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Peste des écrevisses (maladie fongique)

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Catégorie 2 (au Canada et d'intérêt régional)

Noms courants et généralement admis de l'organisme ou de l'agent pathogène

Peste de l'écrevisse, aphanomycose de l'écrevisse, La peste, Krebspest, Kraftpest.

Nom scientifique ou affiliation taxonomique

Aphanomyces astaci de l'ordre Saprolegniales des Oomycètes. Les oomycètes (communément appelés champignons aquatiques et plus apparentés aux algues brunes et aux diatomées qu'aux véritables champignons, les Eumycètes) ne sont pas considérés comme de « vrais champignons » sur le plan de la taxonomie. De ce fait, ils ont été placés dans le phylum Oomycètes, avec A. astaci dans la famille des Saprolegniaceae (Stephens et al. 2005, Buller 2008). L'identification des Oomycètes au niveau du genre dépend de la morphologie du sporange, et l'identification au niveau de l'espèce dépend de la morphologie des stades de la reproduction sexuelle (anthéridies, oogonies et oospores). Les stades de la reproduction sexuelle sont cependant absents chez l'A. astaci. En plus d'A. astaci, d'autres espèces d'oomycètes et de champignons sont connues pour leur capacité à envahir les écrevisses (Unestam 1973a, Ballesteros et al. 2007, Cammà et al. 2010). Royo et al. (2004) ont observé des isolats d'Aphanomyces sp. issus d'écrevisses (Pacifasticus leniusculus et Procambarus clarkii) en Espagne et en Italie qui étaient incapables de tuer les écrevisses vulnérables (l'écrevisse australienne Cherax destructor et l'écrevisse noble européenne, l'Astacus astacus) après une infection expérimentale standardisée, qui avaient une RAPD-PCR et des séquences ITS différentes des souches de référence d'A. astaci, et qui, contrairement à A. astaci, ne présentaient pas de chitinase de manière constitutive au cours de la croissance ou de la sporulation. Par contre, tout comme A. astaci, ces isolats possédaient des émergences de zoospores répétées et manquaient de reproduction sexuelle. Royo et al. (2004) ont proposé un nom provisoire, Aphanomyces repetans, en attendant que le statut taxonomique des isolats soit complètement clarifié.

Répartition géographique

Très répandue en Amérique du Nord où les écrevisses indigènes résistent à la maladie. La prévalence des infections chez certaines populations est aussi élevée qu'à 50 % (Holdich 1988). En Europe, on croit que cette maladie est venue de la Lombardie, en Italie, dans les années 1860, après l'introduction de l'écrevisse d'eau douce américaine dans le système hydrographique local. C'est à partir de ce moment que la maladie s'est répandue à travers l'Europe (Alderman 1996). Les vagues d'expansion de la maladie connues après les années 1960 en Europe, y compris en Espagne, sont en grande partie associées aux mouvements de l'écrevisse nord-américaine introduite en Europe pour des besoins de culture d'écrevisses et aux mouvements des équipements de pêche contaminés non désinfectés. Aphanomyces astaci a réussi à s'introduire en Bretagne en 1981, a été détectée en Irlande en 1987 et s'est répandue en Turquie, en République tchèque, en Hongrie, en Grèce et en Norvège au courant des années 1980 (Alderman et al. 1996). La maladie a causé des mortalités élevées et a même conduit à l'extinction de plusieurs stocks d'écrevisses autochtones d'Europe (Marren 1986; Reynolds 1988; Rahe et Soylu 1989; Diéguez-Uribeondo et al. 1997b; Vennerström et al. 1998; Bohman et al. 2006; Diéguez-Uribeondo 2006; Kozubíková et al. 2006, 2007, 2008; Cammà et al. 2010, Vrålstad et al. 2011).

Espèces hôtes

Astacus astacus, Austropotamobius pallipes, Austropotamobius torrentium et Astacus leptodactylus sont des exemples d'espèces européennes vulnérables à la maladie. Les écrevisses des espèces Pacifasticus leniusculus, Procambarus clarkii et Orconectes limosus originaires d'Amérique du Nord sont porteuses du champignon et ne présentent pas de symptômes de la maladie, sauf en culture intensive. D'après les données moléculaires, une population d'A. astacus saine d'apparence en provenance du Lac Mikitänjärvi, Kainuu, en Finlande, a développé des infections subcliniques de la peste de l'écrevisse (Jussila et al. 2011). Le crabe chinois, Eriocheir sinensis et l'écrevisse japonaise (Cambaroides japonicus) ont été infectés en laboratoire à titre expérimental (Stephens 2005). De plus, neuf espèces d'écrevisses originaires de différentes parties d'Australie (y compris Cherax quadricarinatus, Cherax destructor et Astacopsis gouldi) et de la Nouvelle-Guinée (Cherax papuanus) testées dans des aquariums se sont toutes montrées vulnérables à l'infection (Unestam 1975).

Impact sur les hôtes

Les hyphes d'A. astaci poussent dans les parties douces, non calcifiées de la cuticule et tendent à se limiter à la zone de pénétration de la cuticule chez les écrevisses résistantes. Ils peuvent également pousser le long de la moelle épinière ventrale et le long du ganglion cérébral. Par contre, cette croissance peut être éparse et pourrait ne pas être perçue au cours d'un examen histologique. Parfois, les hyphes sont visibles dans l'œil, mais rarement dans les autres organes, et ils n'envahissent la musculature qu'au cours de la dernière phase de l'infection (Stephens et al. 2005). Les hyphes s'étendent dans l'eau et produisent des zoospores mobiles qui infectent d'autres écrevisses. Des réactions de type défensives, comme la mélanisation (Unestam et Nylund 1972), peuvent être évoquées chez les écrevisses résistantes (nord-américaines). Celles-ci peuvent porter A. astaci sous forme d'infection subclinique (latente, bénigne, chronique) dans la cuticule. Les espèces d'écrevisses européennes tendent à résister moins et meurent souvent en l'espace de quelques semaines d'exposition (Alderman et al. 1987, Reynolds 1988, Alderman et al. 1990). Le premier signe de mortalité liée à la peste d'écrevisse peut être la présence d'écrevisses au large pendant la journée (les écrevisses sont normalement des animaux nocturnes), certaines d'entre elles montrant des signes évidents de perte de coordination dans leurs mouvements, d'autres se renversant facilement et éprouvant des difficultés à se remettre sur leurs pattes. Souvent par contre, à défaut d'une observation minutieuse des eaux, la première indication de l'existence d'un problème sera la présence d'un grand nombre d'écrevisses mortes dans la rivière ou le lac (Alderman et al. 1987).

