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Centre d'expertise sur les mammifères marins : Rapport de recherche scientifique 2006-2008

Table des matières

Centre d'expertise sur les mammifères marins : Rapport de recherche scientifique 2006-2008

Centre d'expertise sur les mammifères marins : Rapport de recherche scientifique 2006-2008 (PDF, 8.07 MB)

4.0 Répercussions anthropiques sur les mammifères marins

4.1 Chasses commerciales et chasses de subsistance

4.1.1 Baleines boréales dans l'est de l'Arctique canadien et dans l'ouest du Groenland
Jeff Higdon

Chasse fructueuse à la baleine boréale

Chasse fructueuse à la baleine boréale
Photo: Jack Orr

La chasse commerciale des baleines boréales dans l'est du Canada et dans l'ouest du Groenland remonte à 1530, quand des baleiniers basques les ont chassées dans le détroit de Belle-Isle. Les Inuits du Canada et de l'ouest du Groenland ont également chassé la baleine boréale à des fins de subsistance et de commerce pendant des siècles. La planification du rétablissement des baleines boréales requiert une estimation de la taille de la population avant leur exploitation afin d'établir des objectifs de rétablissement. On peut estimer cette population en utilisant un modèle démographique et une série sur les prélèvements. L'établissement d'une série sur les captures, comme on le mentionne ici, a été la première étape.

La chasse commerciale à la baleine boréale a commencé au début des années 1500 dans la région du détroit de Belle-Isle, et les baleiniers danois et allemands voyageaient jusqu'au détroit de Davis vers la fin des années 1600. La colonisation de l'ouest du Groenland par les Danois et les Norvégiens a commencé en 1721 et ces colons participaient aussi activement à la chasse à la baleine boréale. Les baleiniers britanniques se trouvaient dans le détroit de Davis vers le milieu des années 1700 et se sont rendus dans la baie de Baffin au début des années 1800, donnant une nouvelle impulsion à cette chasse au large de l'île de Baffin, dans le détroit de Lancaster, dans l'inlet Prince-Regent et dans le golfe de Boothia. Les baleiniers américains ont été actifs dans le détroit de Davis dans les années 1700 et à nouveau dans les années 1800, et dans la baie d'Hudson après 1860, où les baleiniers écossais se sont joints à eux. La dernière chasse commerciale à la baleine boréale dans l'Arctique canadien a eu lieu en 1915, quand la population a atteint des effectifs extrêmement faibles et que les expéditions n'étaient plus rentables. On a estimé à 57 507-68 736 baleines le total (minimal) des prélèvements commerciaux entre 1530 et 1915, les plus grosses prises étant réalisées par les Basques et les Britanniques.

Figure 8. Total estimatif des prélèvements de baleines boréales par décennie dans l'est du Canada et l'ouest du Groenland entre 1530 et 2005, illustrant le faible volume des prises de subsistance des Inuits par rapport aux prises commerciales arvest per decade in eastern Canada and West Greenland from 1530-2005, illustrating how small Inuit subsistence harvests were in comparison to commercial harvests.

Figure 8. Total estimatif des prélèvements de baleines boréales par décennie dans l'est du Canada et l'ouest du Groenland entre 1530 et 2005, illustrant le faible volume des prises de subsistance des Inuits par rapport aux prises commerciales arvest per decade in eastern Canada and West Greenland from 1530-2005, illustrating how small Inuit subsistence harvests were in comparison to commercial harvests.

La première culture indigène à donner naissance à des chasseurs actifs de la baleine boréale était la culture de Thulé. Après 1500, la chasse à la baleine boréale a diminué, peut-être en raison de conditions climatiques changeantes, d'une raréfaction des baleines attribuable à la chasse pratiquée par les Basques ou d'une combinaison de ces deux facteurs. Les prises estimatives totales entre 1530 et la fin de la chasse commerciale à la baleine s'élèvent à 8 460 baleines. La chasse à la baleine pratiquée par les Inuits a diminué elle aussi après que les baleiniers commerciaux ont surexploité la population de baleines boréales, et on estime que seulement 56 baleines ont été chassées après 1918. L'estimation des prises des Inuits repose sur des données éparses et plusieurs hypothèses; il semble qu'au moins plusieurs parties de la série de données sur les prises soient des sous-estimations. La longue tradition de la chasse à la baleine boréale par les Inuits a subi les effets négatifs de la chasse commerciale. Il existe actuellement une chasse limitée au Nunavut et des chasses similaires prévues au Nunavik et dans l'ouest du Groenland.

Si l'on combine les prélèvements commerciaux inuits après 1530 (sans tenir compte des baleines abattues et perdues et en sachant que les données sont incomplètes pour certaines nations et certaines époques), on évalue à plus de 70 000 baleines le nombre de baleines tuées. Presque toutes (88 %) ont été capturées par des baleiniers commerciaux. Bien que la série soit encore incomplète, elle est plus détaillée que les données disponibles par le passé et devrait améliorer les efforts de modélisation visant à estimer la taille de la population avant la chasse à la baleine (figure 8). Toutefois, toute modélisation devrait évaluer rigoureusement la sensibilité des résultats aux aspects variables de la série sur les prélèvements en raison du nombre d'hypothèses incluses. La qualité des données sur les prises varie considérablement d'une nation et d'une époque à l'autre. Les études de modélisation de la population devront explicitement tenir compte de cette variabilité dans la qualité des données.

