humaines ou les effets des changements climatiques sur l’écosystème peuvent avoir des répercussions négatives sur les espèces marines. Si un habitat devient plus stressant ou offre moins de nourriture, la santé, le nombre d’individus ou l’aire de répartition d’une espèce décline. Il peut être difficile de comprendre la répartition et l’abondance des espèces marines dans des écosystèmes en constante évolution.

L’état des océans du Canada

Les changements climatiques et les activités humaines sont les principales pressions qui s’exercent sur les écosystèmes marins du Canada. Certaines populations d’invertébrés, de poissons, de mammifères marins et d’oiseaux de mer augmentent ou se stabilisent dans le temps et d’autres diminuent. Des animaux qui sont normalement des visiteurs occasionnels dans les océans du Canada sont observés de plus en plus souvent, et des espèces auparavant inconnues font maintenant leur apparition. Les efforts de gestion ont permis à certaines populations de se rétablir, mais d’autres continuent à décliner. Les répercussions des changements climatiques créent des défis nouveaux et complexes pour les individus et les populations. On ignore les tendances des populations de nombreuses espèces marines au Canada, en particulier dans l’Arctique où les informations sur un certain nombre d’espèces sont rares.

Tendances à la hausse et stables

Dans le Pacifique

Les récentes vagues de chaleur marines sans précédent dans le Pacifique ont contribué à modifier la répartition et l’abondance de certaines espèces marines, comme les pyrosomes. Ces invertébrés tubulaires flottants, que l’on ne trouve normalement que jusqu’en Californie, tolèrent de faibles taux d’oxygène et étaient abondants le long des plages de la Colombie-Britannique en 2017. Les températures plus élevées de l’océan ont joué un rôle également dans l’augmentation de l’abondance des anchois du Pacifique qui migrent et frayent dans les eaux canadiennes du Pacifique, ainsi que dans l’observation de balistes, d’espadons et de grands dauphins ces dernières années. D’autres espèces ont affiché des tendances variables ou stables. Les tendances du hareng du Pacifique, un important poisson fourrage, varient selon les régions, et l’abondance de nombreuses populations de saumon décline en Colombie‑Britannique, avec quelques exceptions (voir Une histoire de saumon). L’abondance des phoques communs dans le détroit de Georgia a augmenté après leur protection au début des années 1970, puis s’est stabilisée au milieu des années 1990. Les populations d’otaries de Steller se sont également rétablies et continuent d’augmenter en Colombie-Britannique. Après l’épuisement des stocks par la chasse commerciale, le nombre de rorquals à bosse continue d’augmenter et leur répartition s’est étendue au cours des dix dernières années. Les populations d’épaulards résidents du nord et d’épaulards de Bigg (migrateurs) augmentent aussi.

Dans l’Arctique

Le nombre de saumons du Pacifique a récemment augmenté dans le nord de leur aire de répartition et ils sont maintenant capturés dans des filets qui ciblent l’omble chevalier (voir Une histoire de saumon). Dans l’Arctique, on sait que le nombre de baleines boréales est à la hausse et que l’espèce se rétablit de la chasse historique à la baleine. La diminution de la glace a permis aux bélugas et aux épaulards de passer plus de temps dans la baie d’Hudson (voir Histoires de baleines). Des espèces visées par la pêche commerciale, notamment la crevette et le flétan du Groenland, sont actuellement stables, tout comme plusieurs stocks exploités d’omble chevalier et de Dolly Varden.

Dans l’Atlantique

Les poissons exotiques d’eau chaude, tels que le saint-pierre, le malarmat à dix aiguillons, le Xenolepidichthys dalgleishi et le sanglier à corps élevé, sont de plus en plus fréquents sur le plateau néo‑écossais. Le homard d’Amérique, qui préfère les températures plus chaudes, a augmenté en abondance depuis dix ans dans la plupart des zones et étend sa répartition aux eaux plus profondes du plateau néo‑écossais et au nord du golfe du Saint-Laurent. D’autres espèces d’eau chaude, comme le merlu argenté, ont modifié leur répartition et accru leur abondance dans certaines régions en réaction au réchauffement des températures. La fermeture de la grande pêche de la morue franche en 1992 a réduit les risques d’empêtrement des oiseaux de mer dans les filets maillants, ce qui a permis la croissance de la population de certaines espèces comme le guillemot marmette et le macareux moine. Certaines populations de poissons auparavant touchées par la surpêche, comme la morue franche et la plie canadienne, ont connu de modestes augmentations dans certaines zones, mais sont loin de leurs abondances historiques. D’autres poissons, comme le flétan de l’Atlantique et le sébaste de l’Atlantique, ainsi que des mammifères, comme les rorquals à bosse, les phoques gris, les phoques du Groenland et les phoques annelés, sont de plus en plus nombreux. D’après les observations, les populations de tortues luths seraient stables, mais la taille et les tendances actuelles de la population restent floues.

