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Rapport final du Comité de conseil national sur les normes concernant les aires marines protégées

Présenté au ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne

Rapport final du Comité de conseil national sur les normes concernant les aires marines protégées

Rapport final du Comité de conseil national sur les normes concernant les aires marines protégées (PDF, 2.31 Mo)

Le 26 septembre 2018

Rémi Bujold et Mary Simon,
Coprésidents du Comité

David Anderson
Darcy Dobell
Tom Hayes
Marc Léger
Maureen Thomas

Table des matières

Recommandations

Dans le contexte canadien, le Comité a constaté qu’il y a un vif intérêt à s’efforcer de protéger le mieux possible les valeurs écologiques dans des zones qui ne sont pas toujours, à l’heure actuelle, entièrement protégées. Il a également constaté que l’approche du Canada en matière de conservation marine doit être plus souple et qu’un véritable cadre de gestion des océans au Canada devrait comprendre une gamme d’options, y compris des aires hautement protégées, d’autres outils de gestion spatiale et des aires protégées autochtones.

Les recommandations qui suivent sont regroupées en quatre sections, qui décrivent certaines des étapes que nous devons franchir afin de mettre en place un cadre holistique, uniforme et inclusif pour la gestion des océans au Canada.

1. Planification et conception collaboratives

Les experts et les intervenants appuient fermement les aires marines protégées et les objectifs de conservation. Peu remettent en cause leur importance pour la santé de nos océans. Comme l’océan est au cœur des moyens de subsistance et du mode de vie de nombreux Canadiens, les décisions gouvernementales ont de sérieuses répercussions sur eux.

Certaines collectivités côtières estimaient que leur mode de vie avait été touché par les décisions du gouvernement en matière de conservation et que leur contribution était souvent trop faible et trop tardive. D’autres nous ont dit que leur participation était fréquente, mais peu importante, ou qu’elles n’avaient pas la capacité de s’engager comme partenaires égaux. Dans certains cas, les peuples autochtones ont été exclus du processus décisionnel du gouvernement ou inclus sans avoir vraiment d’influence.

Une véritable collaboration ne peut être précipitée. Tout au long de son processus, le Comité a souvent entendu que le moment de la consultation était une préoccupation importante. Les intervenants ont dit qu’ils avaient été mis au courant des sites d’intérêt tard dans le processus de planification et qu’ils estimaient que leur influence sur la création et l’établissement des AMP était marginale. Ils ont aussi dit qu’ils ne savaient pas vraiment à qui ils devaient faire part de leurs préoccupations.

Certains intervenants ont vivement demandé de tenir compte des intérêts socioéconomiques au moment d’établir les aires marines protégées. D’après le Comité, il s’agit d’un point important. Le moyen de subsistance de nombreux Canadiens dépend de leur accès aux ressources marines. Les mesures de conservation peuvent avoir des répercussions économiques sur les collectivités locales. Ces répercussions sont souvent ressenties à l’échelle locale, tandis que les avantages reviennent à tous les Canadiens. De même, il y a place pour des protections solides et uniformes dans le milieu marin, et il existe un besoin réel de conserver des sites uniques de haute biodiversité et de productivité au bénéfice des générations futures. Cela ne signifie pas que l’ensemble de notre patrimoine océanique doive être protégé, mais simplement que nous devons considérer des espaces autres que les AMP pour que les activités industrielles puissent se poursuivre.

Il est plus important de bien concevoir les aires marines protégées et de bien planifier le réseau que d’atteindre des cibles numériques. Les aires marines protégées qui font partie d’un réseau atteignent plus facilement les résultats en matière de conservation, si l’on tient compte de la connectivité entre les sites, et cela permet de brosser un tableau complet de la conservation. La planification du réseau offre également une flexibilité pour le positionnement créatif de zones sans prélèvement et permet de placer les aires marines protégées dans les zones cruciales de biodiversité, offrant ainsi le meilleur rendement possible.