4.2 ProvidingFormulation d'avis scientifiques sur les TAC

4.2.1 Gestion du phoque du Groenland, du phoque à capuchon et du phoque gris au Canada
Garry Stenson

Depuis le début des années 1980, le gouvernement canadien utilise un point de référence appelé « taux de remplacement » dans la gestion du phoque du Groenland, du phoque à capuchon et du phoque gris dans l'Atlantique Nord-Ouest. Le taux de remplacement correspond au nombre d'animaux qui peuvent être capturés pendant une année donnée sans entraîner de réduction de la population totale l'année suivante. En 2003, toutefois, le Canada a adopté une nouvelle méthode de gestion des phoques dans le Canada atlantique. Cette méthode, appelée gestion des pêches par objectifs, comprend une approche de précaution, qui privilégie la prudence quand l'information est moins certaine, n'accepte pas l'absence d'information comme motif pour ne pas mettre en œuvre des mesures de conservation et définit, en avance, les règles de décision pour la gestion des stocks quand la ressource atteint des points de référence clairement énoncés. Ces points ou niveaux sont appelés seuils de référence cibles, de précaution (ou tampons) et pour la conservation (limitée ou critique).

L'un des principes de base de l'approche de précaution est la nécessité de tenir compte de l'incertitude associée aux estimations et d'élaborer un fondement pour la prise de mesures même si on n'en sait pas assez sur l'état du stock. Par conséquent, nous établissons une distinction entre les espèces pour lesquelles on dispose d'une quantité considérable de données (espèces bien documentées) et les situations où l'information sur les ressources est plus limitée (espèces peu documentées). Pour les espèces bien documentées, il faut établir au moins trois estimations de l'abondance sur une période de 15 ans, la dernière d'entre elles étant obtenue au cours des cinq dernières années, et disposer d'information à jour (moins de cinq ans) sur la fécondité et la mortalité. Si on ne dispose pas de ces données, les espèces seront jugées mal documentées.

Pour les espèces bien documentées, le seuil de référence pour la conservation (Ncritique) représente l'abondance numérique (estimative) à laquelle les prélèvements continus sont jugés avoir des effets préjudiciables graves et irréversibles sur la population. Toutefois, les estimations de l'abondance sont associées à une grande incertitude et cette incertitude s'accroît à mesure que la projection embrasse un avenir plus lointain. La gestion d'une population près du seuil de référence pour la conservation pourrait accroître la probabilité que la population diminue de manière non délibérée sous le Ncritique. Par conséquent, un seuil de référence de précaution (Ntampon) détermine une fourchette de population « à risque » au sein de laquelle des règles de contrôle de gestion prudente s'appliquent. Quand une population se trouve en deçà du seuil de référence de précaution, les gestionnaires peuvent établir un seuil de référence cible reposant sur des facteurs comme les répercussions sur l'écosystème et les retombées socio-économiques. Tant que la population demeure au-dessus du Ntampon, des stratégies de capture à risque plus élevé peuvent être adoptées. En fait, au Canada, il faut que la probabilité qu'une population se trouve au-dessus du Ntampon soit de 80 % pour que cette population soit estimée en bonne santé.

Si la population se trouve sous le Ntampon (mais au-dessus du Ncritique), les préoccupations en matière de conservation peuvent devenir une priorité et des règles préétablies de contrôle de l'exploitation sont alors appliquées dans le but de rétablir la population afin qu'elle retrouve un niveau supérieur au Ntampon dans un certain nombre d'années. Bien que l'exploitation et d'autres prélèvements par l'homme puissent se poursuivre, les stratégies de gestion exigent une probabilité élevée d'augmentation de la population (ou au contraire, un risque moindre de décroissance).

Une population inférieure au Ncritique est préoccupante sur le plan de la conservation et la poursuite des prélèvements présente un risque inacceptable d'effets préjudiciables graves ou irréversibles. Par conséquent, les mesures de gestion devraient veiller à ce que toute mortalité causée par l'homme soit éliminée.

Figure 9. Méthode de gestion des pêches par objectifs adoptée par le Canada en 2003 avec des seuils de référence établis pour les phoques du Groenland dans le nord-ouest de l'Atlantique.

Figure 9. Méthode de gestion des pêches par objectifs adoptée par le Canada en 2003 avec des seuils de référence établis pour les phoques du Groenland dans le nord-ouest de l'Atlantique.

Actuellement, nous avons établi que le Ncritique correspondait à 30 % du niveau de population le plus élevé estimé ou obtenu par déduction (N30), tandis que le Ntampon correspond à 70 % de ce maximum (N70) (figure 9). À des fins de gestion, nous avons également établi un niveau à 50 %, où des mesures de gestion plus rigoureuses s'imposent. Le seuil de référence de précaution est établi à un niveau assez élevé en raison des caractéristiques de la façon dont les phoques sont évalués et de la structure par âge des prises actuelles. Comme la principale méthode d'évaluation est d'estimer la production de nouveau-nés tous les quatre ou cinq ans et sachant que l'on trouve un nombre élevé de jeunes de l'année dans les prises, on ne peut déterminer l'incidence des captures actuelles avant que les animaux survivants ne se soient reproduits au moins cinq années plus tard. Par ailleurs, les conditions environnementales récentes ont été médiocres et continueront probablement à empirer, dans l'ensemble. Enfin, l'histoire a montré que les populations de mammifères marins augmentent de manière relativement lente, mais peuvent décroître rapidement (p. ex., béluga du Saint-Laurent, rorqual bleu) et que le fait de ne pas tenir compte du facteur d'incertitude peut entraîner de graves dommages (p. ex., morue franche, saumon, oreille de mer).

Le 7 octobre 2007, l'Organisation maritime internationale (OMI) a adopté une proposition (présentée par Transports Canada) en vue de soustraire à la navigation 1 780 kilomètres carrés du bassin Roseway, en les désignant « zones à éviter » par les navires de 300 tonnes de jauge ou plus, seulement en transit, entre le 1er juin et le 31 décembre. La date d'entrée en vigueur est le 1er mai 2008.