Les zoospores flottantes d'A. astaci qui émergent des kystes primaires sont de préférence enkystées aux alentours des blessures superficielles de l'écrevisse (Unestam et Weiss 1970). Les écrevisses semblent plus vulnérables à la peste de l'écrevisse en période de mue (Smith et Söderhäll 1986), sans doute parce que le risque élevé de blesser le doux exosquelette au cours de cette période prédispose l'écrevisse à l'infection. De plus, les exsudats obtenus des pattes locomotrices de trois espèces d'écrevisses (A. astacus, O. limosus et P. leniusculus) étaient chimiotactiques pour les zoospores d'A. astaci (Cerenius et Söderhäll 1984). Après enkystement, les kystes secondaires obtenus (spores) développent des hyphes (tubes germinatifs) qui produisent des enzymes lytiques (protéases, chitinases et estérases) facilitant la pénétration à l'intérieur de la cuticule de l'écrevisse (Söderhäll et al. 1987). Chez les écrevisses très résistantes (p. ex. P. leniusculus), la plupart des kystes des zoospores étaient encapsulés de mélanine et tués. Les parois cellulaires des hyphes pénétrantes devenaient très mélanisées, et la croissance autour de la blessure était visiblement perturbée et éparse. Chez les écrevisses vulnérables (p. ex. A. astacus), la mélanisation était plus lente et les réactions aux blessures étaient moins restreintes à la croissance des hyphes par rapport à P. leniusculus. Cependant, les hyphes poussaient à profusion chez les deux espèces aussitôt qu'elles avaient traversé la zone de la blessure. La direction préférée de la croissance des hyphes était parallèle aux fibrilles de chitine (Nyhlén et Unestam 1980). Söderhäll et Unestam (1979) ont signalé qu'une masse moléculaire élevée et pure des glycoprotéines extracellulaires d'A. astaci activait fortement la prophénoloxydase du sérum de l'écrevisse (A. astacus). Söderhäll et Ajaxon (1982) ont indiqué que le système de phénol-phénoloxydase génère des substances toxiques pour certains champignons et A. astaci. Ces substances peuvent donc intervenir dans les réactions de défense. Diéguez-Uribeondo et Cerenius (1998) ont relevé que trois différents inhibiteurs de protéinase (un inhibiteur 23 kDa de la substilisine, un inhibiteur 155 kDa de la trypsine (pacifastine) et une macroglobuline α2) purifiés de l'hémolymphe (sang) de P. leniusculus réduisaient les activités protéolytiques des A. astaci. Ils peuvent alors réduire la rupture protéolytique exercée par les protéinases des A. astaci au cours d'une infection. Aussi, un inhibiteur de sérine-protéinase de type Kazal à deux domaines (KPI2) issu des hémocytes de P. leniusculus s'est révélé capable d'inhiber les sérines-protéinases extracellulaires d'A. astaci (Donpudsa et al. 2010). Les écrevisses résistantes (P. leniusculus) produisaient de façon continuelle des niveaux élevés de transcrits de prophénoloxydase (proPO) (cette enzyme dans sa forme active est responsable des réactions de mélanisation en catalysant l'oxydation des phénols en mélanine) et ces niveaux ne pouvaient davantage augmenter, alors que les niveaux de transcrits proPO et la résistance étaient augmentés par des immunostimulants chez les écrevisses vulnérables (A. astacus) (Cerenius et al. 2003). Les paramètres de l'hémolymphe étaient modifiés (glucose, lactate et augmentation du Ca2+; et diminution de Na+, K+ et Cl-) chez les écrevisses A. astacus infectées par A. astaci, mais étaient inchangés chez les écrevisses P. leniusculus infectées (Järvenpää et al. 1986). Une souche d'A. astaci (Pc) isolée à partir des écrevisses d'eau chaude P. clarkii recueillies en Espagne, comparée aux isolats issus des écrevisses d'eau froide (A. astacus, A. leptodactylus, et P. leniusculus), a été capable de grandir plus rapidement et de libérer des zoospores à des températures plus élevées et s'est révélée génétiquement différente dans une analyse RAPD-PCR (Diéguez-Uribeondo et al. 1995).

Chez les espèces vulnérables présentes en nombre suffisant pour favoriser la propagation rapide de l'infection, surtout aux températures estivales de l'eau, l'infection se propage rapidement, et toutes les écrevisses peuvent mourir en moins de 21 jours suivant le premier cas de mortalité observé dans des étendues de plus de 50 km. On a enregistré une vitesse de propagation en amont allant jusqu'à 1 000 m par semaine et 17 km en 10 mois (Taugbol et Skurdal 1993). La peste de l'écrevisse est d'une gravité inégalée. Les écrevisses infectées ne survivent pas. Il est donc normal d'enregistrer un taux de mortalité à 100 %. Toutefois, des données expérimentales indiquent qu'une exposition antérieure à un nombre de spores non mortelles de A. astaci augmente la résistance des écrevisses A. astacus à l'infection (Unestam et Weiss 1970). Le plus souvent, les espèces d'écrevisses résistantes d'Amérique du Nord survivent à l'infection, ce qui leur permet ensuite de servir de porteurs sains. Cependant, sous des conditions défavorables (stress, co-infections avec d'autres agents pathogènes, etc.) la mortalité peut survenir chez les espèces qui sont normalement résistantes (Thörnqvist et Söderhäll 1993, Diéguez-Uribeondo et al. 1997b, Diéguez-Uribeondo 2006). Apparemment, A. astaci n'a aucun vecteur ou hôte intermédiaire ou secondaire, il n'y a pas de structures résistantes et les spores ont une viabilité limitée en dehors de l'hôte.