La principale leçon que nous avons tirée de ces points de vue est que le processus est important. Le soutien communautaire à l’égard des mesures de conservation est un indicateur important de leur succès et de leur efficacité. L’adoption d’un processus rigoureux d’établissement et de gestion des aires marines protégées peut aider à favoriser le soutien communautaire envers ces initiatives.

Nous savons que le Comité permanent des pêches et des océans de la Chambre des communes a récemment étudié le processus d’établissement des AMP en vertu de la Loi sur les océans et qu’il a élaboré une série complète de recommandations visant à améliorer ce processus. Nos recommandations font écho à certaines des leurs et nous avons grandement profité de leur travail.

À la lumière des idées et des conseils que nous avons reçus, nous recommandons ce qui suit :

P 1. Que le gouvernement fasse preuve de transparence à l’égard des collectivités locales, des peuples autochtones et des intervenants dès le début et tout au long du processus de mise en place d’aires marines protégées et de leur gestion continue.

P 2. Que les structures de gouvernance soient adaptées aux autorités régionales et locales et aux arrangements actuels, comme les traités, les ententes de règlement et les protocoles de réconciliation.

P 3. Que le gouvernement s’engage à présenter des rapports ouverts et transparents sur le succès des aires marines protégées, à effectuer une évaluation appropriée des aires marines protégées existantes et à mobiliser les Canadiens à ces activités.

P 4. Que les ministères collaborent afin de réduire la complexité de leur approche de l’établissement de réseaux d’aires marines protégées et d’autres mesures de conservation efficaces par zone.

P 5. Que le gouvernement élabore une base de données centrale ouverte ou une plateforme en ligne pour que les Canadiens aient facilement accès à l’information, y compris l’information spatiale, les objectifs de conservation, la catégorisation, les structures de gouvernance, la surveillance scientifique et les activités permises pour l’ensemble des aires marines protégées.

2. Relations Couronne-Autochtones

Les peuples autochtones jouent un rôle central dans la conservation marine comme détenteurs de droits et non comme intervenants. Cela repose sur l’article 35 de la Constitution, sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et sur les appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation. Des rapports plus récents, y compris Nous nous levons ensemble et Un nouveau modèle de leadership partagé dans l’Arctique, ont renforcé le rôle essentiel des peuples autochtones dans la gestion et la protection de la biodiversité et de ses valeurs culturelles, économiques et communautaires connexes. La reconnaissance significative des droits, des connaissances et des pouvoirs des peuples autochtones renforcera la gestion des océans sur les trois côtes, au profit de tous les Canadiens.

Les communautés autochtones possèdent une connaissance incomparable de leur environnement, et ont une relation unique avec celui-ci. Le Comité a entendu plusieurs représentants autochtones qui ont partagé certaines de ces idées. De nombreux intervenants ont souligné que les connaissances autochtones devraient être au cœur des efforts de conservation, et ont fait remarquer que ces connaissances n’ont pas toujours été intégrées sensément dans les décisions de gouvernance, de planification et de gestion. De même, le savoir autochtone n’est pas une case à cocher dans une liste. Il doit être incorporé de façon respectueuse et non être obtenu ou utilisé de manière unilatérale par des non-Autochtones. Pour remédier à ce manquement, nous recommandons :

RCA 1. Que les connaissances autochtones soient intégrées de manière significative à tous les aspects de la planification, de la conception, de la gestion et de la prise de décisions concernant les aires marines protégées, les aires protégées autochtones et autres mesures de conservation efficaces par zone.

RCA 2. Que le gouvernement reconnaisse l’importance du rôle des peuples autochtones comme partenaires à part entière dans tous les aspects de la conception, de la gestion et de la prise de décisions concernant les aires marines protégées, les aires protégées autochtones et autres mesures de conservation efficaces par zone.