4.2.2 Mortalité causée par la chasse chez les phoques à capuchon de l’Atlantique Nord-Ouest
Garry Stenson

Pour déterminer avec précision l’abondance des populations sauvages, il est nécessaire d’obtenir les données les plus complètes possibles sur le niveau de mortalité causée par l’homme. Ceci est particulièrement important pour les espèces exploitées à des fins commerciales ou de subsistance. Dans l’Atlantique Nord-Ouest, les phoques à capuchon, comme les phoques du Groenland, sont tués dans le cadre de la chasse de subsistance au Groenland et de la chasse commerciale dans les eaux méridionales du Canada. Toutefois, contrairement aux phoques du Groenland, un nombre extrêmement faible de phoques à capuchon est prélevé dans l’Arctique canadien ou est prélevé en tant que prises accessoires dans le cadre des pêches commerciales

L’objectif de cette étude était de résumer les données disponibles sur les prélèvements de phoques à capuchon déclarés et d’estimer les taux de mortalité totaux attribuables à la chasse chez cette espèce entre 1954 et 2006. Avant l’imposition des quotas en 1974, les prélèvements canadiens étaient très variables, allant de quelques centaines d’individus à plus de 25 000. Entre 1974 et 1982, les prélèvements ont atteint une moyenne de 12 500 phoques. Toutefois, en raison d’un effondrement des principaux marchés, les prélèvements ont chuté après 1982. Les prélèvements annuels ont été pour la plupart de l’ordre de quelques centaines d’animaux jusqu’au milieu des années 1990. En 1996, un grand nombre de dos bleus ont été capturés illégalement, tandis qu’une subvention pour la viande a entraîné des captures de plus de 7 000 animaux en 1997 et de 10 000 animaux en 1998. Depuis, les prélèvements annuels de phoques à capuchon dans les eaux canadiennes sont demeurés faibles.

Entre 1945 et 1960, des phoques à capuchon ont été chassés par des navires norvégiens. Les prélèvements annuels ont varié de 1 500 à 48 000 individus et ont atteint une moyenne de 14 500 phoques. Entre 1970 et 1978, moins de 1 000 phoques ont été capturés par deux ans par des scientifiques norvégiens. Entre le milieu des années 1950 et 1972, les prélèvements effectués au Groenland se sont situés entre 1 000 et 2 000 individus. Depuis, les captures sont relativement stables, s’établissant en moyenne entre 6 000 et 7 000 phoques.

Entre 1954 et 1960, les prélèvements moyens ont été de 34 800 phoques. De 1974 à 1982, les prélèvements de phoques à capuchon s’élevaient en moyenne à 24 600 individus. La majorité des phoques à capuchon ont été capturés au Groenland. À l’exception de la période s’étendant de 1996 à 1998, durant laquelle les prélèvements canadiens représentaient plus de 70 % des captures annuelles, les prélèvements de phoques à capuchon par le Groenland représentaient plus de 65 % des phoques capturés. Environ 30 % des phoques à capuchon tués sont des jeunes de l’année.

4.2.3 Détermination du total autorisé des captures de bélugas et de narvals du Nunavut
Pierre Richard

La Gestion des pêches et de l'aquaculture (GPA) a demandé au Secteur des sciences de formuler des avis sur le total autorisé de captures visant tous les stocks de bélugas et de narvals du Nunavut. La GPA a également demandé que les avis soient formulés selon son cadre provisoire d'approche de précaution. À cette fin, il faut disposer d'une série d'évaluations sur une période suffisamment longue de la taille de la population, de la mortalité causée par la chasse et des paramètres concurrents de la dynamique de la population. Ceci n'est pas possible pour les espèces peu documentées – les stocks pour lesquels on ne peut estimer les paramètres de la dynamique de la population; la méthode prudente de prélèvement biologique potentiel (PBP) a été utilisée pour déterminer le total autorisé des captures de ces stocks.

Bélugas à la surface de l’eau dans une polynie

Bélugas à la surface de l’eau dans une polynie
Photo: M. Ramsay

Groupe de narvals

Groupe de narvals
Photo: Larry Dueck

On a également comparé les résultats du prélèvement biologique potentiel à un modèle de croissance simple utilisé pour déterminer la probabilité de risque de différents niveaux de déclin. Selon ce modèle, les répartitions de l'incertitude servent à modéliser l'imprécision de la taille de la population et du taux de perte par la chasse de même que l'incertitude associée au taux de croissance de la population. Si l'on compare le modèle de risque au modèle de croissance simple, le total autorisé recommandé des captures débarquées, c'est-à-dire le PBP moins les pertes par la chasse, a une faible probabilité d'induire une tendance à la baisse. À l'avenir, d'autres relevés de ces stocks pourront aider à évaluer la tendance et les paramètres de la dynamique de la population pour ces stocks.

4.3 Prises accessoires de mammifères marins

4.3.1 Prises accessoires de phoques du Groenland dans la pêche de la lompe à Terre-Neuve
Becky Sjare

Prises accessoires de phoques du Groenland dans un casier à crabes

Prises accessoires de phoques du Groenland dans un casier à crabes
Photo: DFO Newfoundland

espèces de phoques présentes dans les eaux terre-neuviennes se retrouvent prises fortuitement dans des engins de pêche actifs, comme des chaluts, et des engins passifs, comme des filets maillants. À Terre-Neuve, on retrouve des phoques du Groenland dans la majorité des pièges, principalement dans les filets maillants installés pour la lompe.

On trouve la lompe dans toutes les zones côtières de la province et de grandes concentrations sur le Banc de Saint-Pierre. La pêche utilise des filet maillants à filament simple dont la taille des mailles varie entre 25 et 27 cm et qui sont habituellement immergés à une profondeur variant entre 3 et 33 mètres. Généralement, les pêcheurs utilisent entre 20 et 100 filets qui forment de longs chapelets laissés sur place pendant deux ou trois jours avant d'être remontés à bord.

Les types d'engins utilisés et la période de la pêche à la lompe à Terre-Neuve constituent des facteurs clés qui influent sur le niveau de prises accessoires de phoques du Groenland. Les filets à grosses mailles utilisés pour la pêche constituent un obstacle important pour les phoques, qui ne peuvent peut-être pas les voir ou qui les attirent quand ils se remplissent de poissons. Dans certaines régions de la province, les activités de pêche empiètent sur les routes migratoires du phoque. Les jeunes phoques du Groenland nés à la fin de février et au début du mois de mars quittent les aires de mise bas se trouvant dans le sud du golfe du Saint-Laurent et la côte nord-est de Terre-Neuve en avril et en mai. Pendant cette migration printanière, certains phoques se déplacent le long des zones côtières de Terre-Neuve; ce sont eux qui se retrouvent pris dans les mailles des filets maillants installés pour les lompes.