Faits saillants : Une histoire de saumon

Les saumons de l’Atlantique et du Pacifique passent leurs premières années dans des cours d’eau et des lacs d’eau douce, puis une ou plusieurs années dans l’océan, avant de revenir en eau douce pour frayer à l’âge adulte. Les changements dans ces environnements et d’autres facteurs, notamment la pêche, les écloseries, les maladies, les polluants et les nouvelles espèces envahissantes, ont eu un impact collectif sur les populations de saumons.

Le réchauffement des océans et les vagues de chaleur marines ont des répercussions sur les processus environnementaux et biologiques dans l’océan. Ces changements contribuent au déclin des populations de saumons dans les océans Atlantique et Pacifique. Les années où l’océan est plus chaud sont de plus en plus fréquentes, ce qui a entraîné des changements en faveur d’espèces moins nutritives de zooplancton, lequel constitue une importante source de nourriture pour le saumon. Ces changements à la base du réseau trophique du saumon pourraient expliquer en grande partie les tendances observées pour de nombreuses populations de saumons.

La situation des saumons emblématiques du Canada est différente dans les trois océans : 

Faits saillants : Histoires de baleines

L’étude des populations de baleines du Canada permet de mieux comprendre leur comportement et leurs déplacements.

Dans l’océan Atlantique, les baleines noires de l’Atlantique Nord se déplacent vers le nord dans le golfe du Saint-Laurent. Leur proie favorite, une espèce nutritive de zooplancton, y a augmenté en abondance. Mais le golfe est une zone de pêche et de navigation très fréquentée. Les baleines noires risquent aujourd’hui de plus en plus d’être tuées ou blessées après s’être empêtrées dans des engins de pêche ou avoir été heurtées par un navire.

Dans les eaux de l’est de l’Arctique, la diminution de la glace de mer a permis aux épaulards d’explorer des zones qu’ils n’avaient peut-être jamais fréquentées auparavant. Au cours des dernières décennies, les observations d’épaulards dans la baie d’Hudson ont considérablement augmenté. Comme ces épaulards s’attaquent à d’autres baleines, le narval et la baleine boréale modifient leur comportement et leur emplacement en réaction à ces prédateurs agressifs.

Certaines populations de baleines sont confrontées à des conditions environnementales et alimentaires difficiles. La population d’épaulard résident du sud au large de la côte Pacifique, qui est en voie de disparition, se trouve ainsi dans une situation critique. Elle a diminué et ne compte plus que 73 individus environ, en partie parce que le saumon chinook (qui constitue 90 % de son alimentation l’été) est en déclin dans plusieurs régions.

Tendances à la baisse

Dans le Pacifique

Plusieurs agents de stress, tels que le réchauffement des températures océaniques, la diminution de l’oxygène dissous, les changements dans le réseau trophique et les activités humaines ont eu des effets négatifs sur certaines espèces dans le Pacifique. Les crevettes océaniques sont en déclin au large des côtes de l’île de Vancouver en raison des eaux chaudes et de la prédation, et l’abondance des espèces commerciales de crevettes océaniques dans le bras de mer Saanich a souffert des faibles niveaux d’oxygène. Les populations d’eulakane ont également connu des déclins à long terme dans de nombreux fleuves, de la Californie à l’Alaska. La population de sardine du Pacifique est faible en Colombie‑Britannique et n’est pas encore revenue à ses niveaux antérieurs. Le nombre de saumons chinooks est en déclin, et les populations de saumon rouge et de saumon coho se portent mal sous les latitudes méridionales (voir Une histoire de saumon). Le nombre d’épaulards résidents du sud est faible et devrait continuer à diminuer dans les conditions actuelles (voir Histoires de baleines).