La diversité des arrangements qui existent entre la Couronne et les peuples autochtones au Canada a offert une leçon importante. Nous avons abondamment entendu parler des relations uniques que les Premières Nations, les Inuits et les Métis entretiennent avec la Couronne. Ces relations sont structurées par des différences en histoire, de capacité, d’objectifs et de buts. Dans certains cas, les aires marines protégées ont été strictement gérées par le gouvernement en collaboration avec des communautés autochtones participantes qui n’avaient pas de rôle de leader. Le Comité a entendu parler d’approches de cogestion réussies, mises en œuvre par le gouvernement ou par les peuples autochtones, qui sont dépendantes de la volonté de deux groupes de se joindre à la table pour atteindre un objectif commun d’aires marines protégées. À l’autre extrémité se trouve le modèle émergent des aires protégées autochtones, inspiré et géré par les peuples autochtones. La principale conséquence de cette diversité pour la conservation marine est qu’une approche « universelle » des relations entre la Couronne et les Autochtones ne fonctionnera pas. Les initiatives de conservation doivent tenir compte de cette diversité.

Nous avons été frappés par le caractère flexible et progressif d’un certain nombre d’AMP cogérées au Canada et nous croyons que le modèle de cogestion est toujours pertinent et utile. Cette approche coopérative à la conservation par zone est un heureux exemple de réconciliation entre la Couronne et les peuples autochtones. Les aires marines protégées cogérées sont devenues un important mécanisme de protection marine pour le gouvernement fédéral et les peuples autochtones, et le Canada devrait continuer à tirer parti de ces réussites.

La réserve d’aire marine nationale de conservation Gwaii Haanas et le site du patrimoine haïda sont souvent cités comme exemples d’AMP cogérées avec succès. D’abord désignée site du patrimoine haïda en 1985, et par la suite, réserve d’Aire marine nationale de conservation en 2010, la région est régie par le Conseil de gestion de l’archipel, qui compte une représentation égale de dirigeants fédéraux et haïdas. L’Entente sur l’aire marine Gwaii Haanas de 2010 a été signée en même temps que la désignation fédérale de la zone, officialisant ainsi la cogestion de l’aire marine. Le site a permis de créer des emplois pour de nombreux Haïdas dans le cadre du programme Guardian Watchmen et a renforcé la capacité technique de gestion et de surveillance du site. Les principes haïdas sont incorporés dans la gestion du site et jouent un rôle central dans la gestion de l’aire. Par exemple, la direction du site s’engage à garder la culture haïda vivante par l’utilisation des ressources, la tenue d’activités commerciales et la poursuite de programmes culturels traditionnels.

Deux AMP en vertu de la Loi sur les océans dans l’ouest de l’Arctique sont cogérées conformément aux dispositions de la Convention définitive des Inuvialuit. Le Comité mixte de gestion des pêches a déterminé que les Zones de protection marines (ZPM) d’Anguniaqvia niqiqyuam et de Tarium Niriyutait étaient des aires importantes et le gouvernement fédéral a collaboré étroitement avec les Inuvialuit pour désigner les sites comme AMP en vertu de la Loi sur les océans en 2010 et 2013. Pêches et Océans Canada travaille étroitement avec le Comité mixte de gestion des pêches et les collectivités de Paulatuk et d’Aklavik pour cogérer les zones et fournir conjointement des orientations sur les décisions en matière de gestion, de surveillance et de recherche pour les deux ZPM.

Le Cercle d’experts autochtones note que l’un des quatre types de gouvernance dans l’ensemble des aires protégées reconnues de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) est la gouvernance par les peuples autochtones ou les communautés locales. Il souligne aussi que ces types d’aires pourraient contribuer efficacement à l’objectif 1 du Canada. Il poursuit en définissant le concept d’aires protégées et conservées par les Autochtones :

« Les aires protégées et conservées par les Autochtones sont des terres et des eaux où les gouvernements autochtones ont un rôle primordial à jouer dans la protection et la conservation des écosystèmes grâce aux lois, à la gouvernance et aux systèmes de connaissances autochtones. La culture et la langue sont le cœur et l’âme d’une aire protégée et conservée pas les Autochtones. »

Le Cercle d’experts autochtones, Nous nous levons ensemble : atteindre l’objectif 1 du Canada par l’établissement d’Aires protégées et conservées par les Autochtones (IPCA) dans l’esprit et la pratique de la réconciliation. Mars 2018, p. 35. Les APCA sont aussi appelées Aires protégées autochtones (APA), qui est le terme que nous utilisons dans ce rapport.