Cette recherche fournit des estimations du nombre de phoques du Groenland prélevés annuellement entre 1970 et 2003. Les données proviennent d'un programme de surveillance des prises accessoires qui obligeaient les pêcheurs de lompes à consigner l'effort de pêche (les débarquements de rogues) et le nombre de phoques capturés quotidiennement entre 1989 et 2003. Avant 1989, les prises accessoires annuelles étaient estimées d'après les débarquements historiques de rogues.

Depuis le début de la pêche à la lompe en 1970 jusqu'en 1985, les prises accessoires de phoques du Groenland sont demeurées inférieures à 5 000 individus. En 1987, les prises se sont accrues, pour s'établir à un niveau record de 13 100 phoques, pour ensuite baisser à 3 600 individus en 1990. Les prises accessoires les plus élevées pour cette série chronologique s'élevaient à 46 394 phoques en 1994; les niveaux de capture sont demeurés supérieurs à 18 000 animaux jusqu'en 1997. En 2002 et 2003, on a observé un grand déclin de la pêche et les niveaux de prises accessoires ont baissé pour s'établir à moins de 10 000 animaux. Depuis 2003, les prises sont demeurées faibles. Ces estimations des prises accessoires annuelles varient selon plusieurs hypothèses clés, mais elles fournissent une vision à long terme des prises accessoires en tant que cause de mortalité.

4.3.2 Engin de pêche modifié pour réduire la mortalité accidentelle des cétacés
Edward Trippel

Câbles et engin de pêche modifiés

Câbles et engin de pêche modifiés
Photo: Edward Trippel

La mortalité accidentelle des cétacés attribuable aux prises accessoires et à l'enchevêtrement dans les engins de pêche commerciale est une source de préoccupation en matière de conservation dans le monde entier. On estime que plus de 10 % de la mortalité et plus de la moitié des blessures graves de la baleine noire de l'Atlantique Nord, une espèce extrêmement menacée, sont dues à son enchevêtrement dans les casiers à homards et les lignes des filets maillants. Depuis les années 1990, plusieurs techniques d'atténuation visant à réduire les mortalités de la population de baleines noires ont été mises à l'essai. L'utilisation de certaines de ces techniques dans la pêche commerciale est maintenant imposée par voie législative.

Toutefois, la population de baleines noires de l'Atlantique Nord demeure dans une situation précaire. Cette étude portait sur l'état actuel de développement et l'efficacité des techniques d'atténuation par l'ajout de sulfate de baryum au câble de l'engin de pêche.

La mise au point d'une ligne de fond à flottabilité neutre a été entreprise en vue de réduire les risques d'enchevêtrement de grosses baleines. Le produit qui en résulte est maintenu bien plus bas dans la colonne d'eau par rapport aux lignes de fond traditionnelles, mais dans les zones au fond dur, il était vulnérable au frottement et à l'usure. Pour réduire les mortalités une fois que les grandes baleines sont prises dans les filets, on a mis au point un câble de faible résistance recouvert de sulfate de baryum. La résistance à la rupture de ce produit était de 1 065 livres, ce qui est conforme aux limites imposées par la loi américaine, mais correspond à la moitié du poids des lignes de fond traditionnelles.

4.4 Relevés sismiques et sonars militaires

4.4.1 Regroupements de baleines boréales en quête de nourriture dans la mer de Beaufort canadienne et leur rôle dans l'atténuation des effets des bruits sous-marins sismiques
Lois Harwood

Baleines boréales vues d'un avion chargé des relevés

Baleines boréales vues d'un avion chargé des relevés
Photo: Lois Harwood

Un relevé aérien systématique par transects en travers du sud-est de la mer de Beaufort a été réalisé les 22 et 23 août 2007. L'objectif du relevé était de mettre à jour les connaissances sur la répartition des baleines boréales et leur utilisation de la mer de Beaufort, puisque le dernier relevé complet avait été effectué en 1986.

Vingt-quatre transects linéaires nord-sud ont été survolés, ce qui équivaut à environ 10 % de la couverture du relevé du sud-est de Beaufort. Les principaux observateurs ont observé 132 baleines boréales dans les transects, 38 à l'extérieur des transects et 71 pendant des vols de reconnaissance, pour un total de 241 baleines. Le nombre de baleines boréales observées dans les transects était plus de deux fois celui obtenu lors du relevé des années 1980, mais les zones générales où elles se rassemblaient étaient similaires.

Selon la définition de l'aire où se rassemblent des individus en quête de nourriture, soit plus de cinq baleines boréales par 100 kilomètres carrés, les baleines boréales étaient présentes dans trois grandes zones de regroupement d'individus en quête de nourriture en 2007, soit au large de la côte du Yukon entre Komakuk Beach et Shingle Point, près du rebord de la plateforme continentale au nord de l'estuaire du fleuve Mackenzie et au large de la péninsule de Tuktoyaktuk.

La tendance des baleines boréales à se regrouper et les connaissances en temps réel des zones où elles se regroupent permettent d'établir des procédures d'atténuation qui peuvent être

  1. plus restrictives dans les aires d'alimentation localisées des baleines boréales, pour éviter de perturber ou de blesser les baleines qui se nourrissent; et
  2. moins restrictives en dehors des aires d'alimentation, de façon à ne pas limiter de manière injustifiée l'activité de l'industrie. Des relevés aériens identiques sont prévus pour août 2008 et août 2009.