Techniques de diagnostic

Observations générales

Les écrevisses infectées ne présentent pas toutes des signes flagrants, et ces signes ont divers aspects. Chez les écrevisses originaires d'Europe, le signe le plus marquant est la présence de taches blanches focales sur la musculature en dessous de la partie transparente de la fine cuticule, particulièrement celle de l'abdomen ventral et sur les articulations des péréiopodes (membres). De tels foyers peuvent être mieux vus à l'aide d'un microscope stéréoscopique à faible puissance. Dans certains cas, une coloration brune peut s'observer sur la cuticule et le muscle, et dans d'autres cas, les hyphes sont visibles à l'intérieur de la cuticule infectée sous forme de fines traces brunes (mélanisées). Buller (2008) fournit deux images de ces signes de la maladie à la page 3. Les parties pouvant faire l'objet d'un examen minutieux sont la fine cuticule ventrale intersternale de l'abdomen et de la queue, la cuticule de la région périanale, la cuticule entre la carapace et la queue, les articulations des péréiopodes (pattes locomotrices), en particulier l'articulation proximale, et enfin les branchies. Aux phases terminales de l'infection, les animaux arrêtent de fuir la lumière du jour, comme ils le font habituellement (on les voit en eau libre pendant le jour), ils perdent la coordination des membres (produisant un effet qui a été décrit comme la « marche sur des échasses »), et les animaux moribonds perdent souvent l'équilibre et tombent sur le dos avant de mourir. Pour le diagnostic, il faut isoler et identifier A. astaci à l'aide d'un examen morphologique au microscope. L'identification et l'isolement d'A. astaci sont facilités si on place l'écrevisse en conditions stressantes pour exacerber l'infection. Cela peut se faire de façon artificielle en réduisant le nombre de cellules sanguines en circulation pendant au moins 6 heures par l'inoculation de particules exogènes comme le zymosan (Persson et Söderhäll 1983, Persson et al. 1987, Cerenius et al. 1988). La prévalence de l'infection chez l'écrevisse P. leniusculus a été déterminée par l'examen visant à déceler des points bruns (de 1 à 5 mm de diamètre), et des points sur un petit sous-échantillon d'écrevisses tachetées ont été examinés au microscope pour déceler la présence d'hyphes (Nylund et Westman 1983). Aquiloni et al. (2011) ont utilisé des analyses d'images numériques et des techniques de traitement d'images pour choisir des zones micromélanisées sur la cuticule sous l'abdomen de P. clarkii subclinique en vue de choisir des zones de test pouvant aider à détecter A. astaci. Toutefois, les points bruns ou les zones mélanisées ne révèlent pas nécessairement la présence d'un agent pathogène et peuvent être dus aux lésions mécaniques ou à l'invasion par d'autres agents, comme les diverses espèces de champignons ou de bactéries (Persson et Söderhäll 1983).

Préparation humide

Examiner la cuticule de l'écrevisse moribonde pour déceler les hyphes. La cuticule mélanisée de l'écrevisse nord-américaine peut être le signe de la présence d'infections focales des hyphes. Chez les écrevisses malades, A. astaci peut se retrouver dans la plupart des tissus, mais est plus facilement détectable à l'intérieur de la fine cuticule abdominale. Exciser la cuticule abdominale ou racler les tissus des parties affectées (points mélanisés) et examiner les préparations humides pour déceler la présence d'hyphes. Les hyphes végétatifs sont siphonnés, fréquemment ramifiés et d'épaisseur plutôt uniforme (habituellement de 7 à 9 µm de largeur, mais pouvant varier de 5 à 10 µm de largeur). Cependant, les ramifications végétatives tendent souvent à être plus étroites que l'hyphe principal pour ce qui est des premiers 20 à 30 µm de croissance. Jeunes, les hyphes en pleine croissance ont un cytoplasme grossièrement granulaire avec de nombreux globules hautement réfrangibles, et des bouts arrondis. Les hyphes plus vieux sont en grande partie vacuolés avec le cytoplasme limité à la périphérie, laissant seuls quelques fins brins de protoplasme relier la grande vacuole centrale. Les hyphes les plus vieux sont apparemment dépourvus de contenu. Il convient de noter que les caractéristiques morphologiques des hyphes décrites ci-dessus ne peuvent pas être utilisées pour différencier l'A. astaci des autres Oomycètes et de nombreux champignons.

La formation des spores est généralement absente, sauf au cours des dernières phases de l'infection. Les sporanges sont mycéloïdes (de forme semblable aux hyphes), en position terminale ou intercalaire, et séparés des hyphes indifférenciés par des septa. Il se forme à l'intérieur des sporanges des spores primaires allongées (de 16 à 25 µm de longueur et de 8 µm de largeur). Lorsque ces spores se détachent du sporange, les spores primaires (environ 15 à 30 par sporange) deviennent arrondies (généralement de 9 à 11 µm de diamètre) et forment une paroi kystique qui deviendra le kyste primaire. Les kystes primaires adhèrent les uns aux autres et forment un amas sur la surface ou sur le bout du sporange. Dans certains cas, les spores primaires s'enkystent à l'intérieur du sporange. Une zoospore émerge à travers une papille (tube d'émergence) de chaque kyste primaire à 20 °C. La zoospore est réniforme (12 µm de longueur et 8 µm de largeur) et possède deux flagelles. Les deux flagelles sont reliés de manière latérale à un même point. Les zoospores nagent activement pendant au moins 48 heures à des températures comprises entre 16 et 20 °C, puis perdent leurs flagelles et s'enkystent pour former un kyste secondaire qui soit donnera naissance à des hyphes en présence des nutriments appropriés, soit répétera le processus d'émergence d'une zoospore et d'enkystement (Alderman et Polglase 1986, Cerenius et al. 1988).