Un nouveau modèle de leadership partagé dans l’Arctique (rédigé par notre coprésidente Mary Simon) décrit en outre les principes de base du concept d’aire protégée autochtone :

« Les aires protégées autochtones reposent sur l’idée d’une aire protégée conçue expressément pour accueillir et soutenir une vision autochtone d’un paysage de travail. Ce genre de désignation offre la possibilité de créer un ensemble plus large et plus important d’avantages dans le Nord et de définir l’idée d’une économie de conservation. »

Mary Simon, représentante spéciale du ministre (2017). Un nouveau modèle de leadership partagé dans l’Arctique.

Le présent Comité est d’avis que les aires protégées autochtones joueront un rôle important dans la promotion des objectifs de conservation marine du Canada et qu’il faut faire davantage pour élaborer un cadre solide pour ces aires au Canada.

« En confiant la gestion des mesures de conservation aux peuples autochtones, ainsi nommés les gardiens des terres de plein droit, on décoloniserait les mesures de conservation et on contribuerait grandement à la réconciliation. »

Ibid.

L’autorité des peuples autochtones sur les environnements terrestres et marins n’a pas toujours été respectée. Les recommandations qui suivent aideront le gouvernement à appuyer fermement le concept novateur des aires protégées autochtones. Nous adoptons les trois éléments essentiels d’une aire protégée autochtone définis par le Cercle d’experts autochtones pour le contexte marin :

  1. ils sont gérés par des Autochtones;
  2. ils représentent un engagement à long terme en faveur de la réconciliation; et
  3. ils augmentent les droits et responsabilités des Autochtones.

Les aires protégées autochtones peuvent également procurer des avantages sociaux et économiques aux peuples autochtones. Comme le note Mary Simon, « les aires protégées autochtones ont la possibilité de servir de plateforme pour l’élaboration de programmes adaptés à la culture et l’embauche d’autochtones dans un large éventail de services ». Elles peuvent également contribuer « à leur guérison et à leur réconciliation ».

À la base, les aires protégées autochtones sont :

De nombreux intervenants autochtones ont affirmé qu’il y avait un grand besoin dans leurs collectivités de professionnels autochtones instruits et en santé, bien équipés pour développer et gérer des aires protégées. Le simple fait d’offrir une capacité ne suffit pas à répondre à ce besoin. Les programmes de gérance et de gardiens liés aux possibilités d’éducation et de formation peuvent améliorer le bien-être humain dans les communautés côtières isolées. L’avantage supplémentaire est que ces programmes peuvent être adaptés aux besoins particuliers de la communauté.

Les investissements dans des initiatives de surveillance et d’intendance peuvent appuyer les résultats de la conservation tout en offrant des emplois à long terme et en renforçant les capacités dans les communautés autochtones. Des accords de financement innovants et des partenariats publics-privés offrent de nouveaux modèles pour soutenir les investissements à long terme. Nous avons entendu parler d’un exemple unique de ce type d’entente avec le Coast Opportunity Funds en Colombie-Britannique qui tire parti du financement gouvernemental, philanthropique et conventionnel pour appuyer la protection de la biodiversité, la création d’emplois et le développement d’une économie dynamique axée sur la conservationNote de bas de page 8. Ainsi, nous recommandons ce qui suit :

RCA 3. Que le gouvernement détermine un financement à long terme, permanent et stable pour les aires marines protégées, les aires protégées autochtones et autres mesures de conservation efficaces par zone, y compris au moyen de mécanismes de financement novateurs pour appuyer l’éducation et la capacité de gestion grâce à des programmes autochtones de surveillance et d’intendance maritimes et côtières.