4.4.2 Surveillance acoustique des épaulards au large de la côte ouest du Canada
John Ford

Déploiement d'un dispositif d'enregistrement acoustique en mer

Déploiement d'un dispositif d'enregistrement acoustique en mer
Photo: Hiromi Naito

On peut trouver l'épaulard – le plus grand prédateur marin – dans tous les océans, mais il est très rare dans la plupart des régions. Les eaux au large de la côte ouest du Canada abritent une abondance exceptionnelle de cette espèce, qui devient une espèce « vedette » de l'environnement marin sauvage de la Colombie-Britannique. Depuis longtemps, les épaulards font l'objet de recherches sur le terrain par des scientifiques spécialistes des mammifères marins de la Station biologique du Pacifique (SBP) du MPO. Chaque année depuis le début des années 1970, on étudie les épaulards au moyen de la photo-identification des individus à partir des marques naturelles. La Station tient des registres de plus de 700 baleines provenant de trois assemblages distincts – ou écotypes – d'épaulards dans les eaux de la Colombie-Britannique. Cette surveillance annuelle de la population est essentielle aux efforts de rétablissement pour ces écotypes, qui sont tous répertoriés en vertu de la Loi sur les espèces en péril du Canada.

Grâce à cette étude à long terme, de nombreux aspects du cycle biologique et de l'écologie des épaulards en Colombie-Britannique nous sont maintenant connus, mais nos connaissances comportent encore de nombreuses lacunes. Une grande source d'incertitude a trait aux lieux de séjour des épaulards en hiver, quand la plupart des baleines quittent leurs habitats estivaux dans les eaux côtières protégées autour de l'île de Vancouver. Trouver des épaulards dans les eaux éloignées au large de la côte ouest en hiver constitue un défi de taille, et les petites embarcations que nous utilisons pour nos études en été ne sont pas à la hauteur de cette ambition. Le marquage des baleines au moyen d'étiquettes émettrices n'est pas encore une option viable en raison de la difficulté de fixer l'étiquette aux baleines sans les capturer et du manque de solidité de ces étiquettes, qui ne durent qu'un mois ou deux.

Pour en savoir plus sur la répartition hivernale des épaulards, nous établissons un réseau de stations de surveillance acoustique sous-marine éloignées à des endroits stratégiques le long de la côte de la Colombie-Britannique pour localiser les baleines grâce à leurs chants. Les épaulards conviennent parfaitement à ce genre de surveillance, puisque leurs chants sont fortement stéréotypés et diffèrent entre les populations et les groupes sociaux. Ainsi, avec seulement quelques minutes de chants d'un épaulard, nous pouvons déterminer son écotype et, dans le cas des épaulards « résidents », nous pouvons identifier les clans et les groupes concernés.

Nos stations de surveillance acoustique sont de deux types différents: côtières et extracôtières. Un prototype de station côtière a été mis à l'essai pendant quatre hivers à l'île Langara, au large de l'extrémité nord-ouest des îles de la Reine-Charlotte, ou Haida Gwaii. Cette station comprend une boîte étanche contenant un ordinateur spécialisé doté d'un système de détection des sons établi sur mesure. Il est alimenté par des batteries d'accumulateurs qui demeurent chargées au moyen de panneaux solaires. L'instrument est relié par un câble armé à un microphone sous-marin, ou hydrophone, placé sur le plancher océanique à environ 100 mètres de la côte. Quand l'hydrophone capte des sons de baleine, le système de détection acoustique enclenche l'ordinateur, qui enregistre un échantillon de sons sous-marins sur un disque dur à des fins d'analyse ultérieure. Cette station a livré de nombreuses données nouvelles sur la présence des baleines à cet endroit éloigné, et nous espérons déployer d'autres stations côtières à l'avenir.

Station d'enregistrement acoustique à distance (Orcabox) à l'île Langara

Station d'enregistrement acoustique à distance (Orcabox) à l'île Langara
Photo: John Ford

Notre deuxième type de station de surveillance a une fonction similaire aux unités côtières, mais l'ensemble du système est placé dans une boîte étanche submersible qui doit être déployée au large. La boîte contient un hydrophone, un système informatique miniaturisé avec un disque dur pour stocker les enregistrements numériques et des batteries qui permettent une surveillance et des enregistrements pendant un maximum d'un an. Les stations extracôtières sont ancrées au fond marin et suspendues à 50 mètres sous la surface par des flotteurs. Elles sont récupérées au moyen d'une libération acoustique, qui déconnecte l'ancre et permet à la station de flotter à la surface en vue de sa récupération.

La troisième méthode de surveillance acoustique des épaulards est devenue possible grâce à notre collaboration avec deux initiatives menées au large de la côte ouest – VENUS (Réseau expérimental sous-marin de Victoria) et NEPTUNE (Northeast Pacific Time-Series Underwater Networked Experiments). VENUS et NEPTUNE comportent tous deux des nœuds d'échantillonnage océanographique sur le plancher océanique qui sont reliés à Internet par un câble à fibres optiques. Ces nœuds comprennent des hydrophones optimisés pour la surveillance des sons des baleines et ils permettront aux chercheurs et au public d'écouter des épaulards en temps réel.

À mesure que notre réseau de surveillance acoustique des épaulards prend de l'expansion, il devrait continuer de fournir de nouvelles données sur les habitudes migratoires saisonnières de ces prédateurs énigmatiques.

4.5 Les mammifères marins comme sentinelles de la contamination environnementale

4.5.1 Évaluation des effets éventuels de la prospection de gisements d'hydrocarbures près des côtes sur les phoques annelés dans la région de la mer de Beaufort
Lois Harwood

Phoque annelé à un trou d'air

Phoque annelé à un trou d'air
Photo: DFO

Les objectifs de cette étude étaient de cerner et d'évaluer les répercussions possibles des activités industrielles océaniques sur les populations de phoques résidentes, en vue de formuler des avis sur les mesures d'atténuation et les études de surveillance qui pourraient être employées efficacement à l'avenir. L'étude portait sur le phoque annelé entre 2003 et 2006 dans l'habitat de banquise côtière au nord de l'estuaire du fleuve Mackenzie dans la mer de Beaufort.