Dans l’Arctique

On ignore en général les tendances à long terme des mammifères marins, des poissons et de leurs proies pour de nombreuses espèces de l’Arctique canadien. Les abondances peuvent fortement décliner une année (comme la morue arctique en 2014) et sembler s’être rétablies la suivante. Cependant, on a vu que les événements de réchauffement extrême ont un effet sur les populations, comme en 2010, où une année de faible englacement combinée à des températures chaudes a entraîné une baisse du taux de survie des petits chez le phoque annelé dans la baie d’Hudson.

Dans l’Atlantique

La surexploitation de nombreuses espèces a réduit leurs populations et beaucoup d’entre elles ne se sont pas relevées de niveaux historiquement bas. L’abondance du hareng de l’Atlantique (golfe du Saint‑Laurent et ouest du plateau néo-écossais) et du maquereau (tout l’Atlantique Nord) a diminué. Des espèces comme le rorqual bleu, la baleine noire de l’Atlantique Nord, le béluga du Saint-Laurent, le capelan (plateaux de Terre-Neuve et du Labrador) et la crevette nordique ne semblent pas se rétablir. Le crabe des neiges, qui préfère des températures d’eau plus froides, a subi les effets du réchauffement des eaux profondes, ce qui a contribué à de récents déclins dans certaines régions. On a observé une diminution de l’abondance d’oiseaux de mer se nourrissant en surface, comme le Goéland argenté et la mouette tridactyle, attribuable entre autres à la disponibilité réduite de poissons-proies de qualité.

Réseaux trophiques

Les sources de nourriture – et les périodes où elles sont disponibles dans les écosystèmes – changent, ce qui se répercute sur la vie marine

Les réseaux trophiques marins représentent des liens entre les organismes vivants dans l’océan. La plupart commencent avec le phytoplancton dans les eaux de fond (plantes unicellulaires microscopiques, protistes et algues), qui est mangé par le zooplancton (petits animaux qui dérivent ou nagent dans l’eau), qui à son tour est consommé par les poissons et les invertébrés, lesquels seront consommés par les mammifères marins. En raison de ces liens, les changements qui interviennent dans une partie du réseau trophique ont des répercussions sur l’état et la santé du reste du réseau. La subsistance et le bien‑être de nombreuses personnes des collectivités côtières du Canada dépendent des réseaux trophiques marins. Les changements des réseaux trophiques marins touchent également les personnes qui en dépendent. Lorsque des modifications de l’habitat ou des conditions environnementales touchent les parties inférieures du réseau trophique, les effets se font sentir vers le haut (contrôle ascendant). Lorsque des changements se produisent au sommet du réseau trophique, comme dans l’abondance ou le comportement des prédateurs, les effets se font sentir vers le bas (contrôle descendant).

Effets ascendant

Le phytoplancton a besoin de la lumière du soleil et de nutriments pour vivre et se développer et, lorsque les conditions sont favorables, il peut se développer rapidement – proliférant au printemps, en été et à l’automne. Des changements dans la période de pointe de cette prolifération peuvent avoir un effet ascendant sur le réseau trophique (Figure 9 : Le moment est critique). Le zooplancton, groupe diversifié de copépodes, de krill, de scyphozoaires et stades larvaires de poissons et de crustacés, constitue la nourriture des poissons fourrages, de certains poissons de grande taille, des tortues et de certains oiseaux de mer et baleines. Les changements dans les communautés de zooplancton ont des répercussions sur leurs prédateurs (voir Évolution des liens dans les réseaux trophiques, figure 10 : Zooplancton). Les poissons fourrages, tels que la morue arctique, le capelan et le hareng, sont à leur tour consommés par d’autres poissons de plus grande taille ainsi que par des oiseaux et des mammifères marins (voir Les poissons fourrages au centre des réseaux trophiques.).

L’état des océans du Canada

Les types de proliférations phytoplanctoniques et le moment où elles ont lieu ont une incidence sur l’abondance, la composition, la période de prolifération et la répartition des espèces de zooplancton. En retour, une correspondance ou un décalage dans le temps entre les proliférations phytoplanctoniques et le zooplancton a un effet sur la quantité de nourriture disponible pour leurs prédateurs, tels que les poissons fourrages, les oiseaux de mer et les baleines.