Les aires protégées autochtones sont des initiatives dirigées par des Autochtones et fondées sur les lois et la gouvernance autochtones. Leur existence ne dépend pas de la reconnaissance du gouvernement. Cela dit, en reconnaissant de façon appropriée les aires protégées autochtones, le Canada a une occasion unique de défendre et de soutenir les peuples autochtones de manière transformatrice. Aucune des lois canadiennes sur les AMP ne limite explicitement la possibilité pour le Canada d’établir des aires protégées autochtones avec les peuples autochtones.

Les intervenants nous ont dit que de reconnaître cette autorité en droit est l’une des méthodes de protection des droits des peuples autochtones. Le Canada dispose de quatre lois sur les AMP qui pourraient permettre cette reconnaissance si elles étaient modifiées : la Loi sur les océans, la Loi sur les aires marines nationales de conservation du Canada, la Loi sur les espèces sauvages du Canada et la Loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs. De même, nous tenons à cœur le message selon lequel ce ne sont pas les activités du Comité ni même celles de la Couronne qui dictent la conception ou le contenu des aires protégées autochtones. Le Comité reconnaît que les valeurs de conservation qui découlent des aires protégées autochtones profitent à tous les Canadiens. Cet avantage partagé apporte une responsabilité partagée. Nos recommandations visent à faire en sorte que les peuples autochtones puissent compter sur l’appui du Canada pour la mise en œuvre efficace et réussie des aires protégées autochtones, notamment pour la gestion, la surveillance et la mise en application continues, tout en protégeant leur droit inhérent à l’autodétermination.

Nous notons la position du Cercle d’experts autochtones selon laquelle tout processus axé sur le milieu marin devrait égaler et apprendre de leur vaste travail au Canada, tout en reconnaissant que le Cercle d’experts autochtones mettait l’accent sur les aires protégées terrestres. Nous notons en outre leur Recommandation selon laquelle l’examen des aires protégées et conservées par les Autochtones dans le contexte marin devrait être dirigé par les Autochtones. Nous reconnaissons que, même si nous avons entendu de nombreux témoignages d’intervenants au sujet des aires protégées autochtones, notre façon de penser ne devrait pas remplacer le processus dirigé par les Autochtones et l’obligation de consulter de la Couronne.

Ainsi, nous recommandons ce qui suit :

RCA 4. Que le gouvernement adopte ou modifie des lois et des règlements pour reconnaître, accommoder et appuyer la mise en œuvre des aires protégées autochtones.

RCA 5. Que les aires protégées autochtones soient prises en compte dans l’atteinte des objectifs de conservation du Canada si elles respectent les normes d’une aire marine protégée ou d’autres mesures de conservation efficaces par zone.