Le site de forage Paktoa 2006 de Devon Canada se trouvait près du bord de la banquise, qui constitue une caractéristique très importante de l'écosystème marin arctique et est essentiel pour les phoques. Elle est utilisée pour établir et défendre les territoires d'accouplement, donner naissance aux petits et en prendre soin, se reproduire et se reposer. Pendant les trois premières années de l'étude, l'activité industrielle n'avait pas encore commencé à Paktoa, tandis que la quatrième année, l'étude a eu lieu pendant la dernière partie de la saison de forage exploratoire. En 2006, Devon a terminé le forage et a abandonné le puits.

La distance moyenne entre les tanières et les trous d'aération, d'une part, et Paktoa, d'autre part, n'a guère changé au cours de la période et il en va de même pour les structures gelées utilisées activement par les phoques, où l'on n'a observé aucune différence significative entre l'année d'activité industrielle et les années précédentes. En 2006, la distribution statistique des distances des structures utilisées par les phoques par rapport à la route de glace, à la piste d'atterrissage et au campement de recherche n'a montré aucune tendance à l'évitement ou à l'attrait de ces sites.

Vingt phoques annelés ont été capturés, munis d'émetteurs satellites et relâchés près du site de Paktoa. On n'a pas observé de différences statistiques notables dans les déplacements et la taille des territoires fréquentés par ces animaux marqués entre 2005 et 2006, quand l'état des glaces était fort différent. Par ailleurs, 68 phoques annelés ont été prélevés afin d'examiner leur état corporel et l'état reproducteur de la population locale. Les spécimens prélevés avaient un bon état corporel et d'importantes réserves de gras; leur état reproducteur était normal et la plupart avaient des proies dans l'estomac.

Dans l'ensemble, l'étude a livré d'importantes données de référence sur l'utilisation par les phoques annelés des eaux à proximité des côtes de la mer de Beaufort au printemps et sert de référence à toute étude ultérieure concernant plusieurs activités de forage ou encore des activités de longue durée. Les résultats donnent à penser qu'une saison de forage industriel dans le site de Paktoa n'a pas eu d'effet perceptible sur les phoques annelés dans l'aire à l'étude. Les effets d'expositions plus longues à cette activité industrielle demeurent inconnus.

4.5.2 Les épaulards comme indicateurs de la pollution en milieu océanique
Peter Ross

Épaulards devant une raffinerie de pétrole

Épaulards devant une raffinerie de pétrole
Photo: Ingrid Visser

Malgré des efforts internationaux visant à lutter contre les biphényles polychlorés (BPC) et de nombreux autres contaminants, ceux-ci demeurent présents dans l'environnement et peuvent présenter des risques pour la santé des mammifères marins se trouvant en haut de la chaîne trophique. Les populations d'épaulards de la Colombie-Britannique font face à de nombreuses pressions. Le Comité sur le statut des espèces menacées de disparition au Canada classe les résidents du sud comme étant en danger de disparition et les résidents du nord et les épaulards de passage comme étant menacés. Les épaulards résidents consomment presque exclusivement du poisson, tandis que les populations de passage consomment presque exclusivement des mammifères marins.

Plusieurs facteurs nuisent au rétablissement des épaulards résidents de la Colombie-Britannique, dont la petite taille de la population, la raréfaction de leur proie principale (saumon), le bruit et la perturbation. En outre, les épaulards résidents sont une cible d'observation mythique pour les touristes, et des mesures sont prises pour assurer que les activités d'écotourisme n'entravent pas les processus vitaux normaux, entre autres l'alimentation, la socialisation et la reproduction.

Le phoque commun a permis de nous éclairer sur la menace que représentent les contaminants comme les BPC pour les épaulards. Ce petit mammifère marin non migrateur a une physiologie similaire à celle de l'épaulard. Son échantillonnage entraîne moins de perturbations que la réalisation d'autres biopsies sur les épaulards à l'aide de dards. L'abondance des phoques communs, qui sont au nombre de 130 000 en Colombie-Britannique, permet aux chercheurs de choisir les animaux d'un même âge et d'un état semblable, ce qui fournit des données plus fiables.

Que la source des contaminants soit située à proximité ou très éloignée, les épaulards de la Colombie-Britannique en accumulent dans leur organisme en consommant des proies côtières. Le saumon, principale source de nourriture des épaulards, migre des océans aux milieux côtiers, transportant du même coup de petites quantités de produits toxiques. Les espèces comme le sébaste, qui passent leur vie plus près des côtes, ont également une teneur plus élevée en contaminants.

La position des proies dans la chaîne trophique est également importante. Les épaulards nomades se nourrissent de phoques, d'otaries, de marsouins et d'autres mammifères qui ont déjà accumulé des toxines en ingérant des organismes des niveaux inférieurs de la chaîne trophique. Ainsi, les épaulards nomades risquent plus d'être touchés par les effets toxiques que leurs cousins résidents qui se nourrissent de poissons. Les épaulards de la Colombie-Britannique aident les chercheurs et les gestionnaires à mieux comprendre le sort des contaminants environnementaux à l'échelle mondiale.

4.6 Événements d'échouement et de mortalité

4.6.1 Mortalité causée par la chasse chez les phoques du Groenland dans l'Atlantique Nord-Ouest
Garry Stenson

Navires phoquiers qui partent chasser le phoque du Groenland près des îles de la Madeleine

Navires phoquiers qui partent chasser le phoque du Groenland près des îles de la Madeleine
Photo: Mike Hammill

On a besoin d'information sur le niveau de mortalité causée par l'homme pour établir des estimations précises de toute population. Ceci est particulièrement important pour les espèces exploitées qui font l'objet de prises importantes, et cette information est donc nécessaire pour élaborer un plan de gestion responsable. La population de phoques du Groenland de l'Atlantique Nord-Ouest est sujette à divers types de mortalité causée par l'homme, ente autres la pêche de subsistance au Groenland et dans l'Arctique canadien, les prises commerciales dans les eaux méridionales du Canada, les animaux tués mais non débarqués et les prises accessoires dans les engins de pêche commerciale.