Dans le Pacifique

Dans le Pacifique, les eaux profondes riches en nutriments remontent et se mélangent à la couche supérieure de l’océan, favorisant la croissance du phytoplancton et le reste du réseau trophique. Les années plus chaudes, les communautés de zooplancton sont dominées par une espèce de copépodes du sud moins nutritive et comptent moins de copépodes du nord riches en énergie. Les copépodes du sud sont considérés comme une nourriture pauvre en énergie pour les autres animaux du réseau trophique, comme les saumons juvéniles et les oiseaux de mer, car ils sont plus petits et ont une teneur énergétique plus basse. L’île Triangle, en Colombie-Britannique, abrite la plus grande colonie nicheuse de stariques de Cassin au monde; ces oiseaux de mer se développent plus rapidement lorsque leur régime alimentaire contient plus de copépodes nordiques riches en énergie. La période, ou la concordance/le décalage entre le moment où la nourriture est disponible et celui où les larves de hareng (une espèce de poisson fourrage) commencent à se nourrir joue un rôle important dans la survie de ces poissons.

Dans l’Arctique

L’amincissement de la glace de mer et la perte de glace annuelle plus précoce modifient la période des proliférations phytoplanctoniques et le type de fleurs d’eau qui en découlent. Dans certaines régions, des éléments probants indiquent que les écosystèmes marins sont en train de passer d’un réseau trophique fondé sur la glace de mer à un réseau trophique soutenu par les eaux libres. À ces endroits, une plus grande partie de l’énergie du réseau trophique provient désormais du phytoplancton plutôt que des algues qui poussent dans la glace de mer au printemps. La réaction du zooplancton et des poissons aux changements touchant la période et les caractéristiques des proliférations phytoplanctoniques dans les zones côtières et hauturières n’est pas encore bien comprise.

Dans l’Atlantique

Le mélange des eaux océaniques crée des écosystèmes marins biologiquement productifs qui favorisent la croissance et l’abondance du capelan et de ses prédateurs – la morue franche et le phoque du Groenland. Lorsque les proies ou la nourriture sont moins abondantes en raison d’un décalage des proliférations phytoplanctoniques, le nombre des poissons fourrages peut diminuer. À son tour, le déclin du capelan retarde le rétablissement de la morue qui s’en nourrit, et celui du hareng se répercute sur la santé des oiseaux de mer, comme les sternes et les macareux. Les populations d’oiseaux de mer tels que les fous de Bassan, les goélands argentés et les mouettes tridactyles se sont stabilisées ou ont diminué ces dernières années, en partie à cause d’une réduction de l’abondance et de changements de la répartition des poissons-proies de haute qualité. Les grandes densités de palourdes et de vers qui vivent dans les sédiments des battures intertidales de la baie de Fundy soutiennent la migration de millions d’oiseaux de rivage chaque année.

Infographie : Le moment est critique

Figure 9 : L’évolution des conditions océanographiques modifie la période des proliférations phytoplanctoniques au printemps – ce qui a des conséquences en cascade sur la disponibilité de la nourriture pour d’autres espèces.

Encadré : Évolution des liens dans les réseaux trophiques

Le zooplancton correspond à la première étape du transfert d’énergie de la base du réseau trophique (phytoplancton) vers ses prédateurs. Ces organismes s’alimentent dans la colonne d’eau, certains dérivant avec les courants et d’autres effectuant chaque jour des migrations entre la surface et les eaux plus profondes. Ils constituent l’une des sources de nourriture les plus abondantes de l’océan.

Source d’énergie riche en graisses et en protéines, le zooplancton sert de nourriture aux poissons fourrages, aux jeunes d’autres poissons et à certaines baleines. Les groupes de zooplancton comprennent les crustacés comme le krill et les copépodes, les stades larvaires des poissons et des mollusques et crustacés, de même que les espèces gélatineuses plus grandes comme les méduses.

Dans les océans Atlantique et Pacifique, on observe des changements importants dans l’abondance du phytoplancton et du zooplancton et la composition des espèces qui seraient dus au réchauffement des températures océaniques (voir figure 10). À mesure que les eaux de l’océan se réchauffent et que les copépodes d’eau froide sont remplacés par des espèces d’eau chaude, les poissons ont moins d’énergie à leur disposition.

Infographie : Les modifications du zooplancton nuisent à la santé et à la survie des poissons

Figure 10 : Dans les océans Atlantique et Pacifique, les changements dans la composition et l’abondance des espèces de zooplancton ont des conséquences en cascade sur les autres espèces du réseau trophique marin.