Frottis

Les tissus issus du grattage des parties affectées peuvent être placés sur une lame de verre, séchés à l'air et colorés avec le colorant Wrights-Giemsa ou avec un autre colorant équivalent disponible dans le commerce (p. ex. Diff-Quick® ou Hemacolor®). Examiner les lames de verre colorées et séchées à l'air à l'aide d'un microscope pour déceler les hyphes d'A. astaci.

Histologie

La présence d'hyphes distincts et siphonnés de grande taille (de 5 à 10 µm de largeur) peut être relevée dans les coupes tissulaires (contenant de préférence des lésions trouvées dans la cuticule) colorées à l'hématoxyline et à l'éosine. Les hémocytes qui entourent et encapsulent les hyphes et deviennent mélanisés peuvent donner une apparence noueuse aux hyphes (Buller 2008). Stephens et al. (2005) ont indiqué que la modification de la coloration Gomori-méthénamine-argent a l'avantage de permettre de distinguer clairement des hyphes colorés en noir sur un fond vert sur des tissus contrecolorés à l'aide d'une solution vert clair. La procédure de cette coloration a été présentée par Pintozzi (1978). Une combinaison de l'imprégnation argentique de Grocott avec de l'hématoxyline et de l'éosine utilisées comme contrecolorants peut améliorer la visualisation des hyphes dans les tissus de l'écrevisse (Buller 2008).

Microscopie électronique

La pénétration de la fine cuticule de l'écrevisse par les zoospores A. astaci commence avec la lyse de la couche de surface lipidique de l'écrevisse et la formation d'un tube germinatif (bouche de l'infection) qui traverse l'épicuticule grâce à une activité histologique combinée à une pénétration mécanique. Un hyphe développé à partir du tube germinatif se forme généralement en dessous de la surface interne de l'épicuticule et dans l'endocuticule. Les hyphes grandissent de préférence de façon parallèle à la surface et parfois de façon perpendiculaire à celle-ci. Ensuite, les bouts des hyphes gonflent et certains d'entre eux commencent à traverser la cuticule. La pénétration de la cuticule d'une écrevisse résistante (P. leniusculus) était pour l'essentiel identique à celle des écrevisses vulnérables (A. astacus). Cependant, chez les écrevisses P. leniusculus, on a remarqué une forte mélanisation et une désorganisation du protoplasme dans la plupart des hyphes après la pénétration de la cuticule (Nyhlén et Unestam 1975). Une souche d'A. astaci qui avait perdu la capacité à produire des zoospores en milieu de culture contenait dans les hyphes, des corps semblables au mycoplasme (Heath et Unestam 1974). Nyhlén et Unestam (1978) ont décrit les parois des kystes secondaires (spores issues de l'enkystement des zoospores) et les parois des tubes germinatifs dans les spores en germination d'A. astaci.

Culture

Le diagnostic de la peste de l'écrevisse passe par l'isolement et la caractérisation d'A. astaci à l'aide d'un simple support mycologique (12,0 g de gélose; 1,0 g d'extrait de levure; 5,0 g de glucose; 10 mg d'acide oxolinique; 1 000 ml d'eau naturelle (provenant d'une rivière ou d'un lac); fortifié avec des antibiotiques (4 unités internationales/ml de pénicilline G (stérile) ajoutés après stérilisation à l'autoclavage et refroidissement à 40 °C) pour maîtriser la contamination bactérienne (Alderman et Polglase 1986). Pour que l'isolement réussisse, il faut le faire dans les 12 heures suivant la mort de l'écrevisse infectée. Exciser de petits morceaux de cuticule et de muscle infectés, les transférer dans une boîte de Pétri contenant de l'eau distillée stérilisée pour un lavage et un découpage complets en de plus petits morceaux (de 1 à 2 mm²). À l'aide d'instruments stérilisés, placer les petits morceaux en condition d'asepsie sur la surface du support. Si aucune lésion n'est visible, prélever des échantillons de muscle et de cuticule dans au moins trois parties de chaque animal (surtout des parties autour de la base des pattes locomotrices proches du corps et à l'intérieur du thorax). Un morceau de verre stérile peut être placé autour de l'inoculum pour forcer les hyphes émergeant du morceau à pousser à l'intérieur de la gélose. Pour empêcher la croissance bactérienne, on peut ajouter 0,5 ml de tellurite de potassium à 0,05 % à l'inoculum à l'intérieur du morceau de verre (Diéguez-Uribeondo et al. 1997b). Incuber à 16 °C pendant environ 15 jours. Il convient de noter que les champignons qui sont associés à l'écrevisse peuvent grandir comme des contaminants dans les cultures et pourraient se confondre avec les A. astaci (Cerenius et al. 1988).