L'objectif de cette étude était de résumer les estimations disponibles et de les mettre à jour pour la période 1952-2004. Les pêches de subsistance et commerciale représentaient la majorité des prélèvements. Entre 1952 et 1971, les prises se sont établies en moyenne à plus de 288 000 phoques pour la chasse commerciale. Les quotas ont été mis en place en 1972, et jusqu'à la fin de la chasse à bord de gros bateaux en 1982, 165 000 phoques étaient prélevés chaque année. Après 1982, les prises se sont élevées en moyenne à 52 000, jusqu'en 1995, où elles ont augmenté pour atteindre une moyenne de 258 000 phoques.

Au Groenland, les prises étaient inférieures à 20 000 avant 1980, puis ont augmenté progressivement pour atteindre un sommet de plus de 100 000 en 2002 et ont diminué récemment pour s'établir à quelque 70 000 phoques. On dispose de données limitées sur les prises dans l'Arctique canadien, mais il semble que les nombres soient relativement faibles (moins de 5 000). Ainsi, le total des prélèvements entre 1952 et 1982 s'établissait à 388 000, mais il a chuté à 178 000 annuellement entre 1983 et 1995. Le Canada et le Groenland ont augmenté leurs prises à partir de 1996, ce qui a donné lieu à un prélèvement annuel moyen de 471 000 individus. Les jeunes de l'année représentent environ 68 % des prélèvements actuels.

4.6.2 Bélugas de l'estuaire du Saint-Laurent – Examen du programme des carcasses
Lena Measures

Examen d'un béluga échoué

Examen d'un béluga échoué
Photo: Lena Measures

En 2005, un atelier sur le programme des carcasses de bélugas de l'estuaire du Saint-Laurent s'est tenu à l'Institut Maurice-Lamontagne. Quelque 25 scientifiques et gestionnaires participant au programme ou intéressés par le programme et des consultants invités y ont pris part. L'atelier avait une double finalité: 1) évaluer l'utilité du programme en fonction de quatre thèmes principaux, soit les causes de mortalité et les maladies, les contaminants et les effets toxiques, la biologie et la démographie, et la conservation; et 2) déterminer l'avenir du programme en examinant les options et les conséquences. On a présenté l'historique du programme de récupération des carcasses ainsi qu'une description du programme de nécropsie. D'autres exposés ont résumé les connaissances actuelles sur les maladies parasitaires et infectieuses, l'exposition aux contaminants et leurs effets toxiques, l'information écologique et démographique et les mesures de conservation (parc marin national et aire marine protégée proposée) conçues pour protéger le béluga et son habitat. Un dernier exposé sur l'utilité d'un programme d'intervention auprès des mammifères marins échoués en Californie a été présenté à des fins de comparaison.

Quatre recommandations clés ont été formulées à l'issue de l'atelier :

  1. On doit maintenir le programme de carcasses de bélugas de l'estuaire du Saint-Laurent, une étude de cas reconnue à l'échelle mondiale;
  2. il faudrait communiquer et intégrer les données disponibles, normaliser et documenter les protocoles et coordonner les banques de tissus et les bases de données archivées, etc.
  3. les volets de base du programme (surveillance, nécropsie et échantillonnage) doivent se poursuivre et bénéficier d'un financement adéquat; et
  4. des projets de recherche spéciaux devraient être financés pour répondre à des questions précises soulevées par les résultats du programme de base de même qu'à des besoins de gestion particuliers. On a jugé essentiel de valider, d'examiner et d'intégrer plus de 20 années de données consultables dans une base de données accessible de sorte à pouvoir vérifier diverses hypothèses et à les utiliser pour mieux comprendre pourquoi cette population ne s'est pas rétablie. On peut consulter un compte rendu (2007-005) de l'atelier à l'adresse http://www.meds-sdmm.dfo-mpo.gc.ca/csas/applications/Publications/publicationIndex_f.asp.

4.6.3 Réduction du risque de collision entre les navires et les baleines noires dans la région du bassin Roseway du sud-ouest de la plateforme Scotian
Heath Stone

Baleine noire femelle et son baleineau

Baleine noire femelle et son baleineau
Photo: NOAA-NMML

Figure 10. Le sud-est de la Plateforme Scotian avec l'emplacement de l'aire de conservation de la baleine noire du bassin Roseway (rouge) et la zone désignée à éviter par la navigation commerciale (bleu).

Figure 10. Le sud-est de la Plateforme Scotian avec l'emplacement de l'aire de conservation de la baleine noire du bassin Roseway (rouge) et la zone désignée à éviter par la navigation commerciale (bleu).

La baleine noire de l'Atlantique Nord est l'une des plus grandes baleines. Elle est également l'une les plus en danger et est répertoriée comme espèce menacée de disparition dans l'annexe 1 de la Loi sur les espèces en péril du Canada. On estime actuellement la population de baleines noires à 350-400 individus. L'abondance de l'espèce semblait diminuer pendant les années 1990, et la mortalité causée par l'homme qui a été documentée est principalement attribuable aux collisions avec des bateaux. En 1993, le MPO a désigné deux aires de conservation: le bassin de Grand Manan (baie de Fundy) et le bassin Roseway (entre le banc de Browns et le banc de Baccaro). Les deux aires sont importantes pour l'alimentation et la socialisation des baleines et les concentrations de baleines noires y sont élevées en été et à l'automne.

Des mesures de conservation visant à réduire les risques de collision entre baleines noires et navires dans l'aire de conservation du bassin de Grand Manan ont été mises en œuvre avec succès en 2003 par Transports Canada et le MPO. En dehors de la baie de Fundy, le bassin Roseway est la seule autre aire connue en eaux canadiennes où les baleines noires de l'Atlantique Nord se réunissent en nombre relativement élevé, mais il n'existe actuellement aucune mesure reconnue de gestion du trafic maritime dans cette région.