Encadré : Les poissons fourrages au cœur du réseau trophique

Les petits poissons jouent souvent un rôle central dans les réseaux trophiques pélagiques. Ils se nourrissent du plancton à la base du réseau et sont à leur tour la proie de plus gros poissons, d’oiseaux de mer et de mammifères marins. Ces poissons fourrages, comme la morue arctique, le capelan et le hareng, constituent donc un maillon essentiel du transfert d’énergie dans l’écosystème.

Le régime alimentaire des poissons fourrages va du phytoplancton, y compris les diatomées, au zooplancton, y compris les copépodes et le krill, selon l’espèce et l’âge du poisson.

L’abondance des poissons fourrages peut varier considérablement d’une zone à une autre et d’une année à une autre. Un changement marqué de leur abondance peut avoir de graves répercussions sur les réseaux trophiques et la réussite de la reproduction de leurs prédateurs.

À l’étude : Comprendre les réseaux trophiques

Pour comprendre le fonctionnement des réseaux trophiques marins complexes, les chercheurs rassemblent des informations provenant des nombreuses disciplines des sciences de la mer. Il faut ainsi combiner les données de l’océanographie physique et chimique avec les connaissances relatives aux habitats et à la biologie des plantes et des animaux, y compris des humains. Il est fondamental de savoir qui mange quoi, et quand, pour comprendre les réseaux trophiques. Une des méthodes pour trouver des informations sur l’alimentation consiste à recueillir et à analyser les contenus stomacaux afin de déterminer les liens entre les prédateurs et les proies (voir Comment se fait l’apprentissage).

Effets descendants

Des conditions environnementales plus ou moins favorables ou une pression plus ou moins forte des activités humaines telles que la pêche et la récolte peuvent avoir un impact sur les prédateurs dans les réseaux trophiques marins. À leur tour, les variations chez les prédateurs peuvent avoir des répercussions importantes sur les parties inférieures du réseau trophique, en particulier sur leurs espèces-proies immédiates. Cette réaction en chaîne est particulièrement vraie dans les relations prédateur-proie étroites où les prédateurs se nourrissent d’un seul type de proie. Les changements dans l’abondance, la répartition ou le choix des proies des prédateurs peuvent se répercuter sur les espèces‑proies, ce qui a un effet sur leur abondance et leur aire de répartition. Ces relations sont importantes et maintiennent l’équilibre dans les réseaux trophiques marins.

L’état des océans du Canada

Les relations entre les prédateurs et les proies dans les océans du Canada sont en train d’évoluer. Certaines sont devenues moins prévisibles, car elles sont influencées par la pêche ou la chasse, la perte de glace de mer ou les changements des températures. Les effets anthropiques continuent de contribuer aux changements des réseaux trophiques, tant de manière positive que négative.

Dans le Pacifique

Les crevettes océaniques sont en déclin au large de la côte ouest de l’île de Vancouver sous l’effet d’une combinaison du réchauffement des températures (un processus ascendant) et d’une prédation accrue (un processus descendant). Dans les eaux canadiennes du Pacifique, plusieurs populations de mammifères marins ont affiché de fortes tendances de rétablissement, et leur abondance accrue pourrait avoir des effets sur les réseaux trophiques. Par exemple, l’augmentation du nombre d’épaulards de Bigg observée sur la côte de la Colombie-Britannique ralentit probablement la croissance de la population de leur proie, le phoque commun, qui s’était rétabli après la fin de l’exploitation commerciale dans les années 1970. Les populations de loutres de mer, réintroduites en Colombie‑Britannique après avoir été chassées jusqu’à disparaître presque complètement, ont réussi à croître grâce à leur statut protégé et à l’abondance des invertébrés dont elles se nourrissent. Dans plusieurs régions, la croissance de la population de loutres de mer s’est ralentie, car elles ont exercé une forte pression descendante sur leurs proies invertébrées, ce qui, à son tour, a eu des effets positifs sur le varech.

Dans l’Arctique

Dans les eaux arctiques, les prédateurs s’adaptent pour consommer des aliments différents. Certains poissons et mammifères marins ont modifié leur régime alimentaire pour manger des proies plus semblables les unes aux autres, à mesure que les conditions de la glace de mer changent. On ignore si des groupes de prédateurs ayant un régime alimentaire similaire affaibliront la capacité de l’écosystème à faire face aux futurs changements environnementaux. En une seule année, le régime alimentaire des prédateurs peut changer complètement. Par exemple, dans les estomacs des bélugas récoltés près d’Ulukhaktok (mer de Beaufort) en 2014, on a trouvé surtout des poissons autres que la morue arctique à laquelle on s’attendait, ainsi que des becs de calmars.