3. Normes de protection

Catégories de l’UICN

Ia Réserve naturelle intégrale
Contient des aires protégées qui sont mises en réserve pour protéger la biodiversité ainsi qu’éventuellement, des caractéristiques géologiques/géomorphologiques, où les visites, l’utilisation et les impacts humains sont strictement contrôlés et limités pour garantir la protection des valeurs de conservation.
Ib Aire de nature sauvage
Sont généralement de vastes aires intactes ou légèrement modifiées, qui ont conservé leur caractère et leur influence naturels, sans habitations humaines permanentes ou significatives, qui sont protégées et gérées aux fins de préserver leur état naturel.
II Parc national
Sont de vastes aires naturelles ou quasi naturelles mises en réserve pour protéger des processus écologiques de grande échelle, ainsi que les espèces et les caractéristiques des écosystèmes de la région, qui fournissent aussi une base pour des opportunités de visites de nature spirituelle, scientifique, éducative et récréative, dans le respect de l’environnement et de la culture des communautés locales.
III Monument ou caractéristique naturel
Sont mises en réserve pour protéger un monument naturel spécifique, qui peut être un élément topographique, une montagne ou une caverne sous-marine, une caractéristique géologique telle qu’une grotte ou même un élément vivant comme un îlot boisé ancien. Ce sont généralement des aires protégées assez petites et elles ont souvent beaucoup d’importance pour les visiteurs.
IV Aire de gestion des habitats ou des espèces
Visent à protéger des espèces ou des habitats particuliers, et leur gestion reflète cette priorité. De nombreuses aires protégées de la catégorie IV ont besoin d’interventions régulières et actives pour répondre aux exigences d’espèces particulières ou pour maintenir des habitats, mais cela n’est pas une exigence de la catégorie.
V Paysage terrestre ou marin protégé
Où l’interaction des hommes et de la nature a produit, au fil du temps, une zone qui possède un caractère distinct, avec des valeurs écologiques, biologiques, culturelles et paysagère considérables, et où la sauvegarde de l’intégrité de cette interaction est vitale pour protéger et maintenir la zone, la conservation de la nature associée ainsi que d’autres valeurs.
VI Aires protégées avec utilisation durable des ressources naturelles
Préservent des écosystèmes et des habitats, ainsi que les valeurs culturelles et les systèmes de gestion des ressources naturelles traditionnelles qui y sont associés. Elles sont généralement vastes, et la plus grande partie de leur superficie présente des conditions naturelles ; une certaine proportion y est soumise à une gestion durable des ressources naturelles; et une utilisation modérée des ressources naturelles, non industrielle et compatible avec la conservation de la nature, y est considérée comme l’un des objectifs principaux.

Source: UICN, “Application des catégories de gestion aux aires protégées : lignes directrices pour les aires marines.”

Il existe une gamme d’outils et de pouvoirs réglementaires pour la gestion des océans au Canada. Il est donc important de disposer d’une base uniforme de normes de protection et d’un moyen de suivre les résultats de conservation par rapport aux objectifs nationaux et internationaux et d’en rendre compte.

L’objectif 1 du Canada est exprimé en pourcentage, mais ces chiffres ne sont que des substituts des valeurs de la biodiversité; ces valeurs devraient être les objectifs réels d’un système d’aires marines protégées. Un réseau d’aires marines protégées de 10 % de la superficie totale des côtes et des océans d’un pays, s’il est situé dans des zones de faible biodiversité, pourrait en fait protéger beaucoup moins de biodiversité de la superficie totale, peut-être deux ou trois pour cent. En ce qui concerne les valeurs de la biodiversité qu’une aire marine protégée devrait protéger, la qualité est importante.

De nombreux intervenants ont discuté de la relation entre la conservation et les activités industrielles. Cette question était au cœur du mandat du Comité et a de vastes répercussions sur l’avenir des ressources océaniques du Canada. La conservation marine est récemment devenue une question de politique urgente, comme l’a clairement démontré l’engagement pris par le gouvernement en 2015 d’atteindre l’objectif 1 du Canada. À mesure que le gouvernement s’emploie à atteindre cet objectif et à accroître la protection marine dans nos océans, il existe un potentiel accru de chevauchement entre aires protégées et zones à potentiel économique, qu’il s’agisse d’extraction de ressources, de potentiel d’énergie renouvelable, d’aquaculture ou de transport maritime. Des directives claires sur les activités autorisées et interdites dans les aires protégées peuvent contribuer à réduire les conflits que nous voyons émerger de ces chevauchements.

L’UICN fournit des lignes directrices pour aborder les différences entre les aires protégées. Leur suite de catégories décrit les activités autorisées dans chaque type d’aire protégée. Les catégories vont de la catégorie Ia « Réserve naturelle intégrale » à la catégorie VI, « Aire protégée avec utilisation durable des ressources naturelles ». Les intervenants nous ont parlé de l’importance de règles claires pour les activités admissibles aux fins de planification et de l’importance de leur mise en application uniforme pour assurer l’équité entre tous les utilisateurs des océans.