La croissance d'A. astaci intervient presque toujours entièrement à l'intérieur et sur la surface de la gélose, mais sans hyphes aériens. Les colonies sont incolores. Les dimensions et l'apparence des hyphes sont identiques à celles des tissus de l'écrevisse (voir ci-dessus). Puisque les champignons Aphanomyces spp. se reproduisent de façon asexuée, les caractéristiques morphologiques des phases de reproduction sexuée (oogonie et anthéridie) employées pour identifier d'autres Oomycètes ne peuvent être utilisées. On utilise plutôt le processus de sporulation pour identifier A. astaci. Au cours de ce processus, les spores sont produites pour se détacher du bout de l'hyphe et s'enkystent avant de produire des spores mobiles (zoospores) qui s'échappent en nageant (Buller 2008). La formation de la spore ne se fait pas dans un milieu de culture riche en nutriments. Lorsque l'on transfère des thalles en cours de croissance active (corps de l'oomycète composés d'hyphes) ou des portions de thalles dans de l'eau de lac distillée ou stérilisée (en supprimant une fine couche à la surface de la gélose contenant des parties d'A. astaci de façon à ne transférer qu'une quantité minimale de gélose contenant des nutriments), des sporanges se forment aussitôt en 20 ou 30 heures à 16 °C, et en 12 ou 15 heures à 20 °C. Remarque : Il faut un ratio d'environ 100 unités d'eau distillée stérilisée pour 1 unité de culture d'A. astaci à transférer. Les sporanges sont mycéloïdes, en position terminale ou intercalaire, et se développent à partir des hyphes végétatifs non différenciés. Les sporanges terminaux sont simples et se développent à partir des hyphes extra matriciels. Les sporanges intercalaires sont assez complexes et se développent grâce à la croissance d'une ramification extramatricielle latérale, qui forme le tube de décharge du sporange. Le cytoplasme des tubes de décharge en développement est remarquablement dense et légèrement plus large (de 10 à 12 µm) que celui de l'hyphe végétatif ordinaire. Les sporanges sont délimités par un septum basal unique, pour ce qui est du sporange terminal, et par des septa placés sur chacune des extrémités du segment du sporange pour ce qui est des sporanges intercalaires. Ces septa sont nettement plus épais que la paroi hyphale et ont un indice de réfraction élevé. Des sections successives d'hyphes végétatifs peuvent se développer dans le sporange, et la plupart des thalles végétatifs sont susceptibles de se transformer en un sporange. Les spores primaires (unités cytoplasmiques) sont formées à partir des contenus du sporange et sont libérées (en l'espace de 5 minutes) du tube de décharge du sporange et s'accumulent à ce point. Les spores s'arrondissent et la paroi kystique se forme. La plupart des spores demeurent en un amas (15-30 spores) à la pointe du sporange. Le nombre de spores dans un amas d'A. astaci est en général plus petit que celui des autres espèces d'Aphanomyces. Les amas sont adhérents et assez résistants à la perturbation physique. Les spores resteront enkystées pendant 8 à 12 heures. Une zoospore réniforme à deux flagelles (8 x 12 µm, la motilité prend de 5 à 20 minutes à se développer) émerge de chaque kyste et s'échappe en nageant, laissant vides les capsules de la spore enkystée (Buller 2008). Les zoospores d'A. astaci pourraient germer et croître in vitro sur les écailles du saumon de l'espèce Salmo salari (Hall et Unestam 1980). Andersson et Cerenius (2002) ont indiqué que la chitinase (détectée comme activité enzymatique dans le milieu de culture) et la transcription du gène de la chitinase AaChi1 sont exprimées à des niveaux élevés au cours de la culture végétative d'A. astaci sans stimulation supplémentaire par la chitine; c'est tout le contraire avec les autres Aphanomyces spp. testés qui ne produisent de grandes quantités de chitinase qu'en présence de la chitine. Ce modèle de l'expression de la chitinase peut éventuellement être utilisé comme caractéristique physiologique de qualité pour distinguer A. astaci des autres espèces de parasites et de saprophytes (Andersson et Cerenius 2002). Dans une recherche consécutive, Hochwimmer et al. (2009) ont utilisé les gènes de la famille de chitinase pour développer des tests de diagnostic moléculaire. Des détails supplémentaires relatifs à la culture d'A. astaci et à l'apparence morphologique attendue au cours de ses différents stades de développement sont présentés dans le manuel de diagnostic de la peste de l'écrevisse publié par l'Organisation mondiale de la santé animale (OIE) (Chapitre 2.2.1)

Remarque : Une vaste gamme d'organismes peuvent se développer dans le milieu de culture utilisé pour la procédure décrite ci-dessus. Aphanomyces astaci connaît un taux de croissance lent comparé aux autres Oomycètes et champignons qui peuvent coloniser la cuticule de l'écrevisse et pousser sur le milieu de culture. De même, la présence des bactéries peut inhiber la croissance d'A. astaci (Oidtmann et al. 2004, Cammà et al. 2010). Des tentatives d'isolement d'A. astaci en milieu de culture à partir de l'écrevisse présentant des infections légères se sont souvent soldées par un échec. Si la détection est faite en dehors de la zone de l'aire de répartition connue de la peste de l'écrevisse, un diagnostic positif devra être confirmé par le laboratoire de référence de l'Organisation mondiale de la santé animale (OIE).

Bioessai

Exposer l'écrevisse vulnérable (p. ex. A. leptodactylus ou A. pallipes) aux zoospores produites par des isolats suspects entraînera une mortalité rapide (Alderman et al. 1987). Un réisolement consécutif du champignon confirme la présence de la peste de l'écrevisse. Toutefois, les espèces d'écrevisses vulnérables ne doivent être utilisées que pour le diagnostic de confirmation qu'en l'absence de toute violation de la Convention de Berne relative aux espèces menacées d'extinction. Certaines populations d'écrevisses peuvent être protégées en vertu de la législation en matière de conservation.