Dans l’Atlantique

Dans le nord-ouest de l’Atlantique, le nombre de phoques gris a rebondi au cours des dernières décennies, ce qui a ralenti le rétablissement de leur proie, la morue franche, dans le sud du golfe du Saint-Laurent et ailleurs. En revanche, l’abondance des stocks de morue franche au large de la côte nord-est de Terre-Neuve a augmenté pendant la même période, malgré la présence d’une importante population de phoque du Groenland. Dans le nord du golfe du Saint-Laurent, l’augmentation de la prédation exercée par les espèces de poissons de fond comme le sébaste peut avoir contribué au déclin des populations d’invertébrés benthiques. Dans certaines zones hauturières de l’Atlantique, les tortues luths peuvent contribuer à l’équilibre de l’écosystème en consommant des méduses, un prédateur important du zooplancton et des larves de poisson.

Comment se fait l’apprentissage

La combinaison de plusieurs méthodes et systèmes de connaissances nous permet de mieux comprendre les océans du Canada.

Les humains élargissent depuis longtemps leurs connaissances sur les océans et leur compréhension de ceux-ci. Le savoir autochtone s’est accumulé et a évolué au fil des siècles pour assurer la sécurité de la navigation dans les eaux canadiennes, la sécurité alimentaire et le maintien des relations et des pratiques culturelles. Aujourd’hui, nous utilisons un large éventail d’approches complémentaires et collaboratives pour étudier plus en détail et comprendre de manière plus globale les océans du Canada.

Surveillance et recherche

Des programmes de surveillance à long terme combinés à des recherches ciblées sont à la base de la compréhension des océans du Canada. Ces programmes permettent aux scientifiques de détecter les changements qui se produisent dans les milieux océaniques et les aident à connaître l’état et les tendances des espèces et des habitats. Plus ces programmes durent longtemps, plus l’information est de qualité. Les programmes de surveillance qui s’étendent sur plusieurs décennies servent à déterminer si les changements observés sont une tendance à long terme, font partie d’un cycle ou sont des événements ponctuels. Par exemple, le MPO surveille les niveaux d’oxygène dans l’océan Pacifique depuis 1960 et la température dans les zones côtières de Terre-Neuve-et-Labrador depuis 1967. Des études de recherche sur le terrain et en laboratoire sont également réalisées dans tous les océans du Canada pour répondre à des questions précises comme celles liées au climat, aux habitats, aux espèces et aux réseaux trophiques des océans. Ensemble, les activités de surveillance et de recherche océanographiques continuent d’améliorer la compréhension des écosystèmes marins canadiens et leurs conservation et gestion.

Les sciences océaniques, par l’entremise de la surveillance et de la recherche, permettent non seulement de mieux comprendre les océans du Canada et leur complexe vie marine, mais aident également les scientifiques à poser les bonnes questions pour les recherches futures (voir L’acquisition de connaissances, figure 11).

Des technologies océaniques en pleine évolution

La majeure partie des activités de surveillance et de recherche dans les océans du Canada sont menées à l’aide d’outils standard comme les capteurs océanographiques et les chaluts de pêche, mais des technologies océaniques novatrices et évolutives fournissent de nouveaux types d’observations qui peuvent améliorer la surveillance à grande échelle et à long terme. (figure 12 : Technologies d’échantillonnage des océans). Différents outils sont utilisés ensemble pour étudier et échantillonner les différents aspects des océans canadiens et nous aider à mieux comprendre les écosystèmes marins.

Les technologies de télédétection recueillent des données à distance en détectant l’énergie qui se reflète à la surface de la planète. Ces outils sont notamment les satellites, le sonar et le système aéroporté de détection et de télémétrie par ondes lumineuses (LiDAR). Ces technologies permettent de produire des levés hydrographiques et des relevés plurispécifiques, ainsi que des cartes d’habitats toujours plus complets et plus précis.