Il y a trois avantages majeurs à suivre les catégories et les directives de gestion de l’UICN comme base pour un système canadien. D’abord, les catégories de gestion sont utilisées depuis un certain temps, elles ont une longue histoire d’interprétation et constituent désormais un système de classification largement utilisé. Par la suite, leur utilisation dans le domaine international offre une uniformité et la possibilité de faire des comparaisons sensées entre les initiatives de biodiversité marine du Canada et d’autres pays. Enfin, l’uniformité offerte par les catégories de l’UICN permet également aux parties prenantes et aux détenteurs de droits de s’engager plus facilement avec le gouvernement dans un processus de consultation efficace. Le Comité a donc porté une attention particulière aux catégories de gestion de l’UICN et aux lignes directrices pour leur interprétation.

Les directives de l’UICN indiquent clairement que les aires marines protégées ont pour objectif de protéger la biodiversité, ainsi que les valeurs culturelles et les services écosystémiques connexes. L’activité industrielle qui peut nuire à cette biodiversité n’est pas compatible avec l’objectif des aires marines protégées. Les résolutions de l’UICN sur l’activité industrielle sont reprises dans ses documents d’orientation actuels qui définissent explicitement l’exploitation minière, la pêche industrielle et l’extraction de pétrole et de gaz comme des activités incompatibles avec les aires marines protégéesNote de bas de page 9.

D’autres types de protection peuvent également apporter une contribution importante à la conservation et à la protection de la biodiversité. Lorsque ces autres désignations de gestion répondent aux critères d’AMCEZ, elles peuvent être comptabilisées avec les AMP dans les progrès du Canada vers l’atteint de l’objectif 1. Le Canada a établi des critères pour déterminer à quel moment les mesures de gestion sont considérées comme des AMCEZ. La Convention internationale sur la diversité biologique élabore également de nouvelles directives sur le sujet, attendues en novembre 2018.

Nous croyons que l’approche du Canada en matière de conservation marine devrait inclure des aires marines protégées hautement protégées visées par une norme nationale de protection uniforme, et comprendre en complément d’autres outils de gestion qui peuvent offrir des approches souples pour combiner une protection efficace de la biodiversité et le développement économique.

Ainsi, nous recommandons ce qui suit :

NP 1. Que le gouvernement adopte les normes et les lignes directrices de l’Union internationale pour la conservation de la nature pour toutes les aires marines protégées, interdisant ainsi les activités industrielles comme l’exploration et l’exploitation pétrolières et gazières, l’exploitation minière, le déversement et le chalutage par le fond.

NP 2. Lorsque des activités industrielles sont autorisées dans des zones prises en compte en tant qu’autres mesures de conservation efficaces par zone, le ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne doit être satisfait, par des lois ou des règlements efficaces, que les risques pour la biodiversité sont évités ou atténués.

4. Planification spatiale marine

Le mandat du Comité n’incluait pas la prise en compte des processus et des structures de gestion des océans au-delà des AMP, des AMCEZ et des aires protégées autochtones. Néanmoins, certains intervenants ont mentionné les avantages possibles d’une approche plus large dans laquelle les AMP, les AMCEZ et les aires protégées autochtones seraient considérées conjointement avec la question plus large de la planification des océans au-delà des limites des zones protégées. En raison de son cadre de référence et, par conséquent, du processus d’audience limité, le Comité n’offre aucune recommandation particulière à cet égard.

La planification spatiale marine est définie comme « un processus d’analyse et de distribution de la répartition spatiale et temporelle des activités anthropiques dans les zones marines pour atteindre les objectifs écologiques, économiques et sociaux spécifiés dans un processus politiqueNote de bas de page 10.» Dans certaines zones océaniques du Canada, la planification spatiale marine pourrait compléter la planification de la gestion intégrée ou d’autres approches de gestion. D’autre part, il peut arriver que des lacunes dans les connaissances ou des limitations institutionnelles rendent l’approche de la planification spatiale marine inappropriée. Ainsi, nous recommandons ce qui suit :

PSM 1. Que le gouvernement fédéral consulte les Canadiens sur les approches possibles à la planification spatiale marine dans chacune des régions océaniques du Canada.

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