Sondes à ADN

Des amorces de séquences arbitraires et des techniques de réaction en chaîne de la polymérase (PCR) de l'ADN ont été utilisées pour identifier deux groupes principaux parmi les A. astaci mis en évidence en Suède (Huang et al. 1994). L'analyse basée sur la technique associant l'amplification aléatoire de l'ADN polymorphe par réaction en chaîne de la polymérase (RAPD-PCR) a montré que les isolats d'A. astaci issus des cadavres d'écrevisses A. pallipes en Angleterre appartenaient aux deux groupes (Lilley et al. 1997), et deux différentes souches d'A. astaci ont causé deux épizooties de peste de l'écrevisse chez les écrevisses A. astacus en Finlande (Vennerström et al. 1998). Diéguez-Uribeondo et al. (1995) ont eu recours à l'analyse RAPD-PCR pour démontrer qu'un isolat issu de l'écrevisse d'eau chaude, P. clarkii, était génétiquement distinct de toutes les autres souches décrites. L'analyse RAPD-PCR a aussi indiqué que les isolats d'A. astaci provenant de deux foyers de peste de l'écrevisse du sud de l'Allemagne étaient très proches d'une souche isolée chez les écrevisses de l'espèce P. leniusculus en provenance du lac Tahoe en Californie aux États-Unis (Oidtmann et al. 1999). Buller (2008) a conclu qu'il y avait quatre groupes génétiques (génogroupes) d'A. astaci identifiés grâce à la technique RAPD-PCR : Le Groupe A (qui sera par la suite appelé Astacus (As)) comprend des souches isolées à partir des espèces d'écrevisses européennes que sont A. astacus et A. leptodactylus. On pense que ce groupe représente les isolats issus d'une première introduction du parasite en Europe. Le Groupe B (qui sera par la suite appelé Pacifastacus I (PsI)) comprend des souches isolées à partir des espèces d'écrevisses originaires des États-Unis, P. leniusculus, sans doute après l'introduction de cette écrevisse des lacs Tahoe et Hennessy (en Californie) en Suède en 1969. Le Groupe C (qui sera par la suite appelé Pacifastacus II (PsII)) comprend les souches issues de l'espèce P leniusculus d'origine canadienne (Lac Pitt, en Colombie-Britannique). Enfin, le Groupe D (qui sera par la suite appelé Procambarus (Pc)) comprend les souches isolées à partir de l'espèce P. clarkii en Espagne. Les souches des Groupes A à C proviennent des écrevisses originaires d'eaux froides (4-21 °C), tandis que les souches du Groupe D sont des souches issues des régions subtropicales du sud-est des États-Unis et se sont mieux adaptées à la croissance à des températures comprises entre 20-26 °C. Makkoken et al. (2011) ont décelé un polymorphisme génétique dans les zones ribosomiques des espaceurs transcrits internes (ITS) d'A. astaci parmi les différents isolats (polymorphisme intraspécifique), et aussi parmi les différents clones du même isolat (polymorphisme intragénomique). Les différences n'étaient pas uniformes et n'ont pas permis de déceler de marqueurs spécifiques pour les différents isolats ou groupes de peste de l'écrevisse. Par ailleurs, la variation intragénomique de quatre clones d'un isolat d'A. astaci (nommé UEF8866-2) était plus élevée que la variation intraspécifique entre les différents isolats. Ainsi, il sera nécessaire de baser l'identification des différents groupes d'A. astaci sur d'autres régions génétiques (Makkoken et al. 2011). Récemment, un cinquième nouveau génotype d'A. astaci a été isolé chez l'écrevisse américaine O. limosus en République Tchèque, à la suite de la comparaison des profils de RAPD-PCR avec ceux des quatre groupes génétiques décrits ci-dessus (Kozubíková et al. 2011a).

Bangyeekhun et al.(2001) ont identifié deux gènes de la sérine protéase qui encodent les enzymes de subtilisine (AaSP1) et de trypsine (AaSP2) issus d'A. astaci. Cette découverte leur a permis d'avancer l'hypothèse selon laquelle l'A. astaci pourrait utiliser les protéases non seulement pour acquérir des nutriments, mais aussi pour inhiber ou détruire les réactions de défense de l'hôte. Les amorces mises au point pour amplifier un segment de 1 050 paires de bases de la région ADNr 28.S des Saprolegniales (Oomycètes) ont utilisées pour distinguer l'A. astaci par l'application de trois enzymes de restriction à l'amplicon (Oidtmann et al. 2002a). En outre, une procédure de diagnostic par PCR qui amplifie spécifiquement l'ADN issu de la région de l'espaceur transcrit interne (ITS) de l'A. astaci était capable de détecter l'infection chez l'écrevisse A. astacus deux jours après l'exposition expérimentale aux spores (Oidtmann et al. 2004). Même si ce test avait été jugé très sensible lorsqu'il a été utilisé pour détecter A astaci dans des coupes imprégnées à la paraffine, car il avait produit un court amplicon de 115 paires de bases (Buller 2008), il avait l'inconvénient de produire une réaction croisée avec les champignons des espèces Aphanomyces invadans et Aphanomyces frigidophilus. Le second champignon avait été isolé dans un cas de pathologie assimilable à la peste de l'écrevisse (Ballesteros et al. 2007). L'utilisation d'une analyse PCR avec une amorce sens différente issue de la même région de l'ADN indiquée ci-dessus et la même amorce antisens s'était révélée être plus spécifique pour A. astaci (Oidtmann et al. 2006, Cammà et al. 2010). L'application de ce test a indiqué que l'éventail caudal (c.-à-d. les uropodes et le telson) et la fine cuticule abdominale des espèces d'écrevisses résistantes à la maladie d'origine nord-américaine (O. limosus et P. leniusculus) avaient, dans différents endroits en Europe, manifesté des réactions positives à la PCR. Ces réactions étaient plus fréquentes dans la cuticule que dans d'autres parties du corps (Oidtmann et al. 2006, Vrålstad et al. 2011). Toutefois, la PCR décrite par Oidtmann et al. (2006) avait produit au moins une fausse réaction positive sur 16 par le séquençage des produits de la PCR (Kozubíková et al. 2009). À cause de la difficulté éprouvée avec l'isolement in vitro des A. astaci pour déceler l'infection, la validation des essais de diagnostic moléculaire serait utile pour confirmer la répartition et de la prévalence d'A. astaci chez les populations d'écrevisses (Edgerton et al. 2004, Vrålstad 2005). Vrålstadet al.(2009) ont mis au point une méthode de réaction en chaîne par polymérase quantitative en temps réel (RT-PCR) utilisant la TaqMan®-MGB (Minor Groove Binder - ligand du petit sillon). Cette méthode de détection quantitative et hautement spécifique d'A. astaci vise le motif de la séquence unique de 59 paires de bases d'A. astaci trouvé dans l'espaceur transcrit interne 1 (ITS1) de la grappe du gène ribosomique nucléaire. Cette sonde offre une stringence plus élevée, et donc une meilleure spécificité que les amorces habituelles (Vrålstad et al. 2009). En plus, l'approche de la PCR en temps réel réduit le risque de contamination induite par les manipulations en laboratoire (il n'y a plus de manipulation supplémentaire de la PCR après la réaction), accroît la sensibilité de détection de l'agent pathogène et fournit des résultats quantitatifs. Cependant, il existe un inconvénient à l'analyse de la PCR en temps réel : le produit issu de cette analyse ne convient pas au séquençage. Ainsi, il faut impérativement recourir à une technique traditionnelle de PCR pour obtenir la confirmation de l'identité du fragment amplifié. Hochwimmer et al. (2009) ont identifié deux nouveaux membres exprimés de façon constitutive de la famille de gènes glycosyle hydrolases (GH18) des chitinases chez les A. astaci. C'est à partir de ces deux membres que ces chercheurs ont élaboré deux méthodes de diagnostic : une analyse PCR en temps réel basée sur la sonde TaqMan (qPCR) et un essai multiplex visant de multiples gènes (les deux nouveaux gènes CHI2 et CHI3, un troisième membre de la famille des GH18, CHI1 et l'ARNr 5,8S utilisé comme contrôle endogène) décelés par fusion de la courbe d'analyse.