En 2006, le Comité national d'examen par les pairs sur les mammifères marins du Secteur des sciences du MPO a passé en revue une proposition visant à désigner une « zone à éviter » autour de l'aire de conservation du bassin Roseway (figure 10). La proposition reposait sur des données scientifiques, qui comparaient la répartition des baleines noires avec l'information sur le trafic maritime traversant la région. Le Comité a conclu qu'une réduction du trafic maritime dans cette région donnerait lieu à une réduction des risques de collision entre les baleines noires et les navires et accroîtrait donc les chances de rétablissement de l'espèce.

Le 7 octobre 2007, l'Organisation maritime internationale (OMI) a adopté une proposition (présentée par Transports Canada) en vue de soustraire à la navigation 1 780 kilomètres carrés du bassin Roseway, en les désignant « zones à éviter » par les navires de 300 tonnes de jauge ou plus, seulement en transit, entre le 1er juin et le 31 décembre. La date d'entrée en vigueur est le 1er mai 2008.

4.7 Changement climatique

4.7.1 Les phoques annelés comme indicateurs du changement
Lois Harwood

Remise en liberté d'un phoque annelé marqué dans son trou

Remise en liberté d'un phoque annelé marqué dans son trou
Photo: Lois Harwood

La répartition du phoque annelé est circumpolaire, et ce phoque est l'espèce de pinnipède la plus abondante dans l'océan Arctique. Il est considéré comme un indicateur raisonnable de la santé de l'écosystème en raison de sa position en haut de la chaîne trophique. Les phoques annelés sont omniprésents et constituent d'importantes proies pour les ours polaires; les changements dans la répartition et l'abondance du phoque peuvent avoir des conséquences à long terme sur la survie des ours polaires. Les phoques annelés constituent une ressource de subsistance précieuse pour les Inuvialuits. Les recherches menées auparavant sur les phoques annelés de l'ouest de l'Arctique ont révélé une tendance à la baisse dans l'abondance de l'espèce, une réduction des taux d'ovulation chez les femelles adultes, une réduction du nombre de nouveau-nés dans la pêche de subsistance et une réduction du nombre de sites propices de mise bas en association avec les conditions de glace épaisse de l'hiver 1974-1975.

Des échantillons de phoques ont été prélevés pendant la chasse de subsistance par un chasseur de phoques hautement expérimenté d'Ulukhaktok, dans les Territoires du Nord-Ouest. Les paramètres examinés incluent la détermination du taux d'ovulation des femelles adultes, la proportion de nouveau-nés dans la chasse de subsistance, l'importance des classes d'âge, l'état corporel (épaisseur du petit lard, indice de masse corporelle) des phoques capturés et l'enregistrement d'observations et d'événements inhabituels par les pêcheurs. Les taux d'ovulation sont toujours demeurés élevés entre 1992 et 1999 et ont baissé légèrement récemment. La proportion annuelle de nouveau-nés dans la pêche en mer ouverte a également affiché une tendance à la baisse entre 2000 et 2006. L'épaisseur du petit lard a diminué entre 1992 et 1996 pour tous les groupes d'âge, à l'exception des jeunes qui viennent d'être sevrés.

Cette tendance à la baisse dans la reproduction des phoques et leur état corporel suivait de près le nombre de jours d'eau libre en 2000 et en 2002-2005. Lorsque les phoques annelés passent plus de temps en eau libre, comme ce fut le cas en 1998 et en 2001, ils sont plus gras et la production de nouveau-nés est élevée. On ne comprend pas bien les mécanismes, mais ils semblent liés aux changements dans le moment de la dislocation de la glace de mer au printemps. Le moment du dégel influe sur le moment de l'établissement de conditions océanographiques qui favorisent la production d'aliments pour les phoques, comme la morue.

4.7.2 Épaulards et changement climatique
Steve Ferguson

Sauts d'observation des épaulards

Sauts d'observation des épaulards
Photo: Graeme Ellis

Bien que ceci soit l'objet d'une controverse, les épaulards ont joué un rôle en tant que modificateurs importants de l'écosystème créant des cascades trophiques par suite de perturbations de l'écosystème, notamment la chasse commerciale à la baleine. Les modèles de changements climatiques prédisent des réductions importantes de la banquise, ce qui entraînera probablement des changements dans la répartition et l'abondance des espèces. On a émis l'hypothèse que les épaulards migreront dans les eaux de l'Arctique à mesure que la banquise disparaîtra, et qu'en tant que prédateurs d'un niveau trophique supérieur, ils déclencheront d'importants ajustements écosystémiques. Dès lors, on prévoit que les épaulards joueront un rôle de premier plan dans la réorganisation de l'océan Arctique qui subit actuellement les effets du réchauffement climatique.

Dans cette étude, les changements dans la répartition des épaulards dans la baie d'Hudson ont été mesurés avec la diminution de la banquise comme example servant à illustrer les réajustements globaux qui se produisent par suite de l'évolution du climat. On a résumé les données sur les épaulards dans la baie d'Hudson, le détroit d'Hudson et le bassin Foxe et établi un lien avec une série de données historiques sur la banquise. Les résultats révèlent l'existence de « goulots d'étranglement », où la banquise entrave les déplacements des épaulards et restreint leur répartition dans l'Arctique. Le détroit d'Hudson semble avoir été un important goulot d'étranglement de glace marine qui s'est ouvert il y a 50 ans, permettant l'apparition des épaulards et la progression de la répartition d'un prédateur évitant la glace.

Les observations d'épaulards ont augmenté de manière exponentielle et on en signale maintenant dans la région de la baie d'Hudson chaque été. La disparition d'autres goulots d'étranglement est à prévoir en raison de la fonte continue de la banquise, ce qui entraîne des cascades trophiques prédateur-proie intermittentes dans l'Arctique.

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