Les technologies d’échantillonnage passif et actif fournissent aux chercheurs des données océanographiques à haute résolution avec un effort moindre. Des capteurs spécialisés peuvent être installés sur des amarrages fixes, des systèmes flottants de suivi de la circulation ou des planeurs télécommandés pour transmettre l’information sur les caractéristiques de l’eau, les déplacements des animaux et le bruit dans l’océan.

Les images haute définition, prises au-dessus ou au-dessous de la surface de l’océan, offrent des moyens non invasifs et détaillés d’étudier la biodiversité marine, en particulier les habitats uniques, et les comportements des animaux vivants. Sous la surface, les caméras sous-marines et les véhicules sous-marins téléguidés (VTG) prennent des vues sous-marines immersives des fonds marins; à la surface, les drones aériens effectuent des relevés grand angle de zones côtières et en haute mer qui seraient autrement difficiles à atteindre.

Le marquage électronique de la vie marine, associé à des microphones acoustiques sous-marins et au suivi par satellite, nous permet de beaucoup mieux comprendre les déplacements des espèces et l’utilisation de l’habitat. Cette technologie est particulièrement utile pour suivre les poissons, requins, phoques, baleines, tortues et oiseaux de mer migratoires sur de longues distances et périodes.

Les laboratoires océanographiques canadiens effectuent des analyses de pointe sur des échantillons d’eau de mer et des tissus animaux. De nouveaux équipements et outils numériques sont combinés pour traiter les échantillons et les données. On peut maintenant analyser les échantillons d’eau pour y déceler l’ADN environnemental afin de révéler quelles espèces se trouvaient récemment dans une région donnée avec plus de détails que le seul échantillonnage physique.

Science collaborative

Les sciences océaniques signifient de plus en plus travailler ensemble. Une coopération plus étroite aux niveaux local, régional, national et international, ainsi qu’entre les différents domaines de recherche permet de mieux comprendre de nombreuses questions complexes dans le domaine des sciences océaniques. Une telle coopération permet d’harmoniser les plans et le financement de la recherche, et crée des possibilités pour continuer à soutenir les technologies et favoriser l’autodétermination des Autochtones dans le domaine de la recherche.

La collaboration dans le domaine des sciences océaniques peut prendre de nombreuses formes selon ses différents intervenants qui peuvent comprendre des gouvernements, des groupes autochtones, des universités, des organisations non gouvernementales, des entreprises et des groupes communautaires.

Des partenariats de recherche entre des organisations gouvernementales et non gouvernementales ou d’autres groupes ayant des intérêts communs en sciences océaniques sont de plus en plus souvent établis au Canada. Les expéditions scientifiques en mer à bord de navires pouvant appuyer divers domaines de recherche et héberger des équipements complexes offrent une compréhension approfondie au domaine de la recherche. En augmentation le nombre de parties qui recueillent des données, nous pouvons améliorer nos connaissances sur nos côtes.

L’intégration du savoir autochtone et de l’information scientifique se fait souvent par une élaboration concertée d’objectifs et de plans de recherche et un travail collaboratif sur des projets précis. Les scientifiques travaillent avec les peuples autochtones pour traiter les questions liées aux côtes et aux ressources marines du Canada, en particulier celles qui contribuent à la sécurité alimentaire et au maintien de l’identité culturelle. Les programmes communautaires et dirigés par les collectivités fournissent également des renseignements importants sur les poissons et les mammifères marins, et leur environnement (voir Apprendre ensemble).

La science communautaire est une source croissante de données de surveillance et de recherche au Canada. De nombreuses nouvelles technologies numériques facilitent, pour les collectivités qui souhaitent participer aux sciences océaniques, la collecte et l’utilisation de renseignements scientifiques précieux. Les informations recueillies auprès du public peuvent aller des observations occasionnelles à la collecte coordonnée de données, les deux types d’information pouvant aider les scientifiques à comprendre des questions complexes, y compris les changements dans les modèles de déplacement des espèces et la santé des populations.

L’avenir des sciences océaniques au Canada

Le Canada explore plus de parties de l’océan que jamais, à mesure que de nouvelles technologies et l’acquisition de données à distance sont mises à l’essai et utilisées pour la recherche. Notre compréhension des océans ne cesse de progresser en même temps que la collaboration dans les activités de surveillance et de recherche se renforce, que la vitesse de la mise à jour des renseignements augmente et que la portée de la diffusion des renseignements s’étend. L’analyse informatique, y compris la modélisation et la cartographie détaillée, est également devenue la pierre angulaire des sciences océaniques et améliore la compréhension des écosystèmes océaniques et notre capacité à rendre compte de l’état des océans aux Canadiens et aux décideurs.