Kozubíková et al. (2011b) ont comparé le résultat de la RT-PCR quantitative utilisant la sonde TaqMan® MGB (Vrålstad et al. 2009) avec celui de la PCR traditionnelle semi-nichée (Oidtmann et al. 2006) sur les isolats d'ADN issus de la fine cuticule abdominale de 460 écrevisses des espèces nord-américaines (O. limosus et P. leniusculus) provenant d'Europe centrale. Ils ont relevé que l'approche RT-PCR utilisant la sonde TaqMan® MGB semblait procurer plus de sensibilité (32 % contre 23 % de sensibilité positive) où la grande majorité des nouvelles données positives contenaient des niveaux d'agents très bas. Kozubíková et al. (2011b) ont conclu que la combinaison des deux méthodes était susceptible de déboucher sur des conclusions plus sûres sur la présence de l'agent pathogène. Tuffs et Oditmann (2011) ont comparé la sensibilité analytique du test et la spécificité du dosage par une PCR traditionnelle visant la région ITS (Oidtmann et al. 2006) et les deux analyses TaqMan® en temps réel, visant soit la région ITS (Vrålstad et al. 2009) soit le gène de la chitinase (Hochwimmer et al. 2009). Ils ont constaté que toutes les analyses avaient une sensibilité allant de bonne (dosage en temps réel visant le gène de la chitinase) à excellente (dosage en temps réel visant la région ITS) et qu'elles étaient spécifiques de l'ADN d'A. astaci de tous les quatre groupes génétiques (décrits plus haut). Aucune de ces trois analyses n'a eu de réaction croisée avec d'autres organismes testés au cours de l'étude (Tuffs et Oditmann 2011). Strand et al. (2011b) ont déterminé que la RT-PCR utilisant la sonde TaqMan® MGB (Vrålstad et al. 2009) était appropriée pour surveiller directement A. astaci dans les plans d'eau naturels après que l'albumine de sérum bovin ou la solution Environmental Master Mix de TaqMan® a été ajoutée pour atténuer les acides humiques co-extraits qui inhibaient la détection de cet oomycète de façon significative.

Remarque : La combinaison des connaissances relatives à l'historique de la maladie, aux études histologiques et moléculaires (y compris la combinaison de l'application des multiples dosages de PCR et la séquence des produits de PCR) et probablement l'isolement des oomycètes chez l'écrevisse d'eau douce sont des aspects clés de l'établissement d'un diagnostic précis (Diéguez-Uribeondo et al. 2010, Tuffs et Oditmann 2011).

Méthodes de contrôle

Stephens et al. (2005) ont décrit diverses procédures et approches qui peuvent être utilisées pour détecter A. astaci ou la peste de l'écrevisse en Australie. Certaines des procédures peuvent être appliquées dans d'autres parties du monde. Gherardi et al. (2011) font une présentation synthétique des différentes méthodes utilisées (enlèvement mécanique, méthodes physiques, contrôle biologique, biocides, et méthodes autocides) pour le contrôle des espèces d'écrevisses non-indigènes. Ils présentent également les pièges et les éventualités. Cependant, le contrôle de la propagation d'A. astaci dans un bassin versant est impossible après la détection d'écrevisses infectées dans une zone. Les mycéliums (hyphes) d'A. astaci restent viables pendant au moins 5 jours chez l'écrevisse gardée dans l'eau à une température de 21 °C après la disparition de la peste de l'écrevisse (Oidtmann et al. 2002b). De même, les kystes et les zoospores d'A. astaci peuvent survivre dans l'eau en dehors de l'hôte pendant au moins 14 jours (Oidtmann et al. 2005). Il suffit d'à peine 1,3 zoospore par millilitre d'eau pour infecter les animaux vulnérables (Alderman et al. 1987). Le mouvement de l'eau infectée entre les bassins versants peut transmettre l'infection, tout comme le peuvent les équipements tels que les bottes et le matériel de pêche, qui étaient considérés comme étant la source suspecte de l'infection en Irlande (Reynolds 1988). De plus, A. astaci était toujours viable et infectieux pour l'écrevisse (A. astacus) après le passage dans le tractus gastro-intestinal des poissons (truite arc-en-ciel Oncorhynchus mykiss, carpe commune Cyprinus carpio, anguille Anguilla anguilla et perche Perca fluviatilis) nourris avec la cuticule abdominale de l'écrevisse infectée (Oidtmann et al. 2002b). Cependant, il est peu probable que l'A. astaci survive au passage dans le tractus gastro-intestinal des mammifères ou des oiseaux, parce que le champignon n'a présenté aucun stade de viabilité après un séjour de 12 heures à 37 °C (Oidtmann et al. 2002). Le séchage complet de l'équipement (>24 heures) est suffisant pour détruire l'A. astaci contaminant, car les oomycètes, y compris les kystes des spores, ne résistent pas à la dessiccation. Le chauffage (ébullition pendant 1 min) était le moyen le plus rapide pour décontaminer les cadavres d'écrevisses (Oidtmann et al. 2002b). Lilley et Inglis (1997) ont indiqué que le peroxyde d'hydrogène et la Proxitane 0510 (contenant 5 % d'acide peracétique dans du peroxyde d'hydrogène) ont des propriétés respectivement pour le traitement fongicide et la désinfection. Alderman et Polglase (1985) ont signalé que divers produits chimiques (comme l'hypochlorite de sodium et les iodophores) sont efficaces dans la décontamination de surface de l'A. astaci si les surfaces sont exemptes de boue ou de résidus organiques, dans lesquels l'A. astaci peut survivre pendant de longues périodes dans un environnement humide. En outre, Stephens et al. (2005) ont présenté diverses procédures pour la décontamination des équipements. Les enquêtes initiales ont montré qu'A. astaci ne survit pas à une température de -5 °C, au plus, pendant plus de 24 heures et qu'il ne survivait pas à la congélation à -20 °C pendant 2 heures. Par contre, Oidtmann et al. (2002b) ont indiqué que des stades de viabilité d'A. astaci étaient toujours présents après 48 heures à -20 °C.

Rahe et Soyle (1989) ont observé que deux lacs de Turquie présentant une concentration élevée en ions Mg2+ et des ratios Ca:Mg inversés ont continué à favoriser la reproduction des écrevisses (A. leptodactylus) malgré la présence des cas de peste de l'écrevisse dans les lacs. D'autres lacs de Turquie où la présence caractéristique d'ions Mg2+ n'a pas été observée avaient perdu leur population d'écrevisses en moins de deux ans (Rahe et Soyle 1989). Des études in vitro ont montré que l'on pouvait prévenir la sporulation d'A. astaci dans l'eau du lac avec au moins 20 mM de MgCl2. De même, la croissance mycéliale dans de la gélose au peptone et au glucose était fortement réduite de 100 mM et prévenue complètement avec 200 mM de MgCl2. Cependant, une concentration d'au moins 100 mM de MgCl2 était nécessaire pour empêcher que les écrevisses soient infectées par des zoospores. Les écrevisses infectées transférées dans 25 mM ou plus de MgCl2 ont maintenu actives les infections sans toutefois produire de sporanges, et la maladie n'a pas été transmise aux écrevisses A. astacus saines (Rantamäki et al. 1992).

Les espèces d'écrevisses nord-américaines sont résistantes à la maladie, mais peuvent en être porteuses. Des pertes peuvent être enregistrées si les stocks sont bondés ou affaiblis. Il faut examiner les stocks avant tout transfert d'écrevisses entre fermes ou toute libération dans la nature. Toutefois, l'infection est difficile à détecter chez la plupart des écrevisses nord-américaines qui sont généralement asymptomatiques. On craint que les espèces d'écrevisses américaines soient à présent vulnérables à la maladie si elles sont exposées aux souches européennes d'A. astaci; il faudrait faire preuve de prudence en cas de demande de réintroduction en Amérique du Nord des stocks d'écrevisses provenant d'Europe.

En Europe, la transmission de la maladie a été associée aux mouvements de l'écrevisse nord-américaine pour des besoins d'astaciculture. Elle a aussi été considérée comme une conséquence de l'utilisation des pièges à écrevisses et autres équipements contaminés (Alderman et al. 1990; Diéguez-Uribeondo 2006; Kozubíková et al. 2009, 2010). Par ailleurs, Oidtmann et al. (2005) ont indiqué que le mouvement des poissons vivants est un moyen important dans la propagation de la peste de l'écrevisse. La Norvège a adopté et mis en œuvre une réglementation visant à prévenir la propagation de la peste de l'écrevisse, mais cette législation s'est révélée inefficace (Johnsen 2007, Vrålstad et al. 2011), et des données obtenues sur le terrain montrent qu'A. astaci peut survivre pendant plusieurs années au sein d'une population de faible densité (c.-à-d. un réservoir latent) et sévir à nouveau une fois que la population des écrevisses augmente (Taugbol et Skurdal 1993). Toutefois, quelques données montrent que les populations d'écrevisses des petits lacs ou des bassins peuvent se remettre de la peste de l'écrevisse si les écrevisses infectées sont éradiquées (100 % de mortalité causée par la maladie) et le site laissé « en jachère » pendant quelques mois, puis repeuplé avec des écrevisses saines (Smith et Söderhäll 1986). Avant toute activité de réintroduction, l'absence d'A. astaci devra être approuvée par un test où l'on exposera, pendant une longue durée, des écrevisses vulnérables gardées en captivité dans des cours d'eau, même si cette approche ne peut pas complètement exclure que des écrevisses porteuses d'A. astaci passent inaperçues (Taugbøl et al. 1993, Diéguez-Uribeondo et al. 1997a, Kozubíková et al. 2008). Néanmoins, la peste de l'écrevisse peut avoir une incidence négative notable sur le rétablissement réussi des populations d'écrevisses indigènes en Europe centrale (Kozubíková et al. 2007).

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Citation

Bower, S.M. (2012): Précis des maladies infectieuses et des parasites des mollusques et des crustacés exploités commercialement: Peste des écrevisses (maladie fongique).

Date de la dernière révision : Janvier 2012
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