Les progrès continus des technologies des sciences de la mer et des divers systèmes de connaissances réalisés grâce à des partenariats de collaboration montrent que les approches novatrices et inclusives de la surveillance et de la recherche dans le milieu marin continueront d’évoluer.

Encadré : L’acquisition de connaissances

Infographie : L’acquisition de connaissances

Figure 11 : Les scientifiques acquièrent des connaissances et élargissent notre compréhension des océans du Canada grâce à un processus continu, en utilisant une multitude d’outils et de méthodes, dans l’intérêt de toute la population canadienne.

Les programmes de surveillance et de recherche visent à répondre aux questions ou à résoudre les problèmes définis par les organismes de réglementation, les intervenants et les collectivités. Plus les objectifs de recherche sont fondés sur la collaboration, plus ils peuvent profiter à davantage de parties.

Les données des sciences océaniques sont recueillies de différentes manières. Elles peuvent provenir d’échantillonnages ou d’autres ensembles de données existants – et être recueillies sur des sites de terrain, dans des laboratoires et dans des bases de données.

L’analyse des données océaniques produit des résultats qui peuvent éclairer l’état et les tendances des différents écosystèmes. Les scientifiques peuvent également développer des modèles informatiques capables d’utiliser les observations passées pour prédire les états futurs de l’océan.

La mise en commun des données scientifiques, au moyen de portails de données ouvertes, de publications scientifiques ou de réunions et de conférences, est importante pour maintenir la crédibilité et la transparence des activités scientifiques. L’accès à l’information peut contribuer aux recherches et aux plans de conservation grâce à la diffusion des connaissances à un public plus large.

La fourniture de renseignements et d’avis fondés sur les sciences océaniques canadiennes appuie la prise de décisions fondées sur des données probantes et l’élaboration de politiques sur la gestion des pêches et de l’aquaculture et les aires marines protégées – au Canada et à l’étranger.

Les lacunes dans les connaissances sur les espèces et les zones océaniques déterminées peuvent influencer les futurs efforts de collecte de données. De nouvelles données peuvent être recueillies ou de nouvelles méthodes peuvent être élaborées pour recueillir des données plus précises ou plus détaillées afin de combler ces lacunes. De cette manière, le cycle de la recherche se poursuit et nos connaissances s’étendent.

Infographie : Technologies d’échantillonnage des océans

Figure 12 : Diverses méthodes et technologies nous aident à mieux comprendre les océans du Canada.

Faits saillants : Apprendre ensemble

Chaque été, l’une des plus grandes populations de béluga du Canada, estimée à environ 40 000 individus, se rend dans l’estuaire du MacKenzie, dans la mer de Beaufort. Depuis 40 ans, des scientifiques, des membres de la collectivité et des conseils de cogestion ont travaillé ensemble pour étudier ces baleines dans le cadre d’un programme unique de surveillance de la récolte par les collectivités. Créé à l’origine pour répondre aux inquiétudes entourant l’exploitation pétrolière et gazière dans la région et ses effets sur les bélugas, le programme recueille des données pour traiter les préoccupations des collectivités relatives à la population de béluga de l’est de la mer de Beaufort et pour déterminer les zones dans lesquelles effectuer de nouveaux ou différents projets de recherche. Le programme porte actuellement sur l’état de la population de béluga, sa santé et ses liens dans le réseau trophique.

Au cours des 40 dernières années, le programme a pris de l’ampleur en incluant les six collectivités de la région désignée des Inuvialuit. La collecte d’échantillons sur le terrain, le travail sur les échantillons en laboratoire et la présentation des résultats lors de conférences scientifiques sont entrepris conjointement par le gouvernement et les participants inuvialuits, y compris les aînés et les jeunes.
En 2016, le tout premier Sommet sur le béluga s’est tenu à Inuvik, dans les Territoires du Nord-Ouest, réunissant 80 participants des collectivités de la région désignée des Inuvialuit, du gouvernement et du milieu universitaire. Le Sommet a permis d’examiner l’état des bélugas et a créé un environnement de dialogue, de discussion et d’apprentissage dans lequel le savoir des Inuits et la science étaient valorisés et respectés de façon égale